La Mauritanie fait encore parler d’elle. Non dans un sens qui l’honore mais comme toujours en allant à contre courant de tout ce qui se fait en matière de respect des droits de l’homme. La Mauritanie veut, semble t-il, assainir sa situation démographique en s’attaquant systématiquement aux ressortissants de l’Afrique noire.
En effet, depuis ce jeudi, la police se livre à son jeu favori, créer une psychose chez la population. Elle a ainsi procédé à plusieurs arrestations et aucune explication n’a été donnée à ces « malheureux » ressortissants de l’Afrique de l’Ouest si ce n’est l’ordre de monter dans des voitures polices en direction du centre de rétention. Il faut noter qu’aucune différence n’a été observée entre ceux qui sont en situation régulière et ceux qui ne le sont pas. D’ailleurs, la plupart a été arrêtée au lieu de travail tandis que d’autres ont été « extirpé » de chez eux.
Même si chaque Etat dispose d’un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne l’accueil et le séjour des étrangers sur son territoire, il n’en demeure pas moins, qu’il existe des règles de base à respecter. Le respect des droits de l’homme s’impose aux Etats car il transcende l’ordre juridique interne. La Mauritanie veut faire l’exception en décrétant des règles en pleine contradiction avec le respect des normes internationales de protection des droits de l’homme.
La chasse aux étrangers est ainsi ouverte en Mauritanie, la psychose s’est installée chez ces derniers à tel point qu’ils ne peuvent plus sortir pour ceux qui n’ont pas encore été délogés. La police a procédé à plusieurs arrestations en allant les chercher chez eux entrainant une certaine cacophonie. Comme si on était dans une situation d’extrême urgence, les grandes artères des villes comme Nouadhibou et Nouakchott ont été quadrillés par les voitures de police et de la gendarmerie. Le comble, le désarroi et l’incompréhension ont étaient tels que certains ont été obligés de quitter leur domicile, certains mêmes parlent de femmes en état de grossesse, de nourrices qui ont été embarqués de force dans les voitures comme la police mauritanienne sait bien le faire. Entre le silence coupable et les sorties maladroites des politiciens
Quand il s’agit de défendre leurs intérêts égoïstes, les politiciens sont les premiers à monter au créneau pour crier au scandale et même au départ du Président, mais quand il s’agit d’un dossier aussi sensible, c’est leur fébrilité qui reprend le dessus. Ainsi, depuis ce jeudi le jour où tout a commencé, les politiciens brillent par leur silence face à ce qui peut être considéré comme les pires violations des droits de l’homme. Il faut noter que les autorités mauritaniennes n’ont donné aucune explication par rapport à ce qu’elles sont entrain de faire si ce n’est le pseudo assainissement de la situation démographie.
Ces mêmes autorités ne réalisent pas qu’elles peuvent un jour être appelées à répondre de leurs actes. La précipitation dans laquelle s’est déroulée cette opération montre la mauvaise foi des autorités sans avoir demandé au préalable aux étrangers en situation irrégulière de quitter le territoire ou d’entamer les procédures pour leurs régularisations. Aucune condamnation de la part des politiciens et aucun appel au respect du droit des travailleurs migrants de leur part. Alors que l’universalité des droits de l’homme impose de respecter chaque être humain indépendamment d’aucun fait particulier, il semble en Mauritanie que ce respect soit conditionné à la nationalité ou pire encore correspondre « à un certain prototype » de mauritanien.
On est ainsi amené à se demander pourquoi les politiciens se sont tus surtout quand on sait que le silence n’est pas une de leur qualité dominante. La seule sortie au moment où nous mettons sous presse cet article, est celle, maladroite, d’Ibrahima SARR président de l’AJD/MR. Il l’a abordé avec une banalité déconcertante pendant que des familles entières ont été rapatriées sans qu’on leur ait donné la possibilité de récupérer leurs biens.
Il affirme à cet effet : «
J
e pense que c’est lié à ce qu’on appelle « l’enrôlement ». La Mauritanie est en train d’identifier tous les résidents qu’ils soient nationaux ou étrangers. C’est certainement dans ce cadre. C’est sans doute ceux qui ne sont pas en situation régulière, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas un contrat de travail, qui sont expulsés ». Avant d’ajouter : « Je reste persuadé que ce n’est pas pour le plaisir d’expulser que ces mesures ont été prises mais elles obéissent à mon avis, à une volonté de se faire une idée exacte de la situation démographique en Mauritanie ». Une attitude que d’aucuns qualifient de choquante face à l’ampleur du phénomène. Détenus dans des conditions inhumaines et dégradantes en plus d’avoir fait l’objet d’une chasse sans merci de la police, aucun droit élémentaire ne leur a été accordé en leur qualité d’être humain. Et les ONG de droits humains dans tout ça ?
Face à cette situation, certaines ONG de promotion et de protection des droits humains ont lancé un vibrant appel aux autorités mauritaniennes pour qu’elles mettent en avant le respect de leurs engagements internationaux qui ne doivent pas rester lettre morte. A cet effet, le Forum des Organisations Nationales des Droits de l’Homme rappelle que : « ces pratiques sont contraires aux textes internationaux sur le droit des étrangers, notamment, la Convention Internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, le Protocole d’Accor signé avec certains pays de la CEDEAO (Sénégal, Mali), concernant la libre circulation des personnes et des biens et la Charte Africaine sur la Migration et les droits de l’homme ».
Faut-il rappeler aussi que l’article 80 de la Constitution mauritanienne consacre le principe de primauté de la norme internationale sur les lois internes ? Donc la Mauritanie est doublement liée par ces engagements et se doit de les respecter. Mais comme toujours, le problème est moins le texte que son application. C’est à ce niveau que devraient agir les ONG de droits humains pour mettre l’Etat en face de ses contradictions et l’obliger à traduire dans la réalité les textes adoptés. La RADDHO est aussi sur la même longueur d’onde et appelle à un « arrêt immédiat des refoulements d’étrangers ». Dans la foulée, le mouvement Touche pas à Ma Nationalité, est monté au créneau pour dénoncer l’attitude « xénophobe » de l’Etat mauritanien et met en garde contre les « dérives de la police qui est habitué à considérer tout noir comme étranger ». Reste à savoir quelle sera la portée de ces appels et comment les autorités mauritaniennes vont en tenir compte. Force est de constater qu’en matière de respect des droits humains, la Mauritanie reste l’une des plus mauvaises élèves au monde.
BA Youssouf
Rédacteur en chef du site www.flere.fr
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