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lundi 7 mai 2012

Affaire Birame Dah Ould Abeid : Le dossier de tous les extrémismes.


Pendant que les militants d’IRA (Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste) ont manifesté jeudi dernier pour réclamer la libération de leur président Birame Ould Dah Ould Abeid, dont l’arrestation suite à l’autodafé de Riadh est considérée par ses partisans comme un acte raciste et injuste envers les Haratines, les Imams de mosquée ont pris le train de l’extrémisme religieux en marche, exigeant la Talibalisation de la Mauritanie.

Des centaines de Haratines, membres et sympathisants du mouvement abolitionniste IRA sont sortis massivement jeudi 3 mai dernier pour exiger la libération de leur président Birame Ould Dah Ould Abeid, arrêté suite à l’incinération de livres du rite malékite.

Pour les manifestants, l’ampleur donnée au geste de Birame est mue par des élans racistes de la part d’un système esclavagiste qui semble avoir trouvé l’occasion d’en finir avec un cauchemar dénommé IRA et son charismatique président Birame Ould Dah.

Ce dernier, il faut le rappeler, a été présenté au Parquet de la République après six jours de garde-à-vue. Inculpé de "violation des valeurs islamiques du peuple mauritanien ", il a été remis, ainsi que dix de ses compagnons, à la Direction de la Sûreté d’Etat pour complément d’enquête. Cette affaire, politisée à l’extrême, a été instrumentalisée par le pouvoir et sa garde prétorienne cléricale, pour se refaire une nouvelle santé politique, à deux jours d’une manifestation monstrueuse que l’opposition se préparait à mener pour le départ du régime.

Depuis, le cas Birame Ould Dah a occupé, comme jamais un évènement national ne l’a fait, l’opinion publique dans ses différents compartiments. Des religieux en perte de vitesse, aux politiciens en déclin, en passant par tous ses chômeurs désœuvrés en quête d’emploi, tous ont surfé sur la vague, mus davantage par des intérêts personnels que par dévotion.

Dernier palier, l’appel de quelques Ulémas de service qui en appellent aujourd’hui à la révision de la Constitution, en instituant celle d’un Etat théocratique qui renverrait au placard, toutes les conventions internationales signée par la Mauritanie et la remplacer par la Chari’a.

Un mot de trop du Président Mohamed Ould Abdel Aziz, qui dans l’euphorie d’un plébiscite inespéré avait lâché le mot : "nous allons appliquer la Chari’a ", en a été le déclencheur. Comme si Birame est devenu subitement l’inspirateur de toutes les consciences islamiques, anesthésiées jusque-là par des décennies de parricides, de génocides, de viols collectifs, d’arnaques au sommet de l’Etat, de putschs sanglants, d’incestes…

Dans cette montée du fanatisme religieux, l’Imam de la mosquée Chorva, est allé jusqu’à traiter Birame et ses compagnons de "Satans et de criminels ", allant brusquement de la brûlure de quelques livres d’exégèses dont la sacralité est remise en cause par quelques érudits, au Coran qui n’a rien à avoir avec l’autodafé. L’intention au meurtre est devenue ainsi flagrante au sein du clergé local.

L’Imam de la mosquée Saoudienne, Ahmedou Ould Lemrabott, connu pour ses extravagances extra-religieuses, (il ne cesse de jeter l’anathème sur l’opposition) il a décidé d’exclure Birame et ses compagnons du rang des "musulmans " comme s’il détenait en main la clé des destinées humaines ou s’il possédait la Vérité Absolue de la Miséricorde divine. Ould Habibourrahmane a demandé ainsi solennellement au cours de son sermon du vendredi, à ce que la Chari’a islamique remplace la Constitution mauritanienne, trouvant que l’Etat Taliban est meilleur que la République.

Dans un communiqué diffusé par "SOS Esclaves", la crainte que l’affaire de Birame n’occulte le problème de l’esclavage, a été clairement exprimé. Le communiqué déclare en effet que "l’esclavage et les séquelles de l’esclavage sont des réalités incontestables " et qu’exagérer ces faits ou les minimiser est aussi nuisible à la noble cause de lutte menée par les organisations des droits de l’homme pour que la justice et l’égalité entre les citoyens mauritaniens deviennent enfin une réalité.

Tout en regrettant l’autodafé de Riadh, "SOS Esclaves " considère cependant que "la récupération de l’évènement et son usage à des fins politiques est tout aussi détestable ". Un éminent érudit et théologien Cheikh Ahmed El Hady, dans une Fatwa publiée à l’occasion, n’a-t-il pas désacralisé les livres que Birame avait brûlés ? Il s’agit selon lui de livres écrits à une époque éloignée et abandonnés, y compris par les peuples pour lesquels ils avaient été écrits. Selon lui, Birame ne devait pas être arrêté pour cela.

Il oublie que la politique a ses raisons que la raison ne connaît pas. Du moment, où le pouvoir y trouve matière à affaiblir son opposition, Birame et son geste malheureux constituent d’excellents boucs émissaires que la raison d’Etat n’hésitera pas à sacrifier sur l’autel de ses intérêts

Cheikh Aïdara.



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