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jeudi 10 mai 2012

Esclavage: "Conclusions bizarres" dans la jurisprudence malékite (El-Shinqiti)


ALAKHBAR (Nouakchott) – Les exégètes de la jurisprudence malékite « ont échoué de se hisser aux valeureux principes que prône l’Islam » à en croire « les conclusions parfois bizarres » qu’ils avancent, écrit l’islamologue mauritanien Dr. Mohamed El-Moctar El-Shinqiti dans un article publié (en arabe) sur Alakhbar.

« Nous en citons deux exemples dans les recueils malékites. Le premier c’est le fait d’accorder peut d’importance au droit -garanti par la Charia- de l’esclave de s’affranchir de son maitre contre le payement d’une somme donnée (Moukataba). Le deuxième s’agit du refus d’égalité dans le droit à la vie entre l’esclave et le musulman libre », indique El-Shinqiti, un des théoriciens de la mouvance islamique un Mauritanie, actuellement coordonnateur de la recherche à la Faculté des études islamiques du Qatar.

Se référant à des ouvrages malékits, l’islamologue mauritanien, révèle parmi ces conclusions: «On ne tue pas un musulman libre qui tue un esclave » (Taj Wal Iklil Li Mukhtasar Khalil, tome 4 p 602)». «Si un musulman libre tue un esclave, il ne devra pas être puni pour son acte » (El Kharchi, Sharh Mukhtasar Khalil, tome 8 p 3). «Aucune sanction n’est prévue contre le maître qui commet un meurtre involontaire sur son esclave. (…) C’est facultatif de demander à l’assassin d’un esclave d’affranchir un autre comme sanction » (Ibn Rouchd, Bayane Wa Tahsil, tome 13 p 65)». «Si un esclave tu un musulman libre, ou se passe le contraire, l’esclave est par unanimité condamné à mort, mais l’homme libre doit seulement payer la moitié de la valeur de sa victime ». (Al-Kourafi, Zhakhira, tome 12 p 274). « Il n’y pas d’amande sur un qui tu un esclave ou un mécréant » (Ibn Juzei, Al Jawahir Al-Fighhiya, p 227).

«La politisation de l’incinération de livres Malékite et la conclusion précipitée cache l’enjeu que cette affaire porte sur l’avenir du pays et sur la cohésion sociale. Une réflexion approfondie dans l’affaire, nous définit les contours de la Charia de ceux de la jurisprudence islamique (loi islamique). La Charia émane de la révélation divine ; elle est juste, remplie de sagesse et elle défend l’intérêt général. La jurisprudence héritée quant à elle de la réflexion humaine et non de la révélation, peut, parfois, se monter injuste, dénudée sagesse. Cette jurisprudence résulte d’une fusion entre la compréhension des textes de la Charia et la tradition d’une époque préislamique », ajoute-t-il dans son article intitulé "L’histoire de l’esclavage dans les recueils Malékites".

«Il y a lieu de rappeler, avant le premier exemple, que c’est un captif pendant le jihad (guerre sainte) qui peut devenir esclave. Mais si nous nous référons au verset 4 de la Sourate Mohamed, l’armée musulmane n’avait initialement que deux choix face à ces prisonniers de guerre : soit les relâcher sans contrepartie, soit les libérer après payement de rançon. Pourquoi alors l’esclavage ? Rachid Rida, savant musulman, évoque la réciprocité qu’il justifie par le fait que des prisonniers musulmans étaient asservis. Et puis, dans le verset cité, elle n’est pas explicitement interdit aux musulmans d’asservir leur captifs. La raison en est que l’Islam apportait une réponse à la problématique de l’époque des impérialismes. Des milliers de femmes et d’enfants étaient sommairement exécutés, ravagés par la faim ou asservis. Il a opté pour le troisième choix afin d’intégrer ces femmes et enfants dans la société islamique leur donnant une nouvelle chance à la vie», indique-t-il.

« Cependant, cet état de servitude était temporaire, c'est-à-dire que l’esclavage a ensuite toutes les possibilités de décider son propre sort. Il s’affranchit. Il a le droit de s’auto-affranchir contre une somme qu’il donne à son maître. Même en cas d’indigence, il retrouve sa liberté et cette somme restera une dette sur lui. Et pour s’acquitter, il doit bénéficier du soutien des autorités et de la société. A ce propos, Oumar sanctionnait tout maître qui refusait de respecter ce droit de l’esclave. Malheureusement les recueils de la jurisprudence ont presque occulté ce volet de la Charia », déplore El-Shinqiti.

« La Charia, affirme-t-il, garantie l’égalité dans le droit à la vie entre l’esclave et le musulman libre. Pour preuve, référons-nous au verset 45 de la Sourate 5 où la Charia applique la loi du talion, sans distinction, sur le maître, l’esclave, le croyant et le mécréant. Mais selon les recueils de la jurisprudence malékite, l’esclave ne jouit pas de ce même droit à la vie que le musulman libre. Dans ces livres, on n’impose aucune sanction, ici-bas, contre le musulman qui commet un meurtre, même volontaire, contre son esclave », ce qui n’a rien à voir avec l’esprit de l’Islam.

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