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mardi 16 avril 2013

SAHEL LES FRANÇAIS ONT GAGNE UNE VICTOIRE, PAS LA GUERRE



« S’il n’y a pas d’intervention au Nord Mali, c’est le désastre ». Ainsi se terminait, le 10 janvier 2013, à la veille de l’initiative militaire française, le télégramme diplomatique de l’ambassadeur de France au Mali, Christian Rouyer. Trois mois plus tard et cinq cent « terroristes » abattus, la France peut se féliciter d’avoir mené une « blitzkrieg », une guerre éclair,  aussi efficace que peu meurtrière (cinq morts du coté français). Au point de rapatrier déja, la semaine passée,  cent vingt des quatre mille soldats de la force d’intervention.
Le péril djihadiste est-il, pour autant, éradiqué au Sahel? La bataille gagnée par la France est-elle plus qu’un mirage? Rien n’est moins sur. «  A peine les militaires français seront partis, les extrémistes vont revenir. Et les trafics, notamment celui de la drogue, vont reprendre,  en rendant totalement aléatoire tout espoir de stabilité dans cette zone », constate le mauritanien Ahmedou Ould Abdallah, représentant de l’ONU en Afrique de l’Ouest, puis en Somalie, entre 2002 et 2010.
Intraitable, François Hollande estime que les élections au Mali doivent se tenir impérativement en juillet prochain pour redonner « une légitimité démocratique » à l’ Etat malien, largement discrédité depuis le coup d’Etat du capitaine Sanogo. Ces louables intentions du président français se heurtent à l’impréparation des autorités maliennes. Ainsi l’appel d’offre lancé pour la fabrication de 6, 4 millions de cartes d’électeurs n’a toujours pas été attribué. Encore faudra-t-il, demain, distribuer ces papiers dans 25000 bureaux de vote, sans compter les 400000 réfugiés qui ont fui le pays. « Mieux vaut attendre que de procéder à des élections qui seraient contestables  », tranche un diplomate français.
L’ancien ministre malien des finances, Saumaila Cissé, candidat déclaré aux prochaines présidentielles, est plus que réservé sur l’échéance de juillet   « Les touaregs du MNLA sont toujours armés, regrette-t-il, et l’armée malienne ne pénètre toujours pas dans certaines villes du Nord Mali». Reçu à l’Elysée, cette personnalité n’a guère été entendue.
Il y a plus grave. La fixation de occidentaux, ces derniers mois, sur les exactions d’Aqmi a masqué  les dérives qui, depuis longtemps,  nourrissent tous les extrémismes dans le Sahel: une corruption endémique, des trafics innombrables, dont en premier lieu la cocaïne venue d’Amérique du Sud; les tentations séparatistes et les fractures ethniques; une façade démocratique et des élites décapitées. « Le bilan au Mali de ces dernières années est catastrophique, explique un diplomate français : pillage généralisé, laxisme, impunité ». Contrairement à son voisin malien, la Mauritanie passe aux yeux des Français pour un allié sur et un rempart contre l’intégrisme -un air connu, trop connu. Or aujourd’hui, ce pays connus  par les seuls amoureux de trekking dans le désert, reproduit les mêmes dérives que son voisin malien, notamment en termes de prédation des ressources (voir l’encadré, « Main basse sur Nouakchott »).   
Sur le plan religieux, les Frères Musulmans, financés par le Golfe, étendent leur influence en Mauritanie comme dans toute la région. « Nous avons perdu la tolérance des nomades que nous étions, explique un ancien ministre mauritanien des Affaires Etrangères, Désormais, des mosquée ont été édifiées tous les 500 mètres, les Frères musulmans investissent le champ humanitaire. Même la police et l’armée sont infiltrées ». Cet hiver, la plupart des Imams mauritaniens, même contrôlés par le pouvoir, prirent vigoureusement position contre l’initiative française. Au point que le président Aziz, qui depuis le printemps arabe craint l’embrasement populaire, s’est bien gardé d’envoyer le moindre contingent aider son allié traditionnel.
Le rempart contre l’extrémisme est un peu fissuré !

Nicolas Beau

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