Respectez la misère, elle respectera
l’opulence. Ceci a toujours été le mot d’ordre pour les misérables ouvriers. La
preuve que la bourgeoisie a partout un lugubre visage. Son seul souci est de se
nourrir du sang des prolétaires. En Mauritanie, c’est toute une nation qui
profite de la misère des dockers. Ceux-là qui autrefois étaient retenus dans un
cruel esclavage, subissent aujourd’hui une autre forme d’asservissement.
Pauvres et humiliés, les dockers ne bénéficient d’aucune considération. Ils
habitent dans des Kebbas et gagnent moins de 20.000um par mois. Et pourtant à
Nouakchott, pour que le citoyen mange à sa faim, il faut que le cou du Docker
porte le sac de riz et s'il meurt, il faut que le docker creuse sa tombe. Mais
ce même Docker n'a aucune dignité.
Imaginez un instant qu’un container de marchandises démarque sur le port de Nouakchott. C’est d’une main levée que Mohamed Ould Cheikhna va héler les Dockers afin qu’ils vident comme des automates des sacs de riz et de sucre, du lait, des boissons, des caisses de thé, des habits, du ciment, ect... Une fois déchargés, ces vivres seront acheminés en ville, où d’autres les distribuent dans des magasins de Nouakchott ou à l’intérieur du pays. Et tout cela sous le regard esclavagiste des riches commerçants.
Si aujourd’hui, le docker se révolte, il a pleinement le droit de le faire puisqu’on lui refuse la dignité, la santé et la sécurité médicale. On lui refuse trois Ouiguiyas pour chaque tonnage. Seulement ! On le réprime et on l’emprisonne lâchement.
Depuis quelques semaines, les Dockers travaillant au Port d’Amitié de Nouakchott revendiquent quelques droits notamment :
1- le renvoi de Mohamed Ould Cheikhna de
la direction du Bureau de l'emploi (BEMOP) et l'implication des travailleurs
dans la gestion de ce bureau, pour que ce dernier soit au service des dockers
et pas l'inverse;
2- l'augmentation du prix du tonnage
pour le faire passer d'une ouguiya par kilogramme à au moins trois;
3- l'ouverture et l'équipement d'une
infirmerie pour les travailleurs au port, et sa dotation avec une ambulance.
Mais au lieu de satisfaire les
principaux moteurs de la vitalité de ce pays, l’Etat a voulu se ranger du coté
des « féodaux esclavagistes » comme l’a souligné un mouvement
abolitionniste, en envoyant des bataillons de forces de l’ordre pour les
réprimander sauvagement. C’est un acte ignoble et irresponsable.
Dans ce pays, tout le monde réclame
quelque chose, mais les revendications des dockers doivent ajourner
celles des autres. Au lieu de se solidariser avec un Président accusé
d’appartenir un groupe narcotrafiquant et de blanchiment d’argent, le bon sens
oblige à soutenir ceux qui prêtent leur cou à vie, pour que nous ne
manquions jamais de riz ni de pain. Avant de crier aux élections libres et
transparentes, il convient de contribuer à l’amélioration des droits
d’existence des dockers. Disons stop à leur exploitation sauvage. Désormais,
que la protection du cou du Docker devienne une cause nationale.
A tous ceux qui ignorent cette cause
jusqu’ici, à commencer par Président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz,
les hommes d’affaires, les commerçants, les notables de grande famille, les
Généraux, les ministres, les députés de la majorité, les militants des droits
humains, les Oulémas et la Diaspora ... Dites-vous que, même au fond de
vos villages, le riz ou le sucre que consomment les vôtres n'ont été
possibles qu'après le châtiment du docker Hartani. Alors afficher
l'indifférence vis-à-vis de leurs revendications est aussi une attitude
hypocrite.
Imaginez un instant votre femme au
marché de Socim. Elle doit acheter la ration alimentaire pour la famille. Elle
passe chez le grand commerçant, elle se procure un sac de riz, un autre de
sucre, un autre de pommes de terre, un sac d’oignons, un jerricane d’huile et
autres petites choses. Mais pour que tout arrive à la maison, il faut
nécessairement une main forte. C’est alors qu’intervient le terrible travail du
Docker. Il doit porter sur son cou le bonheur de votre famille. A cet homme
misérable, considéré comme « sale », votre femme tendra sa pauvre
rémunération du bout des doits, le visage tourné. Et si le citoyen ordinaire
agit de la sorte, que dire des ordres donnés par les esclavagistes dans le port
ou les grands commerçants de la rue Rizg près du Marché Capital?
Il faut soutenir dignement le docker si
l’on veut se lever et se coucher tranquillement !
Par Bâ Sileye, sociologue et Journaliste
mauritanien
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