Je félicite Mamadou Kalidou BA, enseignant chercheur à l’Université de Nouakchott, pour l'effort qu'il a fait d'étudier les menaces auxquelles notre pays peut faire face. Cette étude a été publiée sur le site www.Flamnet.info. Ce genre d'article ou d'étude peut servir un pouvoir responsable, soucieux de mettre en place une réponse adéquate à ces menaces à travers une politique de défense cohérente et efficiente. Il participe aussi au débat et l'enrichit dans un domaine, la sécurité, que nos intellectuels désertent malheureusement.
Je n’ai pas la même lecture que l’auteur de l’article de certains évènements, particulièrement de ceux de 1989 ; je n’ai pas non plus la même appréciation des sanctions infligées aux putschistes de 1987 ; enfin je n’ai pas la même perception quant au poids démographique de chacune de nos composantes ni de leurs alliances réelles ou rêvées. Ceci dit, il y a au moins deux menaces qu'il a oubliées de mentionner et qui sont réelles. Je vais commencer par ces dernières:
1) le conflit du Sahara occidentale est en veilleuse certes mais toujours là et peut s'animer à chaque instant. Ses protagonistes sont autrement plus puissants que les rebelles touaregs et l'animosité ou même la haine que se vouent les belligérants de ce conflit est historique (Maroc d'un côté, Algérie et Polisario de l'autre). J’ajoute que deux de nos richesses que nous exploitons maintenant et qui rapportent pour le pays des revenus substantiels sont à un jet de pierre de notre frontière avec ce territoire disputé. Il s’agit du fer de Zouérate et des installations portuaires de Nouadhibou.
2) une catastrophe naturelle à laquelle la Mauritanie n'est pas préparée. Comme par exemple une marée noire sur nos côtes ou un gigantesque incendie d'une usine chimique ou d'un dépôt de matières inflammables, etc. Aucune préparation de la population, très peu de moyens et pas de réflexion sur le sujet. Je ne suis pas sûr que la Mauritanie soit plus outillée aujourd’hui qu’en 2007 au moment de l’inondation de Tintane ou l’explosion d’un stock de gaz au Ksar dernièrement.
La menace la plus actuelle est celle que représente Al Qaïda. C’est une chance qu’elle soit une menace globale, c'est-à-dire qu’elle vise toute la sous-région et même le monde entier. La Mauritanie n’est pas la seule à la combattre. Cette menace se présente sous deux formes. La première forme est représentée par des Katibas agissants à partir d’un territoire connu, se déplaçant avec des moyens de transport ordinaires identifiés et dotés d’un armement renforcé. Le nombre des combattants de ses Katibas est évalué à quelques centaines et la base de leur recrutement est réduite et le recrutement lui-même problématique. Pour cette aile d’Al Qaïda, la politique de défense suivie par la Mauritanie est appropriée et efficace. La stratégie appliquée qui vise à prévenir les incursions, à tisser des rapports de bon voisinage, à former des coalitions avec les pays du front, à éloigner l’ennemi des frontières nous protège jusqu’à présent assez efficacement. Les derniers développements au nord Mali ne sont pas, à moyen terme, dans l’intérêt d’Al Qaïda. Le MNLA devient un ennemi de plus à ces terroristes.
La deuxième forme d’Al Qaïda est la plus pernicieuse, la plus secrète, la plus difficile à combattre surtout. Ce sont les cellules internes. Depuis 2007 elles ne cessent de se manifester soit par des opérations, soit par des attentats. Même si les forces de sécurité ont déjoué certains de leurs attentats et fait échouer d’autres actions, la Mauritanie reste exposée et leur menace n’a pas disparu. La lutte contre ces cellules s’inscrit dans le long terme et les victoires ne sont jamais définitives.
Une menace identifiée par Monsieur Ba et qu’il a appelée « la cohabitation raciale et ethnique » est moins prégnante qu’avant. C’est une menace qui est née avec le pays. Elle est récurrente. Et les revendications qui la portent évoluent et changent selon les acteurs et les circonstances. Les premiers hommes politiques de la Vallée ne cherchaient que l’égalité des droits ; ceux de 66 rejetaient le bilinguisme et niaient qu’il y’eût une majorité maure ; les mouvements actuelles cherchent le partage du pouvoir. Difficile de croire que le pays est au bord d’une guerre civile comme en 1989.
Le retour de la majorité des réfugiés, les prémisses d’une solution pour le passif humanitaire, le choix dernièrement de l’un des mouvements les plus irréductibles de la cause noire en Mauritanie de s’investir dans le combat politique local sont autant de signaux d’une évolution vers un climat apaisé. Le recul du gouvernement sur une grande partie des critères posés pour l’enrôlement et qui paraissaient injustes pour une partie des citoyens est la preuve que le combat politique non violent peut donner de bons résultats. Il faut maintenant chercher à renforcer cette tendance en créant le climat politique nécessaire pour la mise en place d’un dialogue franc en vue de s’accorder sur un Pacte National qui deviendra la base d’une cohabitation future. Dans tous les cas, il faut que tous en Mauritanie sachent que l’infériorité numérique ne doit pas signifier l’inégalité des droits.
Deux petites choses relevées dans l’article de Monsieur Mamadou Kalidou BA. La première concerne son analyse des causes de la situation au Mali. La chute du régime de Mouammar El Kadhafi n’a pas été « l’une des causes « lointaines » de la situation au Mali » mais bien la cause immédiate de cette situation ! Quand les soldats touaregs de l’armée libyenne ont vu que leur parrain tombait, ils décidèrent de se replier vers les pays voisins. L’Algérie et le Niger n’ayant pas accepté que les « fuyards » restassent sur leurs territoires, ils se rabattirent sur le nord Mali croyant que la zone était à prendre. Ils n’ont réussi jusqu’à présent qu’à donner des idées aux véritables maîtres des lieux (Al Qaïda et ses excroissances que sont MUJAO et Ansar Dine) qui hésitaient à franchir le pas vers une sécession.
Enfin, je me permets de rappeler à l’auteur de l’article que l’exécution des principaux auteurs de la tentative de putsch de 1987 n’est pas « la seule fois où des Mauritaniens sont tués pour une tentative de coup d’Etat, sans doute parce qu’ils étaient noirs ». En 1981, les principaux auteurs de la tentative de prise de pouvoir des Colonels Ahmed Salem et Kader le 16 Mars, s’est terminée par leur exécution en compagnie de Niang. Et seul Niang était noir !
Je n’ai pas la même lecture que l’auteur de l’article de certains évènements, particulièrement de ceux de 1989 ; je n’ai pas non plus la même appréciation des sanctions infligées aux putschistes de 1987 ; enfin je n’ai pas la même perception quant au poids démographique de chacune de nos composantes ni de leurs alliances réelles ou rêvées. Ceci dit, il y a au moins deux menaces qu'il a oubliées de mentionner et qui sont réelles. Je vais commencer par ces dernières:
1) le conflit du Sahara occidentale est en veilleuse certes mais toujours là et peut s'animer à chaque instant. Ses protagonistes sont autrement plus puissants que les rebelles touaregs et l'animosité ou même la haine que se vouent les belligérants de ce conflit est historique (Maroc d'un côté, Algérie et Polisario de l'autre). J’ajoute que deux de nos richesses que nous exploitons maintenant et qui rapportent pour le pays des revenus substantiels sont à un jet de pierre de notre frontière avec ce territoire disputé. Il s’agit du fer de Zouérate et des installations portuaires de Nouadhibou.
2) une catastrophe naturelle à laquelle la Mauritanie n'est pas préparée. Comme par exemple une marée noire sur nos côtes ou un gigantesque incendie d'une usine chimique ou d'un dépôt de matières inflammables, etc. Aucune préparation de la population, très peu de moyens et pas de réflexion sur le sujet. Je ne suis pas sûr que la Mauritanie soit plus outillée aujourd’hui qu’en 2007 au moment de l’inondation de Tintane ou l’explosion d’un stock de gaz au Ksar dernièrement.
La menace la plus actuelle est celle que représente Al Qaïda. C’est une chance qu’elle soit une menace globale, c'est-à-dire qu’elle vise toute la sous-région et même le monde entier. La Mauritanie n’est pas la seule à la combattre. Cette menace se présente sous deux formes. La première forme est représentée par des Katibas agissants à partir d’un territoire connu, se déplaçant avec des moyens de transport ordinaires identifiés et dotés d’un armement renforcé. Le nombre des combattants de ses Katibas est évalué à quelques centaines et la base de leur recrutement est réduite et le recrutement lui-même problématique. Pour cette aile d’Al Qaïda, la politique de défense suivie par la Mauritanie est appropriée et efficace. La stratégie appliquée qui vise à prévenir les incursions, à tisser des rapports de bon voisinage, à former des coalitions avec les pays du front, à éloigner l’ennemi des frontières nous protège jusqu’à présent assez efficacement. Les derniers développements au nord Mali ne sont pas, à moyen terme, dans l’intérêt d’Al Qaïda. Le MNLA devient un ennemi de plus à ces terroristes.
La deuxième forme d’Al Qaïda est la plus pernicieuse, la plus secrète, la plus difficile à combattre surtout. Ce sont les cellules internes. Depuis 2007 elles ne cessent de se manifester soit par des opérations, soit par des attentats. Même si les forces de sécurité ont déjoué certains de leurs attentats et fait échouer d’autres actions, la Mauritanie reste exposée et leur menace n’a pas disparu. La lutte contre ces cellules s’inscrit dans le long terme et les victoires ne sont jamais définitives.
Une menace identifiée par Monsieur Ba et qu’il a appelée « la cohabitation raciale et ethnique » est moins prégnante qu’avant. C’est une menace qui est née avec le pays. Elle est récurrente. Et les revendications qui la portent évoluent et changent selon les acteurs et les circonstances. Les premiers hommes politiques de la Vallée ne cherchaient que l’égalité des droits ; ceux de 66 rejetaient le bilinguisme et niaient qu’il y’eût une majorité maure ; les mouvements actuelles cherchent le partage du pouvoir. Difficile de croire que le pays est au bord d’une guerre civile comme en 1989.
Le retour de la majorité des réfugiés, les prémisses d’une solution pour le passif humanitaire, le choix dernièrement de l’un des mouvements les plus irréductibles de la cause noire en Mauritanie de s’investir dans le combat politique local sont autant de signaux d’une évolution vers un climat apaisé. Le recul du gouvernement sur une grande partie des critères posés pour l’enrôlement et qui paraissaient injustes pour une partie des citoyens est la preuve que le combat politique non violent peut donner de bons résultats. Il faut maintenant chercher à renforcer cette tendance en créant le climat politique nécessaire pour la mise en place d’un dialogue franc en vue de s’accorder sur un Pacte National qui deviendra la base d’une cohabitation future. Dans tous les cas, il faut que tous en Mauritanie sachent que l’infériorité numérique ne doit pas signifier l’inégalité des droits.
Deux petites choses relevées dans l’article de Monsieur Mamadou Kalidou BA. La première concerne son analyse des causes de la situation au Mali. La chute du régime de Mouammar El Kadhafi n’a pas été « l’une des causes « lointaines » de la situation au Mali » mais bien la cause immédiate de cette situation ! Quand les soldats touaregs de l’armée libyenne ont vu que leur parrain tombait, ils décidèrent de se replier vers les pays voisins. L’Algérie et le Niger n’ayant pas accepté que les « fuyards » restassent sur leurs territoires, ils se rabattirent sur le nord Mali croyant que la zone était à prendre. Ils n’ont réussi jusqu’à présent qu’à donner des idées aux véritables maîtres des lieux (Al Qaïda et ses excroissances que sont MUJAO et Ansar Dine) qui hésitaient à franchir le pas vers une sécession.
Enfin, je me permets de rappeler à l’auteur de l’article que l’exécution des principaux auteurs de la tentative de putsch de 1987 n’est pas « la seule fois où des Mauritaniens sont tués pour une tentative de coup d’Etat, sans doute parce qu’ils étaient noirs ». En 1981, les principaux auteurs de la tentative de prise de pouvoir des Colonels Ahmed Salem et Kader le 16 Mars, s’est terminée par leur exécution en compagnie de Niang. Et seul Niang était noir !
Ahmed Jiddou Aly
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