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samedi 24 mars 2012

Mauritanie : la réconciliation nationale mine le régime de Ould Aziz

 
Le président mauritanien va accueillir le 25 mars prochain à Rosso dans le sud du pays, le dernier contingent des réfugiés du Sénégal. Dans la capitale du Trarza, Ould Aziz va ainsi officialiser la fin de l’accord tripartite entre la Mauritanie, le Sénégal et le HCR( Haut Commissariat des Réfugiés) sur le rapatriement des réfugiés pour le 31 mars prochain. Un déplacement du chef de l’Etat qui coïncide avec le 3ème anniversaire de la journée de la réconciliation nationale décrétée par le gouvernement de Ould Laghdaf en 2009. Les observateurs s’interrogent à nouveau sur la sincérité politique du locataire de la Maison brune et craignent que cet évènement soit interprété comme une manœuvre populiste eu égard au déficit de volonté  politique manifeste pour régler le passif humanitaire.

C’est la pirouette interminable depuis juillet 2009. Le président mauritanien saisit chaque occasion pour jouer la carte de la réconciliation nationale. Le 25 mars prochain il va personnellement accueillir  dans la capitale du Trarza vraisemblablement le dernier contingent de réfugiés du Sénégal officialisant ainsi la fin du processus du rapatriement des mauritaniens qui ont été déportés depuis les évènements de 89. Cette action  qui s’achève le 31 mars prochain s’inscrit dans le cadre de l’accord tripartite entre la Mauritanie, le Sénégal et le HCR. Cette visite de l’homme fort mauritanien coïncide avec la journée de la réconciliation nationale décrétée par le gouvernement de Ould Laghdaf en 2009 suite au mea culpa du nouveau locataire de la Maison brune qui avait organisé une prière aux morts à Kaédi au Sud-Est du pays pour demander pardon aux 80 000 déportés et à toute la communauté noire pour tous les crimes commis par Ould Taya. Mais depuis c’est le grand écart  entre d’abord  les autorités de Nouackchott qui veulent clore assez rapidement ce dossier de réfugiés alors qu’il y en des milliers au Mali et ensuite la volonté politique du règlement du passif humanitaire toujours à la case de départ. Entre cette communauté qui attend depuis longtemps des mesures concrètes et le chef de l’Etat qui gesticule quand le besoin se fait sentir, le divorce est consommé. La confiance n’est plus de mise. Un constat partagé par le nouveau président de la Coordination des Victimes de la Répression ( COVIRE) Kane Al Housseynou  qui demande le remplacement du chef d’Etat-major particulier du chef de l’Etat chargé du dossier du passif humanitaire le Colonel Dia  qualifié de trop éloigné des réalités du terrain et des aspirations des citoyens déportés. Aujourd’hui plus de 20 000 réfugiés officiellement sont rentrés et répartis dans leur région d’origine. A ce jour pas de toits décents  ni de scolarisation normale pour les enfants ni d’indemnisations conséquentes pour les agriculteurs et éleveurs, pour les veufs et orphelins, pour les fonctionnaires et agents victimes des évènements de 89à 92 et les victimes civiles de 86. Les dossiers dorment tranquillement dans les tiroirs de la fonction publique depuis 2010. L’insuffisance des indemnisations, le manque de courage politique et de débat national dévoile la véritable nature du régime de Ould Aziz. Celle d’un régime proche de l’ancien président Ould Taya. En effet, si l’objectif de la journée du 25 mars est de tourner cette page sombre de l’histoire du pays il conviendrait avant tout de mettre en place une commission «  Vérité et  Réconciliation » pour clarifier les faits et garantir ainsi la paix et la justice. La réconciliation nationale ne se limite pas à la question financière seulement. Elle va au de-là  de la réparation des préjudices subis par les victimes. Le devoir de mémoire pour les futures générations  est un impératif. La société mauritanienne ne doit cependant pas revenir aux injustices du passé dans un esprit de vengeance par crainte du chaos du pays mais  dans un esprit de stabilité politique qui passe par l’application de la justice  contre l’esclavage aussi en Mauritanie condition sine qua non de la cohésion sociale et de l’unité nationale. Tous les droits des mauritaniens ne doivent en aucun cas être malmenés. La réforme constitutionnelle de criminaliser l’esclavage va dans ce sens.  Mais malheureusement comme le règlement du passif humanitaire tant que les lois ne sont pas appliquées  par ceux-là même qui l’ont édictées, l’abolition de l’esclavage est vouée à l’échec. Le dernier congrés des militants anti-esclavagistes  a montré que l’IRA continuera de poursuivre « la dénonciation, notamment devant les partenaires extérieurs de la Mauritanie, de la connivence du gouvernement de Ould Laghdaf avec les auteurs de pratiques esclavagistes, toujours couverts d’impunité par une administration, des magistrats et des forces de sécurité socialement connivents car liés par le passé et le legs de l’infamie ». C’est clair au plan national le numéro un mauritanien est confronté à deux fronts qui ne comptent pas en rester là. Devant cette situation il lui paraît difficile de réconcilier tous les mauritaniens parce que l’épreuve des faits commence déjà à le miner. Au milieu du gué il faudra qu’il apporte d’ici 2014 une meilleure réponse à la question nationale.
Source: Yaya Kane 

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