C’est noblement sordide mais tout le monde trouve
cela normal et parfaitement juste selon la tradition soninkée et les autorités
civiles et militaires locales. Au Guidimakha un conflit foncier éclate entre maîtres
et anciens esclaves comme on en voit de plus en plus depuis apparemment cette
ère de liberté d’expression qui permet au citoyen lambda d’entendre parler de
tous les petits crimes commis ici et là. Souvent, grâce à l’Ira on entend que
telle famille maure veut prendre les terres de h’ratines mais croyant connaître
l’IRA, on se dit qu’ils exagèrent peut-être un peu. On finit par ne plus savoir
si l’IRA a définitivement tort ou raison ou si le pouvoir joue toujours ou non
le jeu de l’injustice.
Pour ma part, je restais perplexe comme certainement
beaucoup de lecteurs mais là ce qu’on apprend dans les détails avec les
arguments des maîtres est stupéfiant. Déjà, depuis l’article d’Amel Daddah paru
à l’époque dans le monde diplomatique (docteur en sociologie) le citoyen lambda
a su que chez les soninkés on pratique une forme de discrimination singulière
chez les musulmans car elle va au-delà de la mort. Ainsi, les esclaves et les
maîtres ne sont pas enterrés dans le même cimetière. Quand cette affaire fit grand
bruit, tous les intellectuels soninkés ayant quelques séquelles de noblesse
accusèrent Amel Daddah d’amalgame et d’approximations douteuses. Je connais
personnellement des journalistes soninkés qui passent leur temps à défendre
l’IRA et qui nient cette vérité. Personne ne veut balayer devant sa porte.
Toujours est-il que le cas d’espèce est assez
hallucinant. Le litige éclate entre les maîtres et les anciens esclaves, notez
qu’on ne dit jamais anciens maîtres mais toujours anciens esclaves. Finalement
l’état mauritanien donne raison aux anciens maîtres car la terre
n’appartiendrait pas aux anciens esclaves qui en avaient juste l’usufruit grâce
à la charité des maîtres qui avaient permis à la mère de cultiver la terre
depuis 1969 car sa mère était une esclave de ladite famille. Ainsi quand la
mère est décédée, les petits-enfants de l’esclave ont voulu garder la terre
pour continuer à en vivre. Là la noble famille rappelle qu’il ne s’agissait pas
d’un don à la fille de l’esclave mais d’un prêt. Les descendants d'esclaves en
appellent à la justice et là nous apprend al-Akhbar, les autorités locales
civiles et militaires donnent raison à la noblesse.
On a l’impression quand on entend ça qu’on a affaire
à des gens qui ont prêté leur terre à d’autres gens qui veulent la leur voler
après cette gentillesse. Dieu ! Oublie –t-on qu’il s’agit
d’esclaves ! Comment peut-on reconnaître que telles personnes ont été
réduites par la famille à l’esclavage pendant mille ans et ne pas même leur
laisser en guise de dédommagement une parcelle de terre qu’ils cultivent ?
Pire ! L’état mauritanien estime que les maîtres ont raison. N’est-ce pas
de la barbarie pure et simple ?
Est-ce noble de priver des descendants d’esclaves de
la terre qu’ils cultivent pour la rendre à ceux qui les ont réduits en
esclavage ? Le noble montre là son vrai visage. Les castés complexés font
tout pour avoir l’air noble mais qu’ils réfléchissent un instant : la
noblesse ce n’est rien que la loi de la force, l’arbitraire, l’exploitation et
la tyrannie. C’est tout. Les descendants de nobles qui se gargarisent de leur
condition sont plus méprisables que leurs ancêtres car ceux-là avaient l’excuse
de temps anciens. Que le noble sache que s’il se sent plus fin plus éduqué
ayant plus de manières que ces pauvres esclaves et descendants d’esclaves, il
devrait en avoir honte car ce n’est en rien un héritage sanguin, il n’est
marqué nulle part que tel gêne te rendra bien éduqué, ayant patrimoine et
droits d’humiliation sur tes semblables, la morgue des nobles n’est rien que le
menton haut de l’impunité et l’état des pauvres descendants d’esclaves n’est
que la marque du crime qui rend noble.
C’est écœurant cette impunité.
« Litige foncier au Guidimakha: les autorités
locales donnent raison aux maîtres sur leurs anciens esclaves
ALAKHBAR (Nouakchott) – Les autorités
administratives et militaires ainsi que des dignitaires de Sélibabi au
Guidimakha (Sud Mauritanie) auraient tranché en faveur de la famille Sidi
Rekhiyé Camara dans le litige foncier qui l’opposait à ses anciens esclaves, a
appris Alakhbar de sources locales.
Le litige porte sur un champ dans le village de
Tachott situé à 35 km au nord de Selibabi, capitale du Guidimakha.
Yelly Bakary, membre de la famille Camara, a affirmé
à Alakhbar que son grand-père, Sidi Rekhiyé Camara, avait simplement autorisé
l’exploitation du champ, depuis 1988, à Rékhyé Sidibé, parce que la mère de
celle-ci était une esclave de la famille.
Mais après le décès de Rékhyé Sidibé, ses enfants
voulaient hériter le champs; la famille s’en est opposées et a finalement
décidé de le récupérer, a-t-il poursuivi.
Quant aux enfants de Rékhyé Sidibé, ils ont accusé
Sidy Rékhyé Camara d’avoir arraché le champ à ses héritiers légitimes.
Ils crient également à l’esclavagisme et rappellent que la terre
appartient à leur mère qui la mettait en valeur depuis 1969.
Dans la tradition de la communauté soninké, on peut
confier l’exploitation d’un champ à sa belle-fille ou à ses anciens esclaves,
mais cela n’annule pas le droit de la famille propriétaire, a expliqué la
source locale.
Elle a ajouté que l’exploitation du champ en
question était autorisée à une belle-fille des Camara. Mais après son départ en
Centre Afrique, le périmètre a été confié aux anciens esclaves de la famille. »
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