La société mauritanienne traverse une période
cruciale. La bannière derrière laquelle devrait se rassembler les diverses
sensibilités socio-culturelles à première vue adhésives au pacte républicain, s'affiche
pour l'instant en une constriction à toutes les réalisations
propices à la fécondité. D'un coté des extrémistes se rangeant sous la
coupole des droits de l'homme, les islamistes fanatiques sortis du « Ribat »
décomplexés, agissant désormais à ciel ouvert, les séparatistes, les
autonomistes, les jusqu'auboutistes et de l'autre côté une
opposition traditionnelle en plus d'une majorité « standard » qui
monopolisent la scène politique et qui se jaugent tout en s'adonnant à
des exercices byzantins. Et il est regrettable que dans ce kaléidoscope qui
donne le tournis, de constater avec amertume la démission de nos
intellectuels, figures de proue sous d'autres cieux et en tous temps. Cet « acte
manqué » a permis l'émergence d’une secte de politiciens « qui
n'a fait qu'interpréter la Mauritanie de différentes manières, quand il s'agit plutôt
de la transformer ». Il n'y a rien de plus inquiétant que la cécité
morale ou la déchéance psychologique des intellectuels qui
sont supposés jouer les mages à un peuple pris en tenailles, agonisant
entre une administration sans scrupules et une conjoncture économique exécrable.
Et puisqu'on parle de notre classe politique, levons un coin de voile sur ce
qui se trame dans le microcosme nouakchottois et qui tiendra sans doute en
haleine la doxa, au moins jusqu'à l'éventuelle présidentielle de 2014. Nul
ne peut, ne doit douter de la sincérité du président de notre Assemblée
Nationale Messaoud Ould Boulkreir. Son initiative, quand elle a pour but
de réconcilier les mauritaniens de tous bords nous va droit au cœur. Mais cet « impératif
catégorique » ne doit pas octroyer un blanc-seing à notre défenseur
des droits de l'homme, le sage Messaoud mais surtout à
tous ceux qui croient s'opposer au pouvoir du général Mohamed
Ould Aziz, et qui, me semble-t-il, n'ont pas encore tiré
des enseignements de notre Histoire récente. Il y a moins d'une
mandature celui que tout le monde présentait comme étant le moins
instruit, le moins diplômé, le « sneidri », je veux nommer le
président Aziz, avait réussi un coup de maître en prenant le dessus sur
tous les « animaux » politiques nationaux et
internationaux suite à des manœuvres frauduleuses dont il a seul le
secret. Certes les ruses, les dols, les subterfuges, le guet-apens, vieilles
recettes nées avec le diable ignorent la convenance et le politiquement
correct. Déjà cinq cents ans avant l'ère chrétienne, un général chinois
Sun Tzu dans son ouvrage : l’Art de la guerre disait: « apprends
à connaitre ton ennemi, un ennemi connu est à moitié vaincu ». Ainsi, Aziz
connaissant les mauritaniens comme la poche de son boubou blanc acceptait la
mise en place d'un gouvernement d'union nationale juste après les accords de Dakar.
Pour cela, il a même donné le ministère de l'intérieur à l'opposition, tenu
alors par un administrateur consensuel et dont la compétence et le
sérieux sont reconnus par un bon nombre de citoyens mauritaniens: Mr Mohamed
Ould R'zeizim. Si Aziz avait soupçonné l'ombre d'un doute sur sa victoire
il n'aurait jamais procédé ainsi. En manipulateur avantageux Aziz, avant de démissionner avait mis
en place des mécanismes intangibles mais douteux capables de le
hisser aussi bien en aval qu'en amont jusqu'à la magistrature
suprême de Mauritanie .L'opposition, les indépendants et une partie
de l'opinion n'ont senti le piège qu'une fois devant le fait accompli. En
le pressant de proclamer les résultats au bénéfice du général
Aziz,Ould R'zeizim, alors ministre de l'Intérieur, a été taxé de tous les
maux surtout par ses amis opposants le stigmatisant comme le « traitre »
au service du pouvoir. Et voilà que certains politiques tentent de faire
l'ébauche du même feuilleton qui a prévalu avant l'élection de 2009 où
Aziz avait été élu à plus de 52 pour cent dans des conditions insolites, au nez
et à la barbe des membres du fameux gouvernement d'union nationale.
Le général Aziz qui pourtant n'a jamais fait
l'Ecole de Guerre prépare cette fois encore un stratagème digne du cheval-cadeau
de Troie. L'idée d'un éventuel gouvernement d'union nationale pour le
pouvoir mauritanien n'est pas d'actualité pour le restant de l'année
2013.Mais les « experts » s'y pencheront au moment
opportun parce que c'est une procédure envisageable et qui, pour l'instant est
différée en attendant de régler quelques détails dont l'enrôlement par exemple
et ce, en vue d'aiguiser d'abord tous les appétits de
manière à faire couler autant de salives. Pour briguer un second mandat de
5 ans(2014-2019) notre général-président a besoin de l'initiative de Messaoud
Ould Belkheir pour tenir en haleine l'opinion comme prélude au réchauffement
des salles. Encore faut-il se référer à l'Histoire. Le 29 Août 1939 les
Russes et les Allemands signaient un pacte de non-agression, avant qu'ils
n'envahissent simultanément la Pologne déclenchant ainsi la 2ème guerre
mondiale, le 1er septembre. Ce pacte n'était que le double-réalisme des deux
protagonistes, et qui répondait aux vœux secrets des dictateurs Hitler et
Staline: l'un voulant avoir les mains libres à l’Est, l’autre se préparant au
pire en attendant l'heure fatidique. Le vrai-faux réalisme d'Ould Abdel
Aziz c'est de faire croire à l'opposition sa réticence à former un gouvernement
d'union nationale alors même que c'est son vœu secret. Ses agents de
renseignements, ses laudataires ne donnent pas de répit au président de
l'Assemblée Nationale qui a pour mission informelle de faire adhérer le
maximum de partis politiques, d'Ong à son initiative. D'ici là, le fruit
qu'est l'opposition aura mûri et il suffirait de le cueillir sans coup férir. On
se demande si Messaoud le sincère, le candide, le « chreigman » (comme
moi d'ailleurs à certains moments) n'a pas vu venir « le malin génie »
de l'enchanteur Merlin- AZIZ dans ses manœuvres ô combien dilatoires! D'ailleurs
Messaoud a-t-il le choix que de jouer aux entremetteurs? La configuration du
microcosme politique mauritanien a subi des mutations notoires et il
n'est pas sûr que le parti de l'actuel président de l'Assemblée
Nationale puisse lui garantir derechef une place de choix à
l'hémicycle. D'où sa disponibilité à vouloir jouer les Mahatma, et
autre Madiba...Mais tout ça Aziz n'en a cure, car ce qui l'importe c'est
asseoir son autorité de fait aussi longtemps que possible en restant le
premier magistrat du pays jusqu'en...2024, année où il n'aura que 67 ans, à
l'issue de son troisième mandat.
D'ailleurs
en dehors de quelques coups fourrés, de déceptions programmées, de
confiances rompues de contrats non honorés ,rien de constructif ne sortira
d'un éventuel gouvernement d'union nationale anté-élection présidentielle de
2014.Mohamed Ould Abdel Aziz maitre à bord du bateau ivre Mauritanien en
perdition usera de tous les moyens peu orthodoxes pour briguer un second
mandat. Sa nouvelle stratégie après le feuilleton du Ghanagate, qui, me
semble-il l'a beaucoup affecté, assommé, semble désormais la politique de
la « bouche-cousue ».Excellente stratégie de communication et qui
nous enseigne que malgré le coup de feu du fils, le tir « ami » du
père, la confusion du Ghanagate, le dilemme des stupéfiants notre général
nargue son peuple et n'est pas prêt de démissionner.
La réélection du général AZIZ en
2014 aboutira sans doute à une véritable crispation de la scène politique. L'opposition
démocratique en prendra un coup duquel elle ne pourrait plus se relever, du
moins de façon crédible. Ceux comme Ahmed Ould Daddah,Messaoud Ould
Belkheir,Ahmed Ould Sidi Baba,Ba Mamadou Alassane,Ladji Traoré,Mohamed
Abderrahmane Ould Moine pour ne citer que les caciques dont on regrettera
l'expérience et la compassion, se débarrasserons de leurs tabliers de
politiciens-gérontocrates pour sûrement s'occuper de la rédaction de leurs
mémoires. Ceux nombreux qui voudraient prendre la relève auront à mesurer leurs
ambitions en se battant sur deux fronts: le pouvoir et les extrêmes. Une
opposition démocratique faible favoriserait l'émergence de toutes les cellules
dormantes du fanatisme. Artung minen!
Capitaine
Ely Ould Krombelé
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