Allocution du Dr Ahmed Ammou ould Moustapha,
au nom d’ IRA-France à la conférence-débat organisée à l’Assemblée Nationale
Française sous le thème de l’esclavage en Mauritanie (mercredi, 12juin 2013).
Monsieur le
Député, cher Jean-François,
Mesdames
Messieurs les invités, camarades et amis
Ce n'est pas sans une certaine émotion que nous sommes réunis sous ce toit.
Dans cette illustre Maison de l'Assemblée Nationale française qui a vu
s'élaborer des textes fondateurs. Des textes abolissant l'esclavage, il y a de
cela presque deux siècles. Mais aussi des textes plus récents instaurant une
journée de commémoration de l'abolition de cette abomination. Ici, l'esclavage
est du domaine de la mémoire. Il convient de ne pas oublier qu'il eut existé.
En Mauritanie, Monsieur le Député, un système militaro-féodal implacable,
habillé de vieux oripeaux d'une démocratie théâtrale et grotesque laisse des
homme soumette d'autres êtres humains et les maintenir dans la servitude la
plus abjecte dans l'indifférence totale de la conscience des hommes comme si le
progrès des idées de l'Humanité s'est arrêté net depuis des
siècles en Mauritanie et s'est enkysté dans une coque qui le rend imperméable
aux changements.
L’esclavage est le lot quotidien d'une part importante de la population. On les
appelle les Hratine, esclaves et anciens esclaves. Certes, ils ne sont pas
enchaînés deux par deux. Ils ne s'échinent pas à longueur de journée dans des
champs de canne à sucre . Mais il y'en a qui naissent esclaves parce que leur
mère ou père sont esclaves. Certains travaillent toute leur vie au service
d'autre sans contrepartie. Certains se voient déshérité par un prétendu maître
de leurs ascendants. Notre organisation a débusqué plusieurs cas de ce type. La
police a même arrêté quelques coupables de pratique esclavagistes quand
les militants d'IRA lui avaient fait comprendre qu'il ne pouvait en être
autrement. il est vrai qu'elle les a vite relâchés.
Vous l'aurez compris, Monsieur le Député, Mesdames et Messieurs les
invités, il y a des lois qui répriment l'esclavage en Mauritanie. Il y en a eu
même plusieurs dans l'histoire du pays. La plus récente porte un titre qui
souligne, à lui tout seul, l'anachronisme qui caractérise les mentalités de mes
concitoyens: "loi N° 2007-048 du 3 septembre 2007 portant
criminalisation de l'esclavage et réprimant pratiques esclavagistes".
L'esclavage est donc qualifié de crime en Mauritanie depuis 2007. Il est vrai
qu'en 1981, une autre loi l'avait aboli mais elle prévoyait l'indemnisation des
maîtres d'esclaves, avant cette date en Mauritanie, posséder un être humain, le
vendre, en totalité ou en partie pour une ou plusieurs personnes qui peuvent se
partager son service, vendre sa force physique à une personne et ses
attributs sexuels si c'est une femme à une autre ou les garder pour soi, le
vendre, parfois à la naissance et attendre le sevrage pour le remettre à ses
nouveaux maîtres qui peuvent être à des milliers de kilomètres de ses parents,
le donner, le céder, l'astreindre aux violences physiques, à
l'exploitation sexuelle, travaux forcés, dangereux et/ou dégradants , le priver
de l'éducation du droit au mariage, au voyage, exercer sur lui des châtiments
ou des mutilations et souvent en présence des autres membres de sa
famille, toutes ces pratiques étaient totalement légales avant
1981. C'est vous dire le progrès accompli. Mais aussi récente que soit la
reconnaissance par l'Etat mauritanien du caractère criminel de l'esclavage, une
loi existe désormais et elle est promulguée. Notre organisation, IRA, ne
demande que son application. Toute son application. A tout un chacun et pour
tous. Faire appliquer la loi, c'est l'une des missions de l'Etat. En Mauritanie
l'Etat rechigne à s'acquitter de son devoir. Il rechigne à appliquer cette loi.
Parce qu'elle remet en cause le système sur le quel il repose.
Les militants d'IRA ont payé de leurs corps et de leur liberté l'exigence
d'appliquer la loi. Ils sont entrés dans des commissariats pour exiger que la
police instruise des affaires qu'ils lui apportent. Comme le prévoit la loi.
Ils ont organisé des meetings, des sit in, des "caravanes des
esclaves" pour la liberté. Ils ont été réprimés, calomniés et jetés
en pâture à la vindicte populaire.
Notre
Président, plusieurs de nos dirigeants et de nos militants ont croupi en prison
pour avoir dénoncé ces pratiques ignominieuses et pour avoir voulu jeter le
faux masque de la religion sur cette pratique d'un autre âge.
L'état
mauritanien nargue le droit international et se joue des organismes et des
partenaires internationaux en édictant de plus en plus de lois modernes contre
l'esclavage et en ratifiant les conventions internationales de promotion et de
protection des droits humains mais, parallèlement, en sourdine, l'Etat continue
à promouvoir les anciennes références, tirées de manuels d'exégèses
esclavagistes qui partagent les musulmans en deux catégories: maîtres et
esclaves et qui stipulent que l'esclave est un bien matériel pour son maître et
il peut en disposer à sa guise sans aucune restriction.
C'est
l'autodafé symbolique de l'un de ces livres qui a valu au Président Biram un
séjour de quelques mois dans les geôles mauritaniennes sans aucun procès ni de
qualification des faits qui lui sont reprochés avec une campagne de
diabolisation sans précèdent par les autorités mauritaniennes avec la
complicité malveillante des Oulémas salariés.
Mais cet
acte courageux a réveillé les consciences et a permis d'ouvrir le débat sur les
fondements de jurisprudence musulmane de l'esclavage, qui sont en fait
inexistants mais qui sont le fruit d'une interprétation erronée à la carte
des exégètes qui ont tordu le cou au texte religieux pour
satisfaire aux désirs aux pulsions sexuelles et aux besoins en main d'oeuvre
et en domestiques des rois, des émirs et des notables musulmans, le problèmes
est que nos Oulémas récitent ces textes et continuent à les appliquer et toute
remise en cause de ces manuels équivaut à ces Ouléma de revenir aux bancs de
l'école pour apprendre autre chose puisqu'ils ne savent rien d'autre que ces
livres esclavagistes, chose qu'ils n'accepteront pas par fainéantise et par
orgueil pour cela ils tirent à boulets rouge sur Biram.
Mais à la fin tout le monde s'accorde à dire que c'est Biram qui avait
raison mais son crime c'est qu'il a eu raison avant les autres et surtout par
son acte il sape le fondement juridique de cette pratique hideuse que
beaucoup, malheureusement , s'en accommodent en Mauritanie.
Le combat de
l'IRA commence à porter ses fruits, la reconnaissance internationale de la
pertinence du combat de l'IRA incarné par son président vient de se
concrétiser par l'attribution du prix Frontline defenders remis des mains
du premier ministre irlandais et dont je félicite le Président Biram ici
présent, d'autres prix viendront, j'en suis persuadé, couronner le combat juste
sincère et efficace de notre organisation, les esclavagistes
prennent peur et déploient des trésors d'ingéniosité pour cacher
leur forfaiture en falsifiant des contrats de travail bidons, des pièces d'état
civil en fabricant des témoignages parfois rémunérés, parfois
obtenus sous la contrainte avec la complicité des autorités du pays, le
gouvernement feint d'instruire les affaires d'esclavage quand il se trouve
acculé par les militants de notre organisation.
La loi portant criminalisation de l'esclavage commence à être timidement
appliquée. Pas partout, pas par tous ni contre tous. Mais c'est un début.
C'est un début d'application d'une loi obtenue par l'action d'une organisation
qui opère hors la loi. Monsieur le Député, Messieurs les représentants du
Ministères des Affaires étrangères françaises, vous avez devant vous, vous avez
accueilli et honoré le président et les responsables d'une organisation
mauritanienne hors la loi! Une organisation hors la loi qui s'est assigné comme
objectif de faire appliquer la loi. Depuis octobre 2008, IRA opère en dehors du
cadre juridique mauritanien, a son corps défendant. Ce n'est pourtant pas faute
de constituer un dossier de demande de légalisation. A chaque fois c'est le
refus catégorique.
Notre demande première et que nous n'avons eu de cesse de réitérer est d'avoir
notre titre de reconnaissance en tant qu' ONG de la société civile mauritanienne.
Mais le travail pour faire progresser les mentalités dans une société
croulant sous le poids des conservatismes de tous genres nécessite de déborder
du cadre strictement de défense des droits de l'homme et aller sur le terrain
politique au sens traditionnel du terme. Un groupe de militants émanant
de notre organisation a décidé de créer un parti politique. Ils l'on appelé
"RAG" pour Parti Radical pour une Action Global. Là aussi c'est la
légalité que nous visons et que nous voulons utiliser le plus pacifiquement du
monde pour faire avancer notre cause. Mais là aussi, nous nous heurtons au murs
de l'Administration. Nous attendons toujours notre autorisation. Nous sommes,
pourtant décidés à investir toutes les tribunes qu'offre la vie politique
mauritanienne. Nous mènerons nos listes sous nos propres couleurs, briguerons
tous les mandats et œuvrerons pour avoir, dès les échéances prochaines, un
groupe parlementaire en propre.
IRA veut l'application de la loi 2007-0048. Toute la loi, à tous et par tous.
Mais nous voulons aussi qu'une nouvelle loi soit adoptée. Une loi qui aura pour
objectif de régler la question de la propriété foncière et agricole. Une
réforme agraire juste, durable et équitable.
Les Hratine sont courageux, travailleurs et endurants. Ce sont eux qui
constituent les forces vives et motrices de la société. IRA considère que
les Hratine ont suffisamment longtemps travaillé pour les autres. Nous estimons
qu'ils ont le droit, maintenant, de travailler pour eux mêmes. Mais la plupart
des Hratine sont des cultivateurs, dans les oasis, dans les cuvettes et les
dépressions cultivables. Ils sont aussi dans les bétails des maîtres. Les
Hratine méritent et réclament d'avoir des terres à eux, avec titre foncier
inaliénable et possibilité de le léguer à leur descendance. Vous voyez ce sont
des revendications simples. Etre et avoir. Mais ce qui semble banal et naturel
sous ce toit peut s'apparenter à la provocation en Mauritanie. Mais IRA a
décidé de mener cette provocation. Désormais, elle accompagnera les esclaves et
anciens esclaves dans leur combat pour la propriété de la terre. Jusqu'à la
dissolution de la saisine collective de la terre et la distribution, à leur
profit, de terres arables de qualité en quantité.
Evidemment qu'IRA sera vigilante pour qu'une telle réforme ne soit un moyen
oblique qu'utiliseront certains hommes d'affaire pour mettre la main sur les
meilleures terres. L'Etat doit avoir une politique de ségrégation positive dans
ce domaine.
Le combat autour de la question de la propriété de la terre sera autrement plus
rude et violent que celui pour l'application de la loi criminalisant
l'esclavage. Pour une première raison qui est qu'il n'y a pas encore de loi.
Pas de cadre juridique opposable. Les féodalités vont se réveiller et actionner
tous leurs ressorts au sein de l'Administration et jusqu'au plus haut niveau de
l'Etat.
La lutte
contre l'esclavage étant un combat universel, notre organisation est ouverte à
tout le monde et compte dans ses rangs, en Mauritanie des esclaves, des anciens
esclaves mais aussi des hommes et des femmes de bonne volonté d'autres
conditions sociales, qui ont décidé de s'associer à corps perdu avec
leurs frères victimes depuis des siècles de cette pratique ignoble en
s'affranchissant du sentiment de culpabilité, résultat de pratiques indignes
dont ont pu se rendre coupables leurs parents en les dénonçant justement et en
demandant réhabilitation et réparation pour les victimes. Nous comptons dans
nos rangs des femmes et des hommes de toutes nationalités et de toute catégorie
sociale( des avocats, des médecins, des hommes d'affaires des hommes
politiques des activistes des droits de l'homme cet...) partout dans le monde,
en Europe au Moyen Orient, en Afrique et en Amérique.
Notre
organisation manque de tout. Ses moyens, très indigents, proviennent
surtout des cotisations de nos adhérents qui sont, hélas, ceux parmi la
population mauritanienne qui, de par leur naissance, sont dans le dénuement le
plus total ce qui plombe nos activités qui reçoivent pourtant un engouement
sans précédent des populations cibles
Nous auront besoin de votre aide et soutien dans cette future épreuve aussi.
Comme nous avons eu à l'éprouver dans les mois qui viennent de s'écouler.
Au nom
d'IRA-France, je vous remercie.
Au nom d'IRA-France, je vous remercie.
miɗa jaara on ;njokkee golle jooni weeta subak arii
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