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mardi 7 mai 2013

- L’éditorial de La Nouvelle Expression : Le Haratine, l’autre cadavre

L’éditorial de La Nouvelle Expression : Le Haratine, l’autre cadavre
Il y a 25 ans, les Haratines avaient crié pour faire entendre leur voix. Ils avaient mis sur la place publique leur mal être. C’était la publication de la charte d’El-hor. De l’amorce de ce combat historique pour l’humanisation de la population haratine, des hommes et des femmes avaient décidé de combattre cette abomination qui a assombri le devenir du pays.

Comme à l’accoutumée, le pouvoir avait joué - et continue de jouer - sur la division de cette communauté et toutes les communautés qui cherchent à exister comme des citoyens à part entière et non entièrement à part.

Et Avec la cérémonie de publication officielle du Manifeste des Haratines, cette communauté semble être unie pour dénoncer l’humiliation continuelle dont elle est victime. Ce Manifeste est exhaustif et constitue une sonnette d’alarme saisissante.

La situation est critique. La Mauritanie est à terre. Elle est à terre à cause des bilans des pouvoirs successifs qui ont dirigé le pays. Ne pouvant être plus éloquent que le document, et un dessin valant mieux qu’un discours, voici ce que dit ce Manifeste :

- Plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers de Haratines (les estimations sont approximatives en l’absence d’études indépendantes du fait des tabous nés du refus systématique par les gouvernements successifs d’aborder cet aspect de la question) sont encore réduits à l’abominable esclavage de naissance, de statut et de condition avec toutes les sujétions et les traitements inhumains et dégradants qui s’y attachent : travail forcé et non rémunéré, viols et exploitation sexuelle, séparation des familles, ignorance et pauvreté, misère sociale et économique, absence de perspectives d’avenir, exclusion, etc. ;

- Plus de 80% des 1.400.000 personnes les plus pauvres en Mauritanie sont issues de la communauté Haratine ;

- Plus de 85% des 1.500.000 analphabètes en Mauritanie en sont également issus;

- Près de 90% des petits paysans sans terre, du fait de la tenure traditionnelle du sol ou de l’exploitation féodalo-esclavagiste, se recrutent au sein de ce groupe ;

- Moins de 20 professeurs d’université sur un nombre avoisinant les 300 ;

- Une demi-douzaine de magistrats sur plus de 200 ;

- Moins d’une dizaine de diplomates sur plus de 150 ;

- Moins d’une dizaine de commissaires de police sur plus de 140 ;

- Une dizaine d’administrateurs civils sur plus de 200 ;

- 1 à 2 Chefs de Mission diplomatique sur 35 environ ;

- 3 à 4 Directeurs généraux d’Etablissement ou de sociétés publics sur 140 ;

- 2 Présidentes de Conseils d’Administration d’Etablissements ou sociétés publics sur 140 ;

- Moins de 40 officiers supérieurs sur plus de 500 ; dans ce cadre, le corps de la Garde nationale constitue une caricature de la sélection ségrégationniste à l’égard des fils de cette communauté, d’où leur nombre infime parmi les officiers, tous grades confondus.

Ces quelques considérations tirées du Manifeste renseignent, à suffisance, sur l’état de la politique ininterrompue d’exclusion, de racisme qui sévit dans ce pays.

La Mauritanie ne peut et ne doit continuellement rester comme un Etat communautaire et tribal. La situation du Haratine s’apparente à celle d’un cadavre dans une morgue déjà pleine.

Oui, la Mauritanie doit être, si elle ne veut disparaître.

Seidi Moussa Camara

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