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lundi 18 février 2013

Marches en faveur de Rahme Mint Legreïvy : Qui soutient Salma et ses enfants ?


Marches en faveur de Rahme Mint Legreïvy : Qui soutient Salma et ses enfants ? Partout, à Cheggar, comme à Nouakchott, Nouadhibou et Akjoujt, les marches s’ébranlent pour soutenir Rahme Mint Legreïvy, inculpée par le Parquet de la République de Nouakchott pour pratiques esclavagistes sur une mineur du nom de Yemma Mint Salma, puis incarcérée depuis dimanche 10 février 2013 à la Maison d’arrêt de Sebkha.

Personne ne se soucie cependant de la jeune esclave présumée, ni de sa mère Salma, ni de ses frères, Bilal et Saleck, qui sont nés selon leurs propres aveux, « esclaves de la famille Legreïvy ». Ni marche de soutien, ni élan de solidarité, ni compassion pour ceux qui n’ont comme tribu et comme famille que leur cercle restreint, sans ascendants ni arbre généalogique.

Seule l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) et son président, les épaule dans leur terrible épreuve, ou pour le moment, l’Etat mauritanien, qui est en train d’écrire une nouvelle page dans l’histoire du pays.

Le cas de Rahme Mint Legreïvy est en train de devenir un fait de société. Des dizaines de personnes à Akjoujt, à Nouadhibou et Nouakchott multiplient depuis dimanche 10 février 2013 des marches de protestation devant les sièges de leur gouvernorat respectif pour exiger la libération immédiate de celle que le Ministère public a inculpé formellement de pratiques esclavagistes et placé en détention préventive sur une plainte déposée par les victimes, conformément à l’article 2 de la Loi de 2007 criminalisant de telles pratiques en Mauritanie.

A Cheggar, fief de la famille Ehel Legreïvy, les manifestants ont menacé de fermer la Route de l’Espoir, unique voie de connexion entre Nouakchott et les villes orientales du pays. Pendant ce temps, les réunions tribales se sont multipliées et des contacts tous azimuts ont été pris avec les hauts responsables militaires et civils pour que cette affaire cesse immédiatement, et que Rahme Mint Legreïvy soit libérée.

Mais personne ne se soucie des victimes présumées. Pour elles, il n’y aura ni marche de soutien, ni élan de solidarité. Elles devront tout simplement faire passer leur calvaire et leur malheur tutélaire dans la case pertes. Sans droit de reconnaissance des torts qu’ils ont subis, sans compensation, sans même la satisfaction d’une justice équitable qui leur soit rendue. Ils doivent tout simplement disparaître et se faire oublier.

A Salma, la mère de cette famille d’esclaves présumée, ce sera 60 ans de servitude qu’elle devra accepter de ravaler. Pour ses enfants, Saleck, la quarantaine presque, Bilal la trentaine, et Yemma la vingtaine mais simple d’esprit, ce sont toutes ces années d’abrutissement, de corvées interminables, de privations, sans enseignement, qu’ils devront enterrer. Et repartir dans la vie à zéro, sans gîte, sans instruction, sans formation, sans revenus.

L’ONG de défense des droits de l’homme, IRA, initiatrice de cette démarche qui a permis de découvrir ce cas présumé d’esclavage, estime d’ailleurs que la procédure est encore incomplète, jugeant que c’est toute la famille Ehel Legreïvy qui doit aujourd’hui répondre devant la justice, en l’occurrence Marième Mint Sidi Salem, la mère de Rahme et maîtresse attitrée de Salma, ainsi que sa fille Mahjouba, maîtresse de Bilal, en particulier, car jugés solidaires du même acte pour lequel Rahme a été inculpée et incarcérée.

Ce que les marcheurs et les souteneurs de Rahme Mint Legreïvy semblent oublier, selon Hamady Ould Lehbouss, conseiller de Birame Ould Dah Ould Abeid, président d’IRA, c’est que cette affaire a déjà pris des ampleurs internationales. Toutes les ONG de défense des droits de l’homme dans le monde et toutes les institutions européennes et onusiennes spécialisées dans ce domaine, selon lui, ont à présent l’œil rivé sur cette affaire.

De la manière avec laquelle l’Etat mauritanien règlera ce cas dépendra largement sa côte sur le plan international, eu égard aux engagements qu’il a déjà pris vis-à-vis de ses partenaires sur l’interdiction de l’esclavage et sa fermeté à appliquer les lois y afférentes, fait-il remarquer en substance.

D’après lui, cette situation met actuellement les autorités mauritaniennes dans un véritable embarras, car elles se trouvent prises entre le marteau d’une partie non négligeable de leur opinion, notamment la notabilité féodale arabo-berbère qui constitue la force dominante dans le pays, et l’enclume de la communauté internationale ».

Il s’étonnera par ailleurs des multiples injustices infligées à d’autres membres de la communauté arabo-berbère, sans qu’aucune marche ne soit déclenchée ni manifestation de solidarité. Il citera dans ce cadre les exactions quotidiennes du préfet d’Arafat et celui de Toujounine, dont la dernière en date est celles subies par la famille Ehel Sidi Mohamed, dont la maison a été détruite et leurs deux filles incarcérées, pour s’être opposées à la spoliation de leur terrain que le préfet veut attribuer à des proches, selon leur déclaration à la presse.

Cheikh Aïdara


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