Cadre de Concertation des Réfugiés Mauritaniens au Sénégal
Contribution : Le Haut Commissariat des nations unies pour les réfugiés s’invite au débat sur
Le recensement en Mauritanie : En a-t-il saisi tous les enjeux ?
Il faut reconnaitre que le Haut commissariat des nations unies pour les réfugiés (HCNUR) s’est invité au débat sur le recensement tant controversé en Mauritanie. L’a-t-il fait à tord ou à raison ? En a-t-il perçu les enjeux ? Il appartiendra à chacun de l’apprécier.
Toujours est-il que ce recensement appelé enrôlement et dont l’objectif déclaré est la sécurisation et l’établissement des documents d’état civil oppose farouchement, d’une part les autorités mauritaniennes, et d’autre part une grande partie de la communauté négro-mauritanienne particulièrement représentée, dans ce contexte de crise, par le mouvement social « Ne Touche Pas à Ma Nationalité ». Toutefois, il faut admettre, par ailleurs, à ce propos, qu’on a assisté à une véritable levée de boucliers de mauritaniens venus de tous les horizons (organisations de défense des droits de l’homme notamment le forum national des organisations des droits de l’homme, Partis politiques, simples citoyens…), pour dénoncer des opérations de recensement jugées discriminatoires, mal préparées, mal organisées, non respectueuses de la diversité ethnique, menaçantes pour la cohésion nationale. Les manifestations contre ce recensement ont conduit à une répression farouche de la part des autorités mauritaniennes qui ont tiré à balles réelles sur des jeunes de Maghama, ville située au sud du pays, dans la vallée du fleuve Sénégal, tuant une personne et faisant de nombreux blessés parmi les manifestants. Les responsables de ces crimes doivent bien répondre de leurs actes devant la justice, s‘il y a un minimum de justice en Mauritanie.
Pourtant, c’est bien dans ce contexte que le HCNUR s’est prononcé au moins à deux occasions sur ce recensement. La première occasion renvoie aux déclarations contenues dans le numéro 107 du quotidien sénégalais « l’Enquête » du vendredi 14 octobre 2011, et que l’on peut attribuer à Monsieur Ruffin Gilbert Loubaki, Représentant régional adjoint du HCNUR résident à Dakar. Sous forme d’un démenti, Monsieur Loubaki déclare que « les réfugiés volontairement retournés ne sont pas victimes de stigmatisation et leur nationalité n’est pas remise en question [selon les termes]… de l’accord tripartite entre l’Etat du Sénégal, la Mauritanie et le HCR ». Il s’agit d’un accord tripartite signé en novembre 2007 à Nouakchott entre la Mauritanie, le Sénégal et le HCNUR garantissant et organisant les opérations de rapatriement des réfugiés mauritaniens au Sénégal et qui avaient démarrées en janvier 2008. La deuxième occasion renvoie aux déclarations de la représentante résidente du HCNUR en Mauritanie, Madame Nada Assaad Merheb, le 12 octobre 2011, lors de la cérémonie de lancement du projet d’enrôlement des rapatriés de Rosso placée sous l’égide du ministère mauritanien de l’intérieur et de la décentralisation et en présence des missions diplomatiques accréditées à Nouakchott et des donateurs. En effet, Madame Assaad Merheb a déclaré sur les ondes de Radio France Internationale, le 14 octobre 2011, et à propos des rapatriés concernés par le recensement tant controversé que « la procédure est simplifiée pour le recensement des negro-mauritaniens ». A cela, Monsieur Ibrahima Amadou Ndiaye, président de l’Union nationale des rapatriés rétorquera que ce recensement, d’ailleurs, n’est pas une priorité et que s’il existe à leurs intentions des programmes des autorités mauritaniennes et du HCR pour leur insertion,
« la priorité est de régler le problème des terres spoliées que les rapatriés ont du mal à récupérer ». D’ailleurs, les déclarations faites par les représentants de HCNUR à ce propos, nous font penser à celui qui cherche à défoncer une porte déjà ouverte. Car, il ne viendrait pas à l’idée et de façon flagrante au gouvernement du Général Abdel Aziz de nier la nationalité des rapatriés, qu’il a forcément reconnue de facto, dès lors où il accepté leurs retours au pays. Par contre, il faut souligner que de nombreux rapatriés ne bénéficient pas jusque-là de pièces d’identité nationale, alors que la dernière vague de réfugiés venus du Sénégal est rentrée en janvier 2011. Aussi, nous demandons au HCNUR de ne pas déplacer le problème. Le recensement en cours ne doit pas être l’arbre qui cherche à cacher la forêt. Le problème qui se pose en Mauritanie est celui qui concerne la cohabitation entre ses différentes composantes nationales, d’un côté les négro-mauritaniens et de l’autre les arabo-berbères que l’on appelle communément les maures. Ce problème se traduit par la volonté de la minorité hégémonique maure d’imposer sa domination sur les négro-mauritaniens et qui a conduit aux tragiques événements de 1989-91. Aussi, le HCNUR, dans sa collaboration avec la Mauritanie, doit toujours avoir en vue cette donnée. Il ne doit jamais perdre de vue les violations massives des droits de l’homme en Mauritanie et dont le caractère raciste et génocidaire ne sont plus à prouver et ceci au regard : des déportations massives de populations exclusivement noires de Mauritanie, des exécutions sommaires dont elles ont été victimes ; des pogroms opérés dans les corps de l’armée mauritanienne et autres services de sécurité à l’encontre des éléments négro-mauritaniens ; de l’existence de fosses communes, des expropriations à grande échelle, des viols et autres humiliations. Toutes choses commises par les forces armées et de sécurité mauritaniennes entre 1989 et 1991, contre ses propres citoyens. C’est l’occasion de demander, de grâce, aux institutions étatiques ou autres, aux organes de presse, à tous ceux que la scène politique mauritanienne intéressent, qu’ils arrêtent de faire du négationnisme en prétendant faussement que les présences des réfugiés mauritaniens au Sénégal et au Mali ne seraient que la conséquence de leurs fuites chez leurs voisins, afin d’échapper on ne sait à quel conflit interethnique. De grâce que l’on cesse ces fausses déclarations, dès lors où officiellement, l’Etat mauritanien a reconnu sa responsabilité concernant les crimes racistes commis contre ses propres ressortissants et notamment les déportés qui à l’instar de ceux du Sénégal, comme on le sait, ont entamé leurs rapatriements en Mauritanie, depuis janvier 2008, dans le cadre d’un accord tripartite. Ne soyons donc pas plus royaliste que le roi. Pour éviter la récidive de tels événements tragiques et pour mieux comprendre ce qui se joue autour de ce recensement qui divisent les mauritaniens, il faut rappeler les vraies motivations qui ont conduit aux événements dits de 1989. Ce qui a motivé ces crimes racistes susmentionnés a été, en partie, évoqué, par l’ONG agir ensemble pour les droits de l’homme, dans sa revue de juillet-aout 1999 : « en 1990, à la faveur de la guerre du golf et au motif d’un invraisemblable complot pro-israélien, plusieurs mauritaniens de race noire essentiellement d’ethnies pulaar et soninké sont arrêtés. Il s’agit surtout de militaires et de fonctionnaires, le gouvernement mauritanien fervent soutien de Saddam Hussein croyait-il par ses agissements sanglants affermir la domination maure ». Nous voulons insister sur le fait qu’en Mauritanie, les responsables de ces crimes ne sont pas inquiétés et jouissent toujours d’une impunité totale. Une seule condamnation a vu le jour à ce propos. Il s’agit de celle prononcée en juillet 2005, par la cour d’Assise de Nîmes (France) qui a condamné le capitaine mauritanien Ely ould Dah, par contumace, à la peine maximale de dix ans de réclusion, pour crimes de tortures sur des militaires negro-mauritanien en 1990-1991.
Par ailleurs, ce n’est pas la promesse faite par le régime politique du Général Mohamed ould Abdel Aziz issu du coup d’état d’aout 2008, celle qui fut annoncée par son ministre des affaires islamiques à savoir de repérer et de marquer les tombes des victimes des événements ici évoqués, qui scellera la réconciliation nationale. La réconciliation nationale ne se fera pas tant que
Perdureront, en Mauritanie, l’impunité et le négationnisme. Le HCNUR et plus globalement la communauté internationale doit prendre la vraie mesure de ce qui se passe réellement dans ce pays, avant qu’il ne soit trop tard. C’est l’occasion de rappeler, que par rapport aux graves atteintes aux droits de l’homme perpétrées contre les noirs mauritaniens entre 1989 et 1991, il a fallu attendre onze années plus tard pour qu’intervienne la première réprimande internationale à l’adresse du gouvernement mauritanien. Elle date de 2000 et émane de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, sous formes de recommandations. Que la communauté internationale sache qu’en Mauritanie, tant que les responsables du génocide contre les négro-mauritaniens sont en liberté et continuent à servir dans l’administration et ailleurs, les mauritaniens des différentes communautés resteront divisées sur pratiquement tout. Le recensement actuel, comme d’autres questions en témoignent. Notamment les questions relatives à la place de l’enseignement et de l’utilisation dans l’administration de la langue dans le contexte multiculturel de la Mauritanie et celle relative à l’impartialité dans les nominations dans la fonction publique sans discrimination. Pour revenir à nos génocidaires de Mauritanie, leur comportement ressemble tout craché à ce que pense Carla Del Ponte, l’ex-procureur près du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, du comportement des génocidaires de guerre. S’adressant, lors d’un colloque- dans le contexte qui est le sien- à des diplomates et à des ambassadeurs perplexes quant à l’impact de la justice sur la paix, elle laisse entendre que les leaders de génocides n’ont exprimé aucun signe de remords, qu’elle n’a vu aucun signe de réconciliation et que de toute façon, son objectif c’est de rendre la justice, celui de poursuivre les plus hauts responsables, que cela ait un impact politique ou pas.( cf. quotidien sénégalais Walafajri du 9 octobre 2006-no 4371). L’offensive menée actuellement par la cour pénale internationale dirigée par Luis Moreno Ocampo va bien dans ce sens. Aussi, faut-il souligner que si nos génocidaires de Mauritanie avaient tiré des leçons des événements tragiques de 1989-91, ils ne nous auraient pas concocté ce recensement dont le seul but est de parachever, entre autres choses, leurs sales besognes commencées en 1989. Ce sont ces mêmes racistes chauvins qui ont joué et continuent de jouer du dilatoire pour freiner autant que possible les rapatriements des réfugiés mauritaniens du Sénégal. Le HCNUR, pour des raisons diplomatiques ne dénoncera certainement pas ces pratiques dilatoires, mais il n’ignore pas que les autorités mauritaniennes, sans aucune raison valable, auront décidé d’arrêter, plus d’une fois et pendant presque deux années cumulées, les opérations de rapatriement des réfugiés mauritaniens au Sénégal prévues dans le cadre de l’accord tripartite susmentionné. Après maintes réunions reportées de la commission tripartite chargée des opérations de rapatriement, de rendez-vous manqués, de faux-fuyants dont sont responsables les autorités mauritaniennes, finalement celles-ci proposeront une stratégie, qui sera approuvée lors de la rencontre tripartite tenue à Dakar le 19 octobre 2011, concernant le rapatriement de 6691 réfugiés mauritaniens au Sénégal qui prendra fin en 2012. Les manifestations récurrentes des réfugiés mauritaniens au Sénégal et les pressions discrètes du HCNUR ont eu raison de la mauvaise volonté des autorités mauritaniennes qui auront usé de méthodes dilatoires jusqu’au bout. Le comportement des autorités mauritaniennes apparait ici comme un sabotage de tout le processus de rapatriement et ceci tant au regard de la situation désastreuse que l’on fait vivre aux rapatriés mauritaniens retournés chez eux, qu’au regard du doute et du découragement qu’elles ont suscités chez les réfugiés mauritaniens qui ont choisi de rester au Sénégal, en attendant un contexte politique favorable, pour envisager le retour dans leurs pays. Si le régime du Général Abdel Aziz pense avoir, par ces méthodes dignes de la Gestapo, réussi à éloigner définitivement de leur pays, les réfugiés mauritaniens restés au Sénégal, il s’est lourdement trompé. Ces réfugiés ont fait l’objet d’un recensement au Sénégal qui a débuté en mai 2011 et qui est toujours en cours et au terme duquel, ils bénéficieront de documents biométriques de réfugiés. Par ailleurs, s’il est vrai, selon Monsieur Loubaki, représentant régional adjoint du HCNUR à Dakar, que son institution a « signé un mémorandum avec l’Etat du Sénégal, depuis le mois de juillet dernier pour délivrer la carte d’identité sénégalaise à ceux qui le souhaitent » (cf. quotidien Enquête no 107.vendredi 14
octobre 2011), il n’en demeurera pas moins que nous nous battrons, jusqu’à notre dernière énergie, pour qu’aucune naturalisation d’un quelconque réfugié mauritanien ne soit une réalité. D’où la création, de notre part, du cadre de concertation des réfugiés mauritaniens au
Sénégal comme cela été décidé lors de l’Assemblée générale annuelle des réfugiés mauritaniens au Sénégal tenue, dans le département de Richard Toll, le 10 avril 2011, dans le site de réfugiés de Thiabakh. Nous restons vigilants, car dans l’article ici cité du quotidien sénégalais, on y décèle des contradictions. En effet, il y est écrit par-ci par-là que « trois options s’offrent aux réfugiés mauritaniens. Ils ont la possibilité de choisir le rapatriement volontaire, l’intégration locale ou la réinstallation ». On peut lire aussi plus loin, dans le même quotidien que « ceux qui ont opté de rester au Sénégal vont être naturalisés », bien entendu, on parle toujours des réfugiés mauritaniens dans ce pays. Par, ailleurs, dans le contexte préélectoral trouble au Sénégal, à l’approche de l’élection présidentielle de février 2012, nous souhaitons vivement que les réfugiés mauritaniens soient tenus à l’écart de ces enjeux politiques sénégalo-sénégalais, leurs naturalisations en tant que sénégalais pourraient être source d’inquiétudes. Toutefois, notre souci majeur reste que les réfugiés mauritaniens ne fassent pas le jeu de la politique raciste des régimes politiques mauritaniens qui, après les déportations massives des années 1989-91, usent d’un recensement discriminatoire et de pratiques dilatoires, pour se tailler une majorité démographique en faveur des arabo-berbères de Mauritanie, en vue de justifier et de conforter leur politique d’exclusion et de domination des négro-mauritaniens. Dans ce contexte, nous appelons tous les mauritaniens où qu’ils se trouvent à prendre contact avec leurs proches ou parents réfugiés au Sénégal pour les dissuader d’accepter toute démarche visant à leur absorption par le Sénégal. Nous ne renions pas notre identité ethnique, toutefois nous ne la revendiquerons pas au détriment de notre citoyenneté mauritanienne. Ces propos, nous sont inspirés par ceux tenus par l’ancien représentant du HCR chargé des affaires et des opérations pour l’Afrique occidentale, orientale et centrale. Il s’agit de Monsieur Albert Alain Peter qui justifie le gel de l’assistance aux réfugiés mauritaniens au Sénégal, en 1995, par le fait que ces réfugiés n’avaient pas de statuts et bien qu’ils soient « des étrangers installés au Sénégal et au Mali….ils se sont confondus avec la masse…ce sont les mêmes populations qui parlent les mêmes langues… ». (cf. jeune Afrique numéro 1882 de janvier-février 1997). Il faut dire qu’à cette époque, les pressions diplomatiques étaient très fortes sur le HCNUR, le lobbying auprès de certaines chancelleries occidentales avaient porté ses fruits. Ainsi, la tendance à vouloir faire absorber les réfugiés mauritaniens par leur pays d’exil ou à les faire revenir discrètement, individuellement, en catimini chez eux, contre l’idée de tout retour organisé, était bien la tendance dominante. Vous comprendrez alors toute notre vigilance. Une vigilance que nous devons maintenir, eu égard aux déclarations officielles du ministre mauritanien de l’intérieur et de la décentralisation, Monsieur Mohamed ould Boillil qui prétend, contre toute évidence, qu’il n’existe pas de réfugiés mauritaniens au Mali. Qu’en pense le HCNUR qui a annoncé avoir enregistré près de 10.000 réfugiés mauritaniens au Mali ? Pour faire avaler une telle couleuvre, prêtez-nous l’expression, les autorités de Nouakchott compte sûrement sur leur lobbying en direction des occidentaux à qui le régime du Général Abdel Aziz tente de vendre sa coopération jugée exemplaire contre le terrorisme islamiste de Al Qu’Aïda qui sévit dans la zone sahélo-saharienne. Ce qui lui permettra, croit-il, de légitimer tous ses forfaits, aux yeux de ses partenaires occidentaux. La communauté internationale se doit de ne pas être complaisante avec le régime miliaire du Général Abdel Aziz qui s’est taillé sur mesure les habits d’un régime civil et démocratique, en utilisant et en abusant des accords de Dakar de juin 2009, qu’il sera amené à rejeter par la suite. Des accords qu’il avait pourtant cosignés avec les adversaires à son coup d’état. Ces accords étaient parrainés par la communauté internationale grâce à la médiation du groupe contact sur la Mauritanie et étaient censés sortir le pays d’une longue crise politique consécutive au coup d’état contre le régime démocratiquement élu de Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi. Ces accords auraient permis le retour à l’ordre constitutionnel démocratique, grâce à l’organisation d’élections générales sur une base consensuelle et grâce aussi à l’ouverture d’un dialogue inclusif impliquant toutes les parties prenantes et pouvant porter sur toutes les questions jugées d’intérêt national. Ce dialogue devant continuer même après l’élection présidentielle qui avait été prévue en juillet 2009. Après, plus de deux années de tergiversations face à son opposition qui exige le respect des accords de Dakar, comme base de tout dialogue politique, en vue d’assoir une véritable démocratie en Mauritanie et de pacifier l’espace politique, voilà que le régime de Abdel Aziz appelle à un dialogue politique lancé le 17 septembre 2011 dont il a fixé unilatéralement les règles. Les conclusions de ce dialogue intéressent très peu de mauritaniens. Et n’intéressent, surtout pas les partis de l’opposition les plus représentatives au parlement mauritanien qui n’ont pas participé à ce dialogue jugé « de farce ». Elle a été conduite logiquement à en rejeter tous les résultats. C’est le cas du parti du Rassemblement des forces démocratiques d’Ahmed Daddah et de l’Union des forces du progrès de Mohamed ould Mouloud. D’aucuns, d’ailleurs, pensent que ce recensement tant décrié n’est qu’un moyen de divertir dangereusement les populations mauritaniennes qui comprennent de mieux en mieux les enjeux politiques relatifs à l’établissement des documents d’état civil ; ils savent que c’est de ces documents que dépendent leur reconnaissance en tant que citoyens et qu’à ce titre, ils pourront exercer et revendiquer en toute liberté leurs droits civils, civiques et culturels... Savez-vous qu’en Mauritanie, des centaines de milliers d’esclaves de la communauté harratine n’ont pas de documents d’état civil ? Ceci dit en passant, les militants antiesclavagistes font l’objet, en ces périodes, d’une répression farouche de la part de la soldatesque du Général Abdel Aziz et ceci malgré le vote d’une loi législative, en aout 2007, criminalisant l’esclavage. Rien d’étonnant à cela, lorsque le chef d’état de fait du pays prétend que : « est esclave, qui le veut ».
De ce qui précède, il ressort que la question du recensement est un enjeu de taille tant au plan politique qu’au plan ethnoculturel. Il est utile de souligner que c’est de la fiabilité des documents de l’état civil en Mauritanie, grâce à un recensement dont aucun citoyen mauritanien ne serait exclu que dépendra tout naturellement l’organisation d’élections libres et transparentes qui sont les caractéristiques les plus évidents de la démocratie moderne. La Mauritanie doit s’inspirer de la crise ivoirienne, pour éviter le pire. Alors, nous appelons la communauté internationale à se pencher sur la situation sociopolitique dangereuse de la Mauritanie qui témoigne de l’échec du régime politique du Général Mohamed Ould Abdel Aziz à rétablir l’ordre démocratique et la paix civile qui régnaient avant son putsch d’aout 2008 qui est à l’origine du renversement du régime du président démocratiquement élu, Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi. Ce dernier, au lendemain de son accession au pouvoir le 25 mars 2007, avait entamé un processus de réconciliation nationale qui devait régler la question des graves violations des droits de l’homme nés des événements tragiques dits de 89, que nous avons largement commentés . Cette réconciliation nationale a été sacrifiée par le régime militaire du Général Abdel Aziz qui, aujourd’hui, pour faire bonne figure, a revêtu les dehors d’un régime civil démocratique. Sa gestion unilatérale et périlleuse de la chose publique est source de nombreuses tensions et d’instabilité qui menacent l’existence même de l’Etat mauritanien, la contestation gronde partout, nous demandons l’intervention de la communauté internationale en Mauritanie, pour nous éviter le pire.
Moustapha Touré
Dakar, le 31 octobre 2011.
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