Initiative pour la Résurgence du mouvement
Abolitionniste (IRA)
Communiqué de presse
L'article
controversé du jeune Mohamed Cheikh Ould Lemkheityr a été à l'origine d'une
telle agitation qu'il nous a paru utile, en notre qualité d'organisation
opérant dans le domaine des droits de l'homme, de préciser, aux yeux de
l'opinion nationale et internationale notre position, notre vision et nos
revendications en la matière.
Nous
dénonçons, au sein de l'Initiative pour la Résurgence du mouvement
Abolitionniste (IRA), toute atteinte à l'image d'Allah, grand et
miséricordieux, ou à Son prophète, paix soit sur lui. Sous aucun prétexte nous
ne pourrons admettre la remise en cause de la justice du Prophète, paix soit
sur lui. De la même façon, il nous est insupportable de voir que des foules
hystériques s'apprêtent à rendre justice et à s'ériger en juges à la place des
juges pour énoncer des verdicts à l'encontre d'individus ou de groupes
d'individus. C'est ainsi qu'il nous a été donné d'apprendre qu'un homme
d'affaires avait, publiquement, mis à prix la tête de l'auteur de l'article
controversé ouvrant la voie à toute sorte de surenchère et remettant clairement
en cause la confiance que les citoyens devraient avoir en leur système
judiciaire et le monopôle de la violence que l'Etat devrait avoir en toute
exclusivité. L'Etat aurait dû mettre un frein net et définitif à cette
dangereuse tendance en arrêtant le dit homme d'affaires et en reprenant son
rôle de seul dépositaire de la justice et de la défense de l'intérêt commun.
Dans
le même ordre d'idée, nous avons appris par l'intermédiaire de déclarations
audio d'un prêcheur de notoriété publique qu'un certain nombre de personnes
avaient exprimé leur disponibilité pour mettre à mort l'auteur de l'article en
question. C'est là aussi une preuve supplémentaire de la défection de l'Etat et
de l'abandon de son rôle premier et consubstantiel de régulateur des affaires publiques. C'est
là une situation inacceptable faite d'anarchie, de prolifération des forces obscurantistes et de justice de
rue qui met en danger mortel l'avenir du pays et l'essence même de la
citoyenneté.
Nous
relevons, par la même occasion, les appels pathétiques, lancés par l'un des
prétendus journalistes n'ayant jamais brillé par son intelligence, à
constituer des milices civiles qu'il
dénommerait " l'Armée d'Allah" pour défendre nos soit disant
"fondamentaux religieux". Il y a là un dangereux précédent et un défi
inacceptable lancé à l'autorité de l'Etat et qui autoriserait tout un chacun à
tuer ou à sévir en fonction de sa propre acception de la religion. L'Etat
aurait dû interpeler le dénommé Abdel Vettah Ould Abeidna pour de tels
agissements qui ne font que confirmer les antécédents connus du personnage.
Considérant l'ensemble des éléments
précédents, nous, au sein d'IRA:
1-
réitérons, comme nous l'avions fait lors de notre dernière conférence de presse
tenue le jour de l'arrestation de Ould Emkheityr, notre ferme condamnation de
toute atteinte à l'image du Prophète, paix soit sur lui;
2-
condamnons avec la même véhémence tous les appels au meurtre lancés contre le
jeune Ould Emkheityr ainsi que les incitations à lever des milices privées à
cette fin. De tels agissements mettent en grand danger la paix sociale et la
cohésion nationale.
3-
exigeons de l'Etat qu'il mette fin aux tribunaux de rue et qu'il assume ses
responsabilités de seul dépositaire de la violence et seule source de justice;
4-
refusons les appels au meurtre ou au châtiment de Ould Emkheityr. De tels
appels, proférés au nom de l'Islam, ne font qu'assombrir l'image de notre
religion, faite d'amour et de tolérance conformément à la vie du Prophète, paix
soit sur lui. Nous nous appuyons en cela sur la Fatwa de l'érudit et penseur
musulman, Mohamed El mokhtar Echeinguiti, qui interdit la mise à mort des
apostats mais aussi sur l'ensemble des conventions et traités que la République
Islamique de Mauritanie a signés en matière de droits humains;
5-
nous nous étonnons de l'usage systématique, tout au long de notre histoire, de
la religion pour marginaliser la caste des "forgerons" et la
communauté des Hratine alors que la même religion aurait dû être utilisée pour
réhabiliter et affranchir de tels groupes sociaux.
6-
nous sommes persuadés que ce battage organisé contre la personne de Ould
Emkheityr est complètement étranger à toute idée de piété ou d'exercice de
notre sainte religion. Nul n'est dupe du fait que si l'intéressé n'était pas
descendant du groupe socialement méprisé des M'almine (forgerons), l'intensité d'une telle campagne
aurait été bien plus faible. Nous évoquons pour preuve de cette affirmation le
cas de jeunes issus de la "noblesse" qui furent, il y a quelques
années, interpelés pour apostasie et conversion au christianisme puis relâchés
sans autre forme de procès. Nous nous
rappelons aussi, à cette occasion, le qualificatif de "modeste
présent" utilisé par un élément de la "noblesse mauritanienne"
pour désigner le saint Coran sans que cela n’ait provoqué de vagues de
l'ampleur du tsunami que nous vivons actuellement. Une autre personnalité de
noble extraction avait, du temps de Moawya Ould Taya, menacé les Imams
velléitaires de convertir leur mosquée en boulangerie sans qu'aucune personne n’ait
pensé à demander sa tête. En fin, nous pouvons constater que les listes d'amis
de Ould Emkheityr sur les réseaux sociaux ont été systématiquement épurées des
patronymes des fils de "grandes
tentes" pour laisser le "forgeron" affronter tout seul l'ire et
la vindicte populaire.
7-
Nous relevons, pour notre part, que l'intéressé avait, lors d'un écrit rendu
public après la parution de son article controversé, exprimé ses regrets ce
qui, du point de vue de la loi mauritanienne, le disculpe du crime de
l'apostasie.
La Commission de Communication
Nouakchott le 13 janvier 2014
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