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lundi 8 octobre 2012

Première sortie publique de Birame Ould Dah Ould Abeid



 
Déçu par la classe politique, IRA réfléchit sur un parti politique
Le président de l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) Birame Ould Dah Ould Abeid a signé sa première sortie publique depuis sa libération. C’était la nuit du vendredi 5 octobre 2012 à Teyarett, en présence des membres de la section locale, mais également de plusieurs leaders et cadres du mouvement venus de l’intérieur du pays et de l’extérieur. L’occasion pour le leader antiesclavagiste de tirer à boulets rouges sur la classe politique mauritanienne, toute tendance confondue, sur la presse, sur les érudits et sur tous ceux qui selon son expression «ont cherché à l’enterrer vivant » après son autodafé des livres malékites. Pour riposter, IRA compte créer un parti politique et s’engager dans la lutte syndicale.  Mais Birame déclare qu’il ne s’engagera pas dans l’action politique, préférant maintenir son combat comme défenseur des droits de l’homme.
Le moment fort de l’intervention de Birame Ould Dah Ould Abeid, lors de sa première apparition publique, le vendredi 5 octobre 2012, soit un mois presque depuis sa sortie de prison, fut sans doute cette déception exprimée vis-à-vis de la classe politique mauritanienne, de sa presse et de ses érudits. Birame trouve enfin de compte que l’opposition prétendument opposée à Ould Abdel Aziz n’est en réalité qu’une «opposition dans le système », mais pas contre le système. La classe politique actuelle, la majorité comme l’opposition, ne serait à ses yeux que le même fruit issu de la même graine, divergente dans la conquête du pouvoir mais solidaire dans le maintien en l’état du système féodal prédominant. Pire, cette classe politique à ses yeux est dangereuse pour la cohésion nationale. L’entêtement du pouvoir et de son clergé à nier l’existence de l’esclavage au lieu de le combattre et de sanctionner les maîtres esclavagistes constitue selon Birame le véritable déclencheur d’un conflit social éventuel en Mauritanie. Le comportement des hommes politiques, dans les jours qui ont suivi son autodafé des livres malékites, en appelant au meurtre, constitue également d’après lui les catalyseurs d’une révolution que la Mauritanie a su éviter de justesse grâce à la clairvoyance et à l’esprit patriotique de la Cour criminelle et de son président.
Cette déception vis-à-vis de la classe politique serait selon Birame les raisons qui ont poussé les cadres de IRA à réfléchir sur l’élargissement de la lutte sur le terrain politique et syndical. Un parti politique revendiquant la philosophie du mouvement serait ainsi en gestation et permettra au peuple mauritanien, selon Birame, de se débarrasser de l’actuelle classe politique. Mais le leader de  IRA a précisé d’emblée qu’il ne sera jamais candidat à un poste électif et ne briguera jamais une fonction politique. L’aile politique que l’initiative compte créer aura ainsi ses propres structures. Birame pour sa part a déclaré qu’il poursuivra son combat exclusivement dans le champ des droits de l’Homme, affirmant ne tirer aucun avantage sur le terrain politique.
Le divorce semble ainsi consommé entre IRA et la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) comme est enterré le Conseil national de transition qui devait déclencher le Printemps de la révolution mauritanienne.
Birame est revenu dans son intervention sur sa lutte pacifique pour le changement des mentalités, pour l’avènement d’une Mauritanie égalitaire et juste, débarrassé de l’esclavage et de ses tares, mais aussi de l’esprit de domination et de classe.
Auparavant, la manifestation populaire organisée à son intention a été caractérisée par une animation musicale assurée par un groupe de jeunes rappeurs. Un monde fou s’était agglutiné depuis les premières heures de cette nuit du vendredi 5 octobre 2012, au quartier Pikine à Teyarett. Tout un parterre d’hommes et de femmes était assis sur des chaises ou par terre, dans un espace public aménagé à cet effet. Une masse excitée qui attendait avec impatience l’arrivée du président IRA, le voir de près et l’entendre après quatre mois de prison. Une sortie publique, la première depuis sa libération, saluée comme un honneur par les membres de la section IRA de Teyarett.  Enfin, une ambiance festive et bon enfant qui régna plusieurs heures avant le grand show. Les principaux cadres du mouvement confortablement, installés sur une tribune improvisée, des envolées de jeunes filles aux voiles blancs, la tête surmontée d’une casquette à l’effigie du mouvement, jouant aux hôtesses de service, des jeunes du mouvement tentant de contenir une foule électrisée…Tout cela augurait d’un retour en force de IRA sur la scène nationale. L’arrivée aux environs de 21 heures 30, de Birame et de son épouse, électrisa la foule, fouetta les ardeurs et installé une sourde clameur que les orateurs ont eu mal à éteindre. D’ailleurs, Birame a eu beaucoup de mal à se frayer un chemin jusqu’à la tribune. Les gardes du corps étaient débordés par la masse d’admirateurs qui cherchaient à se frotter à Brame. A la clameur de la foule en liesse se mêlaient les Youyous stridents des femmes.
Plusieurs orateurs s’étaient succédé au micro avant Birame. C’est le cas de Brahim Sow de la section Europe, Abdel Aziz Kane, représentant de Touche pas à ma nationalité, Brahim Ould Abeid, vice-président de IRA, Dr.Ely Ould Rava, qui glosa sur les concepts religieux mal conceptualisés en Mauritanie et les contenus presque blasphématoires des livre de Khalil, ces ouvrages référentiels du Fiqh malékite local que Birame avait incinéré le 27 avril 2012 à Riadh, provoquant l’anathème. Un geste qui sera exploité par les autorités pour le mettre en prison, lui et sept de ses lieutenants. Puis, le procès devant la Cour criminelle et la nullité attestée des procédures. Au lieu d’être libérés, les détenus d’IRA seront cependant maintenus en prison par le parquet de la République qui refusera de suivre la décision de la cour criminelle. Le 3 septembre 2012, Birame et ses amis sont libérés.
Toute cette péripétie d’aventures servira de filigrane dans l’intervention fleuve que Birame réserva à ses partisans. D’emblée, il avait demandé une minute de silence et de recueillement pour le repos de l’âme du jeune Hassane Ould Brahim, mort en prison sous la torture. La quadrature du cercle.
Cheikh Aïdara

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