UNITED NATIONS 8 septembre
2013 Communiqué de presse
Texte intégral du communiqué de presse
du Rapporteur Spécial des Nations Unies sur les Formes Contemporaines de
Racisme, de Discrimination Raciale, de Xénophobie et de l'Intolérance y
associée
M. Mutuma Ruteere, le 8 Septembre 2013
à Nouakchott, en Mauritanie
Mesdames et Messieurs, J'ai entrepris
une visite officielle en Mauritanie du 2 au 8 septembre 2013 en Mauritanie.
Lors de ma visite, j'ai tenu des réunions à Nouakchott, Rosso et Kaédi. J'ai
rencontré les plus hauts représentants du Gouvernement, au niveau national et
local, ainsi que des représentants de la société civile, les organisations non
gouvernementales, les défenseurs des droits de l’homme, les victimes de
violations des droits de l’homme, y compris les pratiques analogues à
l'esclavage et la discrimination raciale. Je tiens à remercier le Gouvernement
mauritanien pour l'invitation qui m’a été adressée et à la coopération franche
avant et pendant ma visite. Je tiens à remercier toutes les autorités que j'ai
rencontrées pour leur perspicacité et les riches discussions que j'ai eues avec
eux. Je suis également reconnaissant pour les échanges fructueux avec les
organisations de la société civile et avec les victimes qui ont courageusement
partagé leurs histoires avec moi. Je tiens également à remercier l’équipe- Pays
des Nations Unies, et en particulier le Bureau du Haut Commissaire aux Droits
de l'Homme, pour leur précieux soutien et les séances de travail que j'ai eues
avec eux. Je suis venu en Mauritanie pour évaluer les progrès réalisés depuis
la dernière visite de mon prédécesseur dans le pays en 2008, obtenir une
compréhension nouvelle de la situation dans le pays et identifier les défis qui
subsistent pour l'élimination du racisme et de la discrimination raciale. J'ai
aussi l'intention de m'engager de manière constructive avec le Gouvernement
afin de trouver les moyens d'assurer la réalisation réussie des lois, des
politiques et mesures prises dans la lutte contre le racisme, la discrimination
raciale, la xénophobie et l'intolérance et de formuler des recommandations pour
aider le Gouvernement à lutter efficacement contre le racisme et la
discrimination. Je tiens à souligner que cette visite de suivi est une
excellente occasion d’évaluer la conformité de la Mauritanie avec ses
obligations internationales et la mise en œuvre des recommandations formulées
par les différents mécanismes des droits de l’homme. À cet égard, permettez-moi
d'abord de féliciter le Gouvernement d'avoir adhéré à de nombreux instruments
internationaux relatifs aux droits humains. La coopération entre la Mauritanie
et les mécanismes internationaux des droits humains, des procédures spéciales,
des organes conventionnels et l’EPU, doit également être reconnue. Il ne fait
aucun doute qu'il ya eu de réels progrès dans la mise en oeuvre de certaines
des recommandations formulées par les mécanismes des droits de l'homme, à
savoir la création d'une Commission Nationale des Droits de l'Homme,
l'amendement de la Constitution pour reconnaître la diversité ethno- culturelle
du pays, l'adoption de la loi sur l'esclavage, pour n'en citer que
quelques-uns.
Cependant, un certain nombre de défis
persiste et devrait être traité comme une question de priorité. Le processus
d'élaboration du plan d'action national contre la discrimination raciale qui
vient de commencer est également une autre étape positive et on doit accorder
au Gouvernement l’opportunité de s’engager dans cette voie. Cependant, le plan
national d'action doit être fondé sur une analyse approfondie, une évaluation
de tous les aspects de la discrimination dans le pays, le processus
d'élaboration du plan doit être inclusive et participative afin que toutes les
parties concernées puissent en revendiquer la propriété et surveiller sa mise
en oeuvre ; le résultat de ce processus doit être suffisamment concret pour
être mesurable. J'ai moi-même observé, lors de l'atelier organisé par le
Gouvernement et le Haut Commissariat aux Droits de l’Homme, mardi dernier,
combien les questions liées à la discrimination préoccupent les cœurs et les
esprits des gens et c'est pourquoi il est d'autant plus important que tous les
acteurs puissent échanger et débattre sur le contenu du plan d'action. Une
évaluation approfondie ne peut être entreprise sans statistiques ventilées
selon l'ascendance ou l'origine ethnique, le sexe et l’âge, comme le CERD l’a
recommandé en 2004, la collecte de ces statistiques devrait être basée sur
l'auto -identification. L'absence de données ventilées par origine ethnique
rend difficile la détermination de la situation des groupes marginalisés et
l’évaluation des progrès accomplis dans la lutte contre la discrimination et
l'exclusion. Sans les données et les indicateurs de base il est difficile
d'évaluer si les programmes de développement, mis en place par le Gouvernement,
qui sont absolument importants et nécessaires, ont un impact sur les résultats
dans l’amélioration des conditions de vie de ces groupes historiquement
discriminés. Bien conscient que les données doivent être utilisées
judicieusement , il est essentiel que l'Etat démontre sa volonté politique en
investissant dans des études indépendantes , l'évaluation et les enquêtes qui
peuvent contribuer à analyser la situation, suivre les progrès et évaluer les
résultats.
Les agences des Nations Unies et les
donateurs bilatéraux sont encouragés à soutenir le gouvernement dans cette
entreprise. Tout en saluant les progrès réalisés dans l'adoption de différents
textes de loi et à la création des institutions nécessaires à la lutte contre
la discrimination et les pratiques analogues à l'esclavage, je constate qu'il y
a des défis importants dans le rythme et l'application effective de la loi. En
conséquence, de nombreuses personnes perdent confiance dans ces institutions et
dans le système judiciaire. Il est nécessaire d'améliorer l'efficacité de ces
institutions dans la lutte contre les problèmes de discrimination et de gagner
la confiance du public dans leur efficacité et leur engagement à appliquer la
loi. Il faut également allouer des ressources adéquates aux institutions
concernées et renforcer leurs capacités et leurs compétences. À cet égard, j'ai
noté la promotion du concept de cohésion sociale comme une opportunité de
rationaliser et de concentrer les différents plans d'action et programmes
nationaux. J'encourage les différents ministères à inclure dans leurs budgets
annuels de ressources adéquates pour s'attaquer aux problèmes de discrimination
raciale, ethnique et caste ainsi que les pratiques analogues à l'esclavage dans
leurs domaines de responsabilité et de maintenir la poursuite de la coopération
avec les organismes compétents des Nations Unies, en particulier avec le Bureau
du Haut Commissaire aux Droits de l'Homme en Mauritanie.
Les efforts déployés pour mettre en œuvre l'Accord tripartite 2007, qui a permis le retour de plus de 24 000 Mauritaniens entre 2008 et 2012 sont remarquables. Pourtant, les souvenirs douloureux des événements de 1989 restent vivaces dans la vie des femmes, des hommes, beaucoup de filles et de garçons, qui ont perdu des êtres chers, des maisons, des terres et des papiers d'identité. J'ai entendu un certain nombre de préoccupations liées aux difficultés d'inscription, indemnisation et de réparation pour certains des rapatriés, la poursuite des conflits fonciers et l'absence de responsabilité pour les violations des droits humains commises à cette époque. Ces préoccupations doivent être inscrites d’urgence dans l'agenda de la réconciliation nationale et sont pré-requis pour la construction d' une société inclusive et diverse.
J'ai trouvé la stratification de la société mauritanienne très forte. Elle se manifeste à travers la discrimination au sein des lignes ethniques ou des castes. Elle entraine des coupures entre et au sein des communautés. La pauvreté réduit également l’égalité entre et au sein des communautés. Il est important de reconnaître que la pauvreté est la cause sous-jacente de la discrimination, que le Gouvernement a tenté de réduire en investissant essentiellement dans des programmes afin d'élever les groupes historiquement marginalisés de la pauvreté. L'amélioration des conditions de vie, même si elle est pleinement atteinte, ne peut pas cependant, nécessairement éradiquer toutes les formes de discrimination. Comme mon prédécesseur l’a trouvé, bien que la discrimination ne se trouve pas dans l’esprit de la loi, de facto, de nombreuses personnes estiment qu'ils ne disposent pas de l'égalité des chances vis-à- vis de l’éducation, l'emploi, les opportunités d’affaires. Par exemple la langue est perçue comme un moyen de domination de certains groupes au détriment d'autres. La réforme à introduire le bilinguisme dans l'éducation est louable, mais le pays a besoin de passer à un bilinguisme efficace pour assurer l'égalité des chances pour tous. A côté du bilinguisme, il est important que les autres langues soient promues et enseignées. Une autre manifestation de l'exclusion ressentie par certains groupes que j'ai entendue régulièrement, c'est la diversité insuffisante au niveau des postes clés du gouvernement et de l'administration publique. L'inclusion de tous les groupes dans tous les secteurs de l'administration et de l'économie privée est essentielle à la promotion de la démocratie, la réconciliation et la cohésion nationale. Bien que l'esclavage a été interdit, il ya encore des personnes qui sont victimes de pratiques analogues à l’esclavage. Les femmes et les filles dans de telles conditions continuent d'être particulièrement vulnérables et soumises à diverses formes de violence, notamment la violence sexuelle. Les cadres institutionnels et juridiques doivent être mis en place afin que les responsables soient tenus de rendre compte de leurs crimes. Un amendement de la loi anti- esclavage 2007 doit être fait afin de fournir des capacités à des ONG d’agir au nom des victimes de l'esclavage comme pratique, pourrait être un moyen de lutter contre l'impunité pour ces violations des droits de l'homme. En outre, des services de soutien pour ceux libérés de conditions analogues à l'esclavage restent limités et doivent renforcés. Ce sont mes conclusions préliminaires après avoir passé huit jours dans le pays. Je présenterais mon rapport au Conseil des Droits de l'Homme en Juin 2014 et j’espère continuer le dialogue constructif engagé sur l’ensemble des questions avec le Gouvernement.
Les efforts déployés pour mettre en œuvre l'Accord tripartite 2007, qui a permis le retour de plus de 24 000 Mauritaniens entre 2008 et 2012 sont remarquables. Pourtant, les souvenirs douloureux des événements de 1989 restent vivaces dans la vie des femmes, des hommes, beaucoup de filles et de garçons, qui ont perdu des êtres chers, des maisons, des terres et des papiers d'identité. J'ai entendu un certain nombre de préoccupations liées aux difficultés d'inscription, indemnisation et de réparation pour certains des rapatriés, la poursuite des conflits fonciers et l'absence de responsabilité pour les violations des droits humains commises à cette époque. Ces préoccupations doivent être inscrites d’urgence dans l'agenda de la réconciliation nationale et sont pré-requis pour la construction d' une société inclusive et diverse.
J'ai trouvé la stratification de la société mauritanienne très forte. Elle se manifeste à travers la discrimination au sein des lignes ethniques ou des castes. Elle entraine des coupures entre et au sein des communautés. La pauvreté réduit également l’égalité entre et au sein des communautés. Il est important de reconnaître que la pauvreté est la cause sous-jacente de la discrimination, que le Gouvernement a tenté de réduire en investissant essentiellement dans des programmes afin d'élever les groupes historiquement marginalisés de la pauvreté. L'amélioration des conditions de vie, même si elle est pleinement atteinte, ne peut pas cependant, nécessairement éradiquer toutes les formes de discrimination. Comme mon prédécesseur l’a trouvé, bien que la discrimination ne se trouve pas dans l’esprit de la loi, de facto, de nombreuses personnes estiment qu'ils ne disposent pas de l'égalité des chances vis-à- vis de l’éducation, l'emploi, les opportunités d’affaires. Par exemple la langue est perçue comme un moyen de domination de certains groupes au détriment d'autres. La réforme à introduire le bilinguisme dans l'éducation est louable, mais le pays a besoin de passer à un bilinguisme efficace pour assurer l'égalité des chances pour tous. A côté du bilinguisme, il est important que les autres langues soient promues et enseignées. Une autre manifestation de l'exclusion ressentie par certains groupes que j'ai entendue régulièrement, c'est la diversité insuffisante au niveau des postes clés du gouvernement et de l'administration publique. L'inclusion de tous les groupes dans tous les secteurs de l'administration et de l'économie privée est essentielle à la promotion de la démocratie, la réconciliation et la cohésion nationale. Bien que l'esclavage a été interdit, il ya encore des personnes qui sont victimes de pratiques analogues à l’esclavage. Les femmes et les filles dans de telles conditions continuent d'être particulièrement vulnérables et soumises à diverses formes de violence, notamment la violence sexuelle. Les cadres institutionnels et juridiques doivent être mis en place afin que les responsables soient tenus de rendre compte de leurs crimes. Un amendement de la loi anti- esclavage 2007 doit être fait afin de fournir des capacités à des ONG d’agir au nom des victimes de l'esclavage comme pratique, pourrait être un moyen de lutter contre l'impunité pour ces violations des droits de l'homme. En outre, des services de soutien pour ceux libérés de conditions analogues à l'esclavage restent limités et doivent renforcés. Ce sont mes conclusions préliminaires après avoir passé huit jours dans le pays. Je présenterais mon rapport au Conseil des Droits de l'Homme en Juin 2014 et j’espère continuer le dialogue constructif engagé sur l’ensemble des questions avec le Gouvernement.
Merci de votre attention
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