A Monsieur le Président de la République
Islamique de Mauritanie,
Aux membres du Gouvernement de la République
Islamique de Mauritanie,
Aux membres de la diplomatie Mauritanienne,
Aux chancelleries étrangères en Mauritanie,
Aux élus de la République Islamique de
Mauritanie,
Aux ONG et représentants de la société civile
Mauritanienne,
Aux ONG internationales,
Note
d’alerte : Les mentalités féodales rongent les mauritaniens de l’intérieur
comme de l’extérieur.
Nous, associations et défenseurs des droits
humains basés à l’extérieur, interpellons les autorités mauritaniennes sur
certains faits graves liés aux mentalités féodales et au système des castes qui
minent la société Mauritanienne.
Depuis quelques années, en parallèle des
problématiques liées au racisme, à l'esclavage et à ses diverses séquelles,
nous assistons à des tensions graves au sein de nos communautés nationales de
la diaspora mauritanienne en Europe dont des cas avérés en France et en
Espagne.
En effet, il est connu de tout mauritanien
sincère, que la stratification sociale est transcommunautaire chez nous, et
certaines stigmatisations suivent les dits castés inférieurs (les ‘Komos’ en
langue Soninké ou esclaves et les ‘Niakhamalo’ regroupant griots, forgerons,
bucherons, cordonniers etc.) dans toutes nos structures ethniques. Aujourd’hui,
cet état de fait constitue le déclencheur d’une alerte inquiétante auprès de la
nouvelle génération d'extraction servile. Celle-ci refuse avec vigueur toutes
les velléités de domination venant des milieux féodaux, lesquelles sévissent
toujours même ici en occident, derrière les murs et surtout au sein
de nos structures villageoises.
En
Mauritanie, les tensions
liées à la féodalité réapparaissent comme un phénix à chaque
fois que les enjeux sont importants et
quand surtout ceux-ci impliquent des personnes d’extraction servile. Les illustrations ne
manquent pas : dans le
village de Goïnitt dans le
Guidimakha, la féodalité refuse
un projet de point d’eau
sous prétexte que
l’initiative leur vient des « komos »
ou esclaves ; dans celui de Testaye,
un autre projet de construction
d’une école « Medersa »
est bloqué par la féodalité toujours sous le même fallacieux prétexte que
la chefferie villageoise ne leur appartient pas, et
donc aucune attribution d’une aire ne pourrait être accordée aux anciens
esclaves « komos » peu importe
la faisabilité du projet. Cette
mentalité digne du code noir est à
combattre sur tous les fronts.
Les partis
politiques ne sont pas épargnés par le phénomène. Il arrive que
l’investiture d’une personne d’extraction
servile donne lieu à de vives tensions voire
de la transhumance politique. Certaines familles de la chefferie traditionnelle affirme sans complexe que : « Etre
maire, c’est comme être chef de
village ». Une telle mentalité ne
tend guère vers la paix
et la concorde sociale.
Ces dernières années, quelques bagarres ont
eu lieu entre ressortissants mauritaniens en France et en Espagne sur cette problématique.
La dernière en date s'était passée en Juin 2015 à Almeria en Espagne, où, à la
suite d'échanges acerbes entre deux ressortissants mauritaniens du milieu
soninké, l'un aurait traité l'autre de fils d'esclaves qui ose se rebeller.
Esseulé, le monsieur à l'esprit féodal et plus âgé, a voulu frapper le jeune
qui n’a cessé de se plaindre en se défendant de toutes ses forces. La suite des
événements a été marquée par l’intervention de la police alertée par le
voisinage.
En Juillet 2015, dans la région du
Guidimakha, département de Ould-Yengé, une bagarre similaire s’est produite.
Elle a impliqué des membres de la famille du Ministre de l’Education Nationale
dont la victime fut jetée en prison par abus de pouvoir, sans ménagement.
Le but de notre alerte est, avant que
l'irréparable ne se produise un jour dans nos communautés expatriées chez
lesquelles l'ignorance prédomine, de solliciter les pouvoirs publics
mauritaniens d'initier une campagne de sensibilisation et d'assistance dans le cadre de la lutte contre l’esclavage à
l’intérieur comme à l’extérieur.
Soucieux de l’impérieuse nécessité d’éradiquer
ce fléau afin de permettre un cadre de vie digne et démocratique, nous
demandons aux autorités Mauritaniennes :
De prescrire comme délit dans le code pénal
Mauritanien l’apologie de la notion de supériorité basée sur l’appartenance
sociale par des cadres, intellectuels et
autres (certains répondant au nom de chefferies villageoises) au même
titre que la loi incriminant
l'esclavage, et ce avec à la clef des amendes fortes, dissuasives afin
de changer les mentalités rétrogrades ;
de punir par la loi les apologistes
publics qui entretiennent à travers des
animations, des chants et des danses, les complexes de supériorité ou d’infériorité par le
biais des coutumes ancestrales : (Niaxamala,
Gawlo, Iguiw ou Griots etc.) au sein de
nos sociétés, tribus ou castes dont le seul but est d'humilier, de diminuer
l’Homme, et de lui soustraire des fonds par harcèlement verbal, moral ou
régler des comptes avec certaines
catégories de la société ; une situation de faits qui incite à la haine, au
mépris de l’autre, polluant ainsi l’ambiance naturelle au point de menacer la
sérénité, l’unité et la cohabitation entre
les citoyens ;
De lever les tabous autour de la féodalité et
ses corollaires ;
De prendre des mesures fortes et dissuasives
en cas de récidive : condamnation à des peines de prison ferme ;
D’intégrer, par amendement, dans les lois,
des actes concernant les questions spécifiques liées aux discriminations
féodales sur l'immatériel et le matériel
notamment sur le foncier régi sous un régime moyenâgeux dans certaines
contrées.
De nos jours, l’esclavage en
milieu de nos communautés noires est maquillé. Chacun pourrait lui donner les
couleurs qui lui conviennent à sa guise. Il est caché puisse qu’il n’est pas
physique. Il est appliqué en interne des familles qui en font leur socle de vie
de telle sorte que le rapport esclave-noble et autres castes de basse classe
composées des diverses catégories des ‘Niakhamalo’ (griots, forgerons,
bucherons, cordonniers etc.) est entretenu inconsciemment, ou naturellement, ou
de bon gré pour perdurer dans le temps. C’est l’esclavage de coutume entretenu
par les nobles de coutume.
Les conséquences de sa
nouvelle forme sur les rapports humains, que nous appelons communément les
séquelles, sont nombreuses. Le cas est tellement complexe que les autorités
doivent procéder à un diagnostique profond et minutieux pour atteindre le nœud
de la question afin de trouver la clef à la solution sur mesure et selon les
cas.
Les conflits récurrents dont certains,
ici, évoqués et d'autres étouffés,
ternissent l'image de la Mauritanie et contribuent à l'insécurité au sein de
notre communauté extérieure. En effet, la multiplication des conflits incitera
la presse étrangère à s'y intéresser, d'où une surexposition possible.
L’État mauritanien doit prendre ses
responsabilités tant sur le plan interne qu'externe : créer un arsenal
juridique dissuasif et mener une campagne de sensibilisation conséquente.
Les ONG
signataires :
ARMEPES-France:
Association des Ressortissants Mauritaniens pour l’Éradication des Pratiques
Esclavagistes et ses Séquelles
A.H.M.E :
Association des Haratine de Mauritanie en Europe
IRA-Mauritanie :
L’Initiative de Résurgence du Mouvement Abolitionniste
O.C.V.I.D.H :
Organisation Contre les Violations des Droits Humains en Mauritanie
Date : le 12 Août 2015
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