L’esclavage est une réalité concrète
en Mauritanie . Dans ce pays, il y 600 médecins (toutes spécialités
confondues) . Parmi ces derniers, 20 (vingt) sont des haratine . 580
sont répartis entre les Maures et les Négro-mauritaniens . Ce nombre de
vingt haratine est le fruit de la distribution des bourses extérieures
sous l’administration coloniale française et surtout sous le pouvoir
post-colonial de 1957 à ce jour . Les haratine en sont exclus du fait de
l’esclavage . Une caravane contre l’enseignement esclavagiste est
vitale pour dénoncer la sous-scolarisation des haratine et une
répartition des bourses internes et externes qui les défavorisent .
« Ce système, discriminatoire à plus
d’un titre, est une forme aberrante et continue de cooptation des
enfants des groupes dominants pour les bourses de formation et les
quotas dans les universités de par le monde au détriment des plus
humbles dont les Hratin sont les premiers. Cette politique est une
disqualification d’office des groupes serviles des postes dans les
secteurs publics et privés qui requièrent qualification et compétence. »
http://www.haratine.com/Site/ancien/article184.htm
Une vieille hartania, du nom de Keybi
Mint Sleymane installe un petit commerce dans un lieu éloigné entre
Akjoujt et Bénichad dans le but de subvenir aux besoins de ses enfants .
Cette contrée n’était jusque-là fréquentée que par les chacals, les
chameaux et les caravanes de passage . Il a suffi que son commerce
commence à prospérer pour que le sale préfet de Bénichad, à la personne
de Isselmou Ould Salem et son escadron de gendarmerie débarquent pour
démanteler sa baraque . http://haratine.com/Site/?p=1367
Cette arbitraire est l’un des visages de
l’esclavage . En effet, chaque fois qu’un abd ( esclave) ou un hartani
(affranchi) brave les difficultés de la nature et viabilise un espace
donné, l’appétit du Maure s’aiguise, aidé en cela par son complexe de
supériorité et le statut réservé aux Esclaves et aux Haratine . Dans
toutes les grandes villes de Mauritanie, les pauvres dans leurs
diversités, viennent s’agglutiner aux abords des centre-villes où ils
espèrent trouver un « mieux-être » . Ils sont repoussés toujours plus
loin dès lors que leurs emplacements deviennent rentables au regard des
affairistes maures.
Une caravane pour lutter contre la
distribution des terrains de l’habitat et aussi nécessaire car elle
montrera les injustices que vivent les haratine et les
Négro-mauritaniens dans le domaine du lotissement . On peut multiplier
les exemples qui couvrent tous les aspects de la vie où les haratine et
les Négro-mauritaniens subissent des injustices, des spoliations, des
extorsions et des sévices physiques des Maures, …
«La Mauritanie contemporaine,
indépendante depuis 1960 à peine, ne peut être décrite que comme une
communauté sadique, asociale, qui recouvre ses crimes du voile de sa
religion.» http://www.haratine.com/Site/ancien/article61.htm
Rappelez-vous les destructions des
townships en Afrique du Sud sous l’apartheid auxquelles se sont livrées
les forces du régime blanc . Il y avait là un triple buts : >
Récupérer des terres pour les besoins des racistes Blancs >
Désorganiser la lutte des Noirs contre l’apartheid > Éloigner les
Noirs en vue de contenir le danger beaucoup plus loin et ainsi protéger
la communauté blanche .
La communauté blanche d’Afrique du Sud
détenait 80% des terres arabes. Elle en détient toujours quasiment le
même pourcentage et ce, vingt ans après la suppression de l’apartheid.
La politique douce d’expropriation n’a pas contribué à une meilleure
distribution des terres.
Chaque fois qu’un groupe, une
communauté, une ethnie , … s’octroie des droits indus, elle est dans
l’obligation de lutter contre les victimes pour protéger les droits mal
acquis . C’est le cas en Mauritanie où la communauté maure (par le biais
de l’Etat) cantonne, éloigne et surveille la communauté noire et
particulièrement la composante haratine .
Ces différents aspects évoqués ci-haut
ne diminuent en rien la valeur de la caravane contre l’esclavage
foncier. Il montre simplement l’ampleur des tâches auxquelles les
abolitionnistes de l’esclavage et du racisme doivent faire face.
Une caravane contre l’esclavage foncier,
composée de plusieurs associations mauritaniennes, se rend dans la
vallée du fleuve Sénégal ( chëmamë ) pour dénoncer les expropriations
inégales, les accaparement des terres exploitées par les haratine et les
Négro-mauritaniens . De Rosso à Boghé, plusieurs adwaba, villages ont
été visités et des injustices dévoilées. Qu’il s’agisse de celles
relatives aux terres ou des charniers découverts. Le seul « tort » de
cette caravane contre l’esclavage foncier est d’avoir dévoilé des
vérités tues sur lesquelles reposent les intérêts et l’histoire récente
de la communauté maure. C’est la aussi où réside le courage de celle-ci
qui regroupe toutes les victimes haratine et négro-mauritaniennes.
Cette politique rampante d’expropriation
déguisée est le fait de la féodalité maure qui revendique des droits
ancestraux et de la bourgeoisie militaire qui s’est enrichie au
détriment du peuple depuis 1978 . Les populations de la chëmamë victimes
de ces spoliations sont diverses. D’abord, il y a des
Négro-mauritaniens qui détiennent des terres depuis plusieurs
générations. Ils en sont dépossédés progressivement . Ensuite, les
Castés négro-mauritaniens ( esclaves, griots, …) qui pratiquent le
métayage ( «cultives et partageons» en hal pulaar) auprès des détenteurs
de terre négro-mauritaniens. Il en est de même des haratine habitant
dans les villages ou villes négro-mauritaniens. Enfin, il y a les
expulsés de 1989 qui sont de retour et dont les terres ont été
confisquées au profit des Maures et haratine interposés . Derrière
chaque hartani ou abd (esclave), il y a un maure qui surveille de près
ou de loin.
Du coté maure, beaucoup de tribus
berbères et arabes détiennent des terres dans la chëmamë sur lesquelles
sont établis leurs esclaves . Il suffit de lire le livre de Moktar Ould
Daddah où il parle des esclaves de sa famille dans le chemame chez
lesquels ils se rendaient avec son père pour récupérer la récolte de mil
qui leur revient (La Mauritanie contre vents et marées D. Karthala,
2003 ) . N’oublions pas les Castés da la communauté maure, autres que
les Haratine (griots,forgerons…) et certaines tribus berbères et arabes
sans terre. Ensuite il y a des haratine qui ont acquis des terres depuis
longtemps par achat ou par héritage. Enfin il y a des haratine et des
esclaves sans terre qui se livrent au métayage auprès surtout des
maures.
Tout ce monde vit une situation
dramatique . En effet, le système de culture traditionnelle dépendant de
la crue et de la décrue a été largement perturbé par les barrages de
Manantali et de Diama . Les espaces anciennement cultivés regorgent
d’eau d’une manière continue . Seules les terres échappant aux petites
et moyennes crues sont accessibles aujourd’hui . Mais à qui ? A ceux qui
sucent l’État d’une manière ou d’une autre à savoir la féodalité maure
et la bourgeoisie militaire . A ces facteurs sont venus s’ajouter les
capitaux arabes du Maghreb (Maroc…) et du Machrek (Arabie Saoudite,
Qatar…) qui permettent l’exploitation de grandes superficies. Cette
politique contribue aux déplacements des populations entières et les
prive de leurs moyens de subsistances. La solution à ces problèmes
complexes réside dans l’élaboration d’une réforme foncière et domaniale
juste et équitable qui permet à tout un chacun de posséder un lopin de
terre où il pourra pratiquer une culture vivrière. Les expropriations
doivent être rares répondant à des critères objectifs et accompagnées
des indemnisations des propriétaires des terres.
L’ordonnance 83-127 du 5/06/1983 portant
réorganisation foncière et domaniale a été une première ébauche de
solution allant dans le bon sens. Mais elle a été torpillée par le
régime de Ould Taya. Elle peut constituer une base de travail mais il
faut aller beaucoup plus loin dans le sens de l’équité et de la justice.
Par exemple : Que faire des esclaves, des haratine, des castés
négro-mauritaniens et maures sans terre. Cette ordonnance a souffert de
deux réalités: D’une part, certains de ses articles se contredisent. Il
s’agit de l’article 3 « le système de la tenure traditionnelle est aboli
» et l’article 5 « les immatriculations foncières prises au nom des
chefs et notables sont réputés pour avoir été consenties à la
collectivité traditionnelle de rattachement » . En confiant la
distribution des terres aux chefs de tribu, l’Etat renforce le pouvoir
tribal sur les terres ancestrales. C’est la manière la plus cynique
d’exclure les Haratine et les Castés. D’autre part, le manque de volonté
politique lorsqu’il s’agit de l’esclavage, est une donnée structurelle
en Mauritanie. La nouvelle réforme doit respecter les espaces vitaux des
collectivités ( terrains de culture, de pâturage, de cimetière, les
forêts classées, … ) et surtout créer des coopératives villageoises que
l’Etat assiste en offrant des semences, des engrais et des tracteurs
pour éviter l’endettement des populations.
Dans cette nouvelle redistribution des terres, il ne faut pas oublier
les Oueds, El Batha, les lacs et les palmeraies… Ce qui aggrave les
injustices, c’est le fait que les terres appartenant aux maures ne sont
pas concernées par la réforme. Or, ce sont ces espaces sur lesquels
travaillent et suent beaucoup de Haratine sans contrepartie. Cette
fixation sur la chëmamë peut paraître comme un parti pris. Au retour de
la caravane contre l’esclavage foncier,elle est attaquée par un escadron
de gendarmerie à Rosso avec une sauvagerie rare qui est l’expression de
la nervosité maure et la désapprobation de l’action entreprise. De
nombreux militants ont été mis en prison et y subissent des tortures .
-AHME exige la libération immédiate et
sans conditions de l’ensemble des détenus -AHME met en garde l’État
Mauritanien contre toutes atteintes à l’intégrité physique ou morale des
détenus . Des nouvelles alarmantes relatives aux tortures nous
parviennent quotidiennement.
Paris le 23 novembre 2014
Mohamed Yahya Ould Cire
Président de A.H.M.E
Journal : Cri du Hartani
Site: www.haratine.com
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