La question qui mérite d’être posée est pourquoi la persistance de cette attitude du pouvoir mauritanien à marginaliser les Noirs.
En remontant le fil de l’histoire, nous remarquons que bien avant et depuis l’indépendance de la Mauritanie, il n’y a pas de volonté réelle du pouvoir de faire naître une unité nationale fondée sur la reconnaissance et le respect des différentes communautés du pays.
Les colons se sont appuyés sur les tribus maraboutiques maures pour dominer le pays. Ils leur ont accordé des faveurs et transmis le pouvoir. Le pouvoir maure, aujourd’hui entre les mains des Hassans (tribus guerrières maures d’origine arabe), continue à mépriser le Noir et tente à tout prix d’imposer une arabité douteuse à la Mauritanie. Le fondement de cette attitude de mépris des Noirs par les arabo-berbères remonte loin dans l’histoire. Il existe différents textes (livres et articles) les à ce sujet. Voir ceux de Mohamed Yahia Ould Ciré sur Haratine. com et d’autres.
Dans nos articles précédents, nous avons montré en quoi l’arabité de la Mauritanie, telle qu’elle est présenté à l’heure actuelle, était un peu tirée par les cheveux. Si le lien de ce pays avec le monde arabe est indéniable, la Mauritanie reste un pays composite.
Après les assassinats de 1989 et ceux d’avant, les déportations de la même année, voilà encore que les dirigeants maures du pays tentent, par tous les moyens, d’exclure la communauté noire.
Dans ce recensement en cours, on interroge les Noirs de la manière la plus indigne comme pour leur signifier qu’ils sont des citoyens hypothétiques, que leur mauritanité est entre les mains des Maures. Je renvoie sur cette question aux différents articles disponibles sur cette question.
Pour en comprendre la raison, il faut analyser les motivations de ceux qui dirigent le pays et le comportement des Noirs de Mauritanie.
En fait, dans la plupart des Etats africains, les dirigeants ne travaillent pas pour l’émergence de citoyens égaux en droits mais s’appuient sur les structures traditionnelles pour maintenir le pouvoir. C’est donc au nom d’une communauté que l’on gouverne. Cette logique est partagée par la plupart des acteurs politiques africains. Elle conduit à des catastrophes humanitaires : Rwanda, Mauritanie, Côte d’ivoire, etc.
L’origine coloniale de la naissance des Etats africains a fait que l’on a rassemblé, au sein d’Etats fictifs, des individus qui ne partagent aucune histoire commune, ni volonté de vivre ensemble, ni destin commun.
Le rôle des dirigeants africains postindépendances aurait dû être de créer des Etats où la citoyenneté serait au cœur de l’organisation de la cité. Malheureusement, en raison des intérêts égoïstes, de l’ignorance et du néocolonialisme, la plupart des dirigeants africains ont joué sur la carte des appartenances particulières pour gouverner.
Depuis l’indépendance de la Mauritanie, ce sont les Maures qui gouvernent et leur souci majeur est de légitimer leur pouvoir et d’asseoir l’arabité de la Mauritanie.
Dans leur raisonnement et pour justifier leur domination et leur politique d’arabisation, les dirigeants du pays au mille poètes anesthésiés tentent de prouver qu’il y a une majorité de Maures et d’Arabes en Mauritanie. Ainsi, ils usent de tous les subterfuges : Les Harratines, dans cette logique, sont considérés comme des maures alors que ce sont des anciens esclaves ou esclaves d’origine négro-africaine.
Aussi, chaque fois qu’il y a eu recensement, on n’en a jamais su les résultats. S’ils ont jusque-là été cachés c’est que, quelque part, il doit y avoir un problème par rapport aux dires et intentions de ceux qui gouvernent le pays. On comprend donc pourquoi ils tentent par tous moyens d’éliminer le maximum de noirs du comptage. Comme d’habitude, ils lèguent les sales besogne à un Noir. Cette fois-ci à un harratine Mohamed Ould Boilil, le Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation. Il ne faut pas oublier que des Négro-mauritaniens ( Noirs de Mauritanie, non Harratines ( esclaves affranchis maures ou esclaves maures au sens politique d’aujourd’hui) ont fait et font aussi les sales besognes à la place des Maures.
Comme nous l’avons déjà signalé dans d’autres articles, les Arabes de Mauritanie ne peuvent en aucun cas être majoritaires. La plupart des Maures sont d’origine berbère. Seule une minorité, d’entre eux, est d’origine arabe. Le reste de la population est d’origine négro-africaine. Il reste que les Berbères de Mauritanie sont tellement été aliénés qu’ils en reviennent à oublier leur origine. En Algérie, au Maroc, ce peuple revendique son indenté. Grâce à une lutte, le Berbère est devenu une langue nationale constitutionnelle au Maroc. Les Berbères en Algérie se battent depuis des siècles contre les différents envahisseurs (Romains, arabes, etc.) pour défendre leur culture, leur spécifité.
Une fois ces questions éclaircies, il convient d’analyser pourquoi la domination maure se pérennise en Mauritanie.
Les Noirs de Mauritanie aiment bien se justifier et se poser en victime. Mais les peuples ne sont jamais complètement innocents dans leur domination. Tout peuple, si minoritaire soit-il, s’il le souhaite, peut toujours poser les jalons de sa libération. On a vu la puissance américaine s’incliner devant les vietnamiens. On peut citer de nombreux autres exemples. Le Sud-Soudan noir après des années d’humiliation de la part des supposés arabes du Nord, a su conquérir sa liberté.
A notre avis, la domination des Noirs de Mauritanie est le résultat, en bonne partie, de leur lâcheté propre et couardise. Je regardais, il y a de cela quelque temps, une émission d’une des télévisions sénégalaises qui célébrait son anniversaire. Des mauritaniennes noires étaient invitées. Elles étaient toutes habillées en voile. Est-ce une tradition négro-africaine ? Ce comportement témoigne du fait que les Maures arrivent petit à petit, à cause de l’irresponsabilité noire à asseoir leur domination.
La plupart des militants mauritaniens ont la manie de flatter l’égo noir. L’analyse de leur discours non-dit peut se résumer à : on espère être libérés par d’autres que par nous-mêmes d’où cet activisme extérieur sans ancrage intérieur. On masque ainsi la pusillanimité de sa communauté qui s’en trouve réjouit.
L’autre élément révélateur est l’absence de travail sur les masses qui traduit l’absence d’une véritable vision de la lutte noire.
On n’aime bien faire des conférences par-ci et par-là, en se leurrant soi-même, flatter son égo, de petites manifestations sans en mesurer la portée. Mais la libération d’un peuple passe nécessairement par un mouvement intransigeant de masse. Les Noirs doivent sortir ensemble pour défendre leurs droits en adaptant leurs moyens par rapport aux circonstances.
Le problème est que la communauté noire est minée par des divisions, une féodalité dévastatrice, une ignorance ravageante, une lâcheté contagieuse. Tant que cette communauté n’aura pas compris que la lutte pour sa dignité est risquée et sérieuse, elle continuera à être dominée. Ce ne sont pas les petites organisations et fanfaronnades à Paris ou à Nouakchott qui vont changer son sort.
En conclusion, nous pouvons dire que le pouvoir maure sait là où il veut arriver, assurer sa domination, arabiser le pays par tous les moyens alors que les Noirs continuent à se noyer dans l’ivresse de la parole.
Oumar Diagne
Ecrivain
Source: OUMAR DIAGNE
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