Le mot " politique " dans le langage
commun soninké a un sens connoté péjoratif. En effet dire d'une personne en
soninké " politiguinté xorré" est souvent synonyme selon l'approche,
d'un individu " magouilleur, manipulateur, voire malfrat".
Après cet élément
introductif et primaire du sens de la Politique, nous essayerons de détailler
les différents sens qu'un soninké type pourrait comprendre ou sous entendre en
fonction de son cadre d'évolution.
La politique
classique basée sur des valeurs saines et justes, se parle à toutes les langues
et à tous les hommes en vue de réaliser leur bien être individuellement et
collectivement. En effet, elle a un idéal de l'être humain donnant sens aux
valeurs suivantes: la Dignité, l'Honneur, le Respect, la Solidarité, la Justice
, la Tolérance et la Fraternité. Et c'est aussi par cette approche de la
Politique, que l'Autre très différent de Nous pourrait être accepté en Nous,
par Nous et chez Nous sans quelconque déterminisme exclusiviste .
Elle constitue
l'arme essentielle contre les xénophobes, les racistes, les sectaires et les
communautaristes obsessionnels, qui se structurent et s'alimentent à des
diverses manières par la négation et le rejet de l'Autre. C'est par elle que
presque tous les partis politiques dignes s'inspirent comme idéal afin impacter
le réel par l'exercice démocratique.
Cependant, nous
dirions que tous les soninkés, qui minoritaires dans leurs pays d'origine et
souvent accueillis dans d'autres pays, seront parmi les premiers à saluer et
apprécier une telle approche hospitalière de l'exercice politique. Par exemple;
en France lors des dernières élections municipales, des hommes et des femmes
d'ethnie soninké ont été élus au sein des conseils municipaux. L'engagement de
ces personnes est à saluer, mais nous devons surtout mettre en écho les
dispositions juridiques, progressistes et humanistes qui ont rendu possible
leur élection par un électorat mûri démocratiquement.
Certes, nous
sommes face à des situations porteuses d'une certaine morale humaniste de la
politique par rapport à ce qui se fait chez nous en interne. Le français
d'ethnie soninké élu dans une ville de la région parisienne, aurait peu de
chance de pouvoir postuler à un poste similaire dans une autre commune que
celle de son terroir d'origine dans nos pays.
En effet, par le
pourquoi de ce paradoxe saisissant, nous abordons ce qui s'apparente à une
certaine compréhension de la chose politique en vigueur dans nos terroirs
coutumo-traditionnalistes. Cette approche de la politique comme l'exercice d'un
certain pouvoir quel que soit l'échelle, définit l'organisation de la cité
soninké. En effet tout s'organise par cette politique exclusiviste basée sur le
déterminisme de naissance.
Par cette
politique particulière, nous reconnaissons nos partis; ce sont nos clans
familiaux ou d'alliances historiques (par exemple: Hayaninko,
Botokholonko,Hokolounko, Baraninko, Gangarinko et d'autres...).
Ces clans
constituent des entités politico-féodales et transnationales sur lesquelles et
par lesquelles se structurent tous les rapports politiques et politiciens du
monde soninké. La politique mise en place par ces entités féodales conditionne
et identifie "l'homme soninké" à un clan et à un statut social de
naissance. Les convenances coutumières soignent à vie consciemment ou
inconsciemment ce socle d'identification de "l'homme soninké", qui
selon son appartenance statutaire peut être l'éternel servi et honoré au nom du
clan, ou l'éternel serviteur et subalterne du clan.
Le monde
politique et politicien à la "sauce soninké" s'anime par cette
catégorisation où la qualité par le nombre importe peu, mais c'est plutôt le
statut hérité d'un passé peu glorieux sur les valeurs humanistes qui fait la
légitimité à vie. Cette norme de la chose politique qui a un aspect quasi -
monarchiste est mise en avant au sein de la cité soninké.
Dans certains
milieux, nous constatons que l'exercice moderne de la politique est faussé par
cette logique clanique et féodale jouant le clientélisme. Dans le cas
mauritanien, en concert avec le tribalisme Beydhane, le féodalisme politique
soninké donne peu d'importance à la notion du vote libre pour chaque citoyen en
toute indépendance par rapport au groupe. Lors des élections législatives et
municipales de fin 2013 dans le Guidimaxaa mauritanien, des partis politiques
nationaux s'étaient faits utilisés comme couverture pour des affrontements
acides entre clans politico-féodaux dans plusieurs communes majoritairement
soninké. Profitant du faible niveau d'instruction civique parmi nous, les
politiciens clientélistes bien introduits à Nouakchott manipulent les
consciences par des considérations d'identification clanique en sabotant
l'émergence de l'État-nation par le vote
libre et citoyen.
Avec pareils
déchirements intra-communautaires pour une hégémonie primitive à une échelle
communale, nos hommes politiques soninkés jouant ce jeu ont peu de chance
d'assumer le rôle d'Hommes d'État un jour. Si l'intérêt général dans une
commune de 15000 habitants se fait traîner dans la boue à cause des grandeurs
mal placées liées aux velléités féodales, les 3 ou 4 millions de nos
compatriotes attendront peu de choses de notre giron. Nos divers mouvements et
associations s'inscrivant dans cette norme des choses verront peu de réformes
aboutir à l'échelle intracommunautaire comme nationale. Nos différents
objectifs quoique nobles et sincères seront brouillés par des légitimes
suspicions si nous ne revoyons pas nos logiciels prédisposés issus de nos
cadres de référence ethniques, tribaux, claniques et communautaires. Notre
appel au Changement sans nos propres changements ne fera aucun écho nulle part.
Qui ose se
changer aujourd'hui chez soi, peut espérer faire changer l'autre demain chez
lui...!!!
Acceptons d'être
"l'objet" d'un changement d'abord avant d'être le sujet du Changement
prêché auprès dautres.
Et au final, si
on osait faire bénéficier politiquement avec ouverture à l'Autre ce qu'on a pu
bénéficier sous d'autres cieux en s'y vantant...!!!
Koundou Soumaré
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