Le
08 juin 2014
Communiqué
de presse
Commémoration du débarquement : le CRAN dénonce le
blanchiment des cérémonies
N'eût été la présence de Barack
Obama, les cérémonies commémorant le débarquement de 1944 étaient parfaitement
« white only ». Près de 20 chefs d’État étaient réunis : Royaume-Uni,
Belgique, Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Pologne, Russie, États-Unis, etc. Mais
aucun chef d’État africain n'avait été invité. A croire que la seconde guerre
mondiale n'était pas si mondiale que cela.
Le CRAN tient à rappeler que
l'Afrique apporta à la France libre :
-des
ressources territoriales. Félix Eboué, qui organisa le ralliement de l'Afrique
Équatoriale Française dès 1940, permit au général de Gaulle d'avoir une assise
territoriale, militaire et donc politique, à la fois pour combattre les forces
de l'Axe, mais aussi pour asseoir son autorité face aux Alliés. Brazzaville fut
la capitale de la France libre, et l'AEF fut une véritable plaque tournante
d'où partirent les premières forces armées en vue du redressement. De
nombreuses batailles eurent lieu en Afrique, comme la bataille de Bir Hakeim en
Libye, ou Ksar Ghilane en Tunisie, et c'est la défaite de l'Axe et de
l'Afrikakorps en Tunisie qui permit la campagne d'Italie, puis le débarquement
en Provence.
-des
ressources humaines. En 1943, les Forces françaises libres regroupaient 39 000
citoyens de France et 30 000 coloniaux. En 1944, 20 à 25 % des effectifs
de la division du général Leclerc étaient des Maghrébins. Au total, des
centaines de milliers d'indigènes furent recrutés dans le cadre des opérations
militaires, et ils se battirent en Afrique comme en Europe pour libérer la
France. Mais les troupes qui entrèrent à Paris en 1944 furent
« blanchies », et les fameux tirailleurs furent interdits de défilé.
Par ailleurs, pendant la guerre, les Noirs payèrent un lourd tribut, et quand
ils étaient capturés par les Nazis, ils étaient souvent massacrés sur place, et
non pas envoyés dans les camps de prisonniers, comme l'étaient les soldats blancs.
-des
ressources matérielles. L'Afrique permit à la France libre d'être régulièrement
approvisionnée en matières premières stratégiques comme le caoutchouc, le
cuivre, ou encore l'uranium, produit absolument indispensable pour fabriquer la
bombe atomique. Par ailleurs, pendant la durée de la guerre, l’AEF contribua
très activement à l'effort de guerre, et versa officiellement environ 1 508
millions de FF pour soutenir la France libre, ce qui constitue bien entendu une
somme considérable.
Les historiens spécialistes du sujet
s'accordent à dire que sans le ralliement de l'AEF, le général de Gaulle
n'aurait jamais réussi à s'imposer dans le contexte de l'époque. Mais 70 ans
plus tard, tous ces pays d'Afrique ont été tenus par la France à l'écart des cérémonies
du débarquement.
« Je suis tout simplement
écœuré par l'attitude de François Hollande, a indiqué Louis-Georges Tin, le
président du CRAN. Il y a 70 ans, les troupes coloniales furent blanchies, et
les tirailleurs africains furent interdits d'entrée à Paris. Et aujourd'hui
encore, leurs descendants sont écartés des cérémonies du souvenir. L'Allemagne
elle-même était invitée en Normandie, mais pas les anciennes colonies, ce qui
montre que l'on a plus d'estime pour l'ancien ennemi blanc que pour les amis
noirs, qui furent pourtant les premiers à se rallier au général de
Gaulle. »
Dans ces conditions, le CRAN ne peut
que dénoncer ces cérémonies de l'oubli et du blanchiment. Mépris raciste,
ignorance crasse, révisionnisme ? Peu importe. Ainsi
conçue et mise en œuvre, cette cérémonie constitue une faute historique,
morale, politique et diplomatique majeure. Le CRAN qui avait obtenu en 2006 la
« décristallisation » des pensions, annoncée par Jacques Chirac le 14
juillet, puis confirmée ensuite à l'occasion de la sortie du film Indigènes, tient à
souligner la gravité de qui constitue à ses yeux un scandale international de
premier plan.
« Il est évident que François
Hollande a un lourd problème avec l'histoire coloniale, a ajouté Guy Samuel Nyoumsi, vice-président du CRAN
chargé des relations avec l'Afrique. Il a commencé son quinquennat en célébrant
Jules Ferry (qui a relancé la colonisation au nom de la supériorité de la
« race française »), il refuse de réparer le crime contre l'humanité
que fut l'esclavage (contrairement à tant d'autres pays), et pour couronner le
tout, il organise maintenant le blanchiment des cérémonies du débarquement (en
occultant la réalité des faits passés). Décidément, quand il s'agit des Noirs,
cet homme ne respecte rien. C'est pourquoi
le CRAN entend dès ce jour entrer en relation avec les ambassades africaines
pour attirer leur attention sur ce forfait historique, et demande immédiatement
des explications au chef de l'Etat », a conclu le vice-président du CRAN.
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