En vue de l'examen de la Commission nationale des droits de l'homme mauritanienne (CNDH) par le Sous-comité d'accréditation (SCA) du Comité international de coordination des Institutions Nationales des Droits de l'Homme – qui se tiendra à Genève en novembre 2016, Alkarama ainsi que plusieurs ONGs locales* ont soumis un rapport faisant état du manque de conformité de la CNDH avec les Principes de Paris.
Le SCA a pour mission d'évaluer la conformité des Institutions
Nationales des Droits de l'Homme (INDH) aux critères énoncés par les Principes de Paris
qui énumèrent une série de conditions auxquelles doivent se conformer
les Institutions Nationales de protection et de promotion des Droits de
l'Homme (INDH) afin de garantir leur indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif ainsi qu'un fonctionnement harmonieux et efficace.
Les institutions totalement conformes à ces principes peuvent
bénéficier du statut A, tandis que celles qui n'y sont que partiellement
conformes se voient attribuer le statut B, voire le statut C pour
celles qui ne sont pas du tout conformes.
Des pratiques sapant l'indépendance de la CNDH...
Si les réformes entreprises en 2012 ont renforcé le statut juridique
de la CNDH en lui donnant une base constitutionnelle, Alkarama a
constaté qu'en pratique l'indépendance de la CNDH vis-à-vis de
l'exécutif demeure incomplète. Par exemple, la CNDH doit rendre des
comptes directement et exclusivement à l'exécutif.
De plus, le processus de nomination des membres de la Commission
manque de transparence et demeure in fine contrôlé par l'exécutif qui
dispose du «dernier mot», y compris dans la sélection des membres
représentatifs de la société civile. D'après de nombreux activistes des
droits de l'homme consultés par Alkarama, les ONGs les plus actives et
les plus critiques ont été écartées du processus de désignation, sans
aucune justification. Cette exclusion avait poussé de nombreuses ONGs à
publier un appel public en avril 2016 dénonçant le caractère exclusif et
unilatéral du processus de nomination.
... et entrainant une défiance d'une part de la société civile
Cette image d'une CNDH proche de l'exécutif a entraîné une défiance
de la part de certaines ONGs, notamment celles travaillant sur des
sujets considérés comme sensibles tels que l'esclavage ou encore la
torture. La Commission n'a en effet jamais dénoncé ces pratiques
persistantes et choisi d'adopter la position gouvernementale, affirmant
l'éradication complète de l'esclavage dans le pays, et félicitant les
forces de sécurité affirmant que ces dernières ne faisaient pas recours à
la torture, malgré l'existence de cas avérés.
Cette défiance a pu être observée par Alkarama dans les notes
attribuées par les ONGs consultées sur les points suivants:(cliquez pour
agrandir)
A la lumière de ces constatations, Alkarama a considéré que la CNDH
n'était pas entièrement conforme aux Principes de Paris et ne jouait par
conséquent pas le rôle attendu d'une institution dotée du statut A. Par
conséquent, Alkarama lui a adressé huit recommandations visant
notamment à lui permettre de renforcer son indépendance et la confiance
des citoyens et de la société civile, à améliorer l'efficacité de son
mécanisme de plaintes individuelles, à faire connaitre ce mécanisme
auprès du grand public et à adopter une approche plus critique vis-à-vis
du gouvernement.
*Le rapport d'Alkarama a été cosigné par les organisations suivantes : Association des Haratines de Mauritanie en Europe (A.H.M.E),
Association des Ressortissants Mauritaniens pour l'Eradication des
Pratiques Esclavagistes et ses Séquelles ARMEPES, Coordination des
Anciens Militaires Mauritaniens en Exil (CAMME), Forum des Organisations
Nationales des Droits Humains en Mauritanie (FONADH), Initiative pour
la Résurgence du mouvement Abolitionniste en Mauritanie (IRA –Mauritanie), Organisation Contre les violations des Droits Humains en Mauritanie (OCVIDH), SOS-Esclaves et Touche pas à ma nationalité (TPMN).
Pour plus d'informations ou une interview, veuillez contacter l'équipe média à media@alkarama.org (Dir: +41 22 734 10 08).
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