Disons le tout de suite, l'Islam ne fait
l'Arabe, et l'Arabe ne fait pas non plus l'Islam . Je suis loin d'être animé
par une idéologie extrémiste négrophile ou acculé dans une victimisation
obsessionnelle du fait d'être Noir. L’islam comme religion universaliste admet
et embrasse des larges diversités sur plusieurs domaines. Ainsi la dernière
révélation donne un cadre général d'assainissement et de régulation
contextuelle des différentes particularités (mode de vie, culture, politique et
autres) de ceux qui la confessent.
Cependant, si l'islam règne et s'applique réellement parmi des communautés
différentes, toute idée de racialisme qui conditionne au fond le RACISME
idéologique et culturel disparaît en amont dans la formation des consciences
collectives. Dans tout cadre collectif dénommé islamique ou pris comme tel, qui
vit des turbulences politiques , intercommunautaires et intra-communautaires ,
on pourrait en déduire clairement qu’ AUTRE CHOSE a été mise en avant qui
corrompt les objectifs fondamentaux de l'éthique fraternelle prêchée par le
Sceau des Messagers Muhammad (PSL).
Cette AUTRE CHOSE peut s'expliquer par
l'interprétation politiquement idéologisante, culturellement communautariste et
religieusement cléricale du MESSAGE. Le Noir qui a traîné bien avant
l'avènement de l'islam, certaines thèses bibliques le frappant d'une damnation
originelle, fut élevé au rang d'Homme digne croyant parmi les Autres au temps
du prophète Muhammad (PSL). À cette époque (7 siècle) , ce statut
révolutionnaire provoqua davantage l'ire
de l'aristocratie noblière arabe qui assimilait le Noir à l'esclave ou pire à
un animal domestique très docile et serviable.
Après l'âge d'or de la période prophétique et
une courte parenthèse califale, l'ordre sociétal et politique préislamique fut
établi plus ou moins. Si on revisitait l'histoire de l'impérialisme arabe sous
couvert du prêche de l'islam, on ne peut éviter de se poser des questions
légitimes quant aux motivations profondes des uns et des autres d'une époque à
une autre. La nouvelle religion révélée
du 7 siècle est bien arrivée au monde Noir par différents canaux (les
échanges commerciaux mais aussi les conquêtes impérialistes). Certains porteurs
sincères et dévoués au prêche du nouveau Message eurent diffusé les enseignements
religieux aux nouvelles contrées, mais d'autres arrivants furent motivés par
des visées impérialistes qui avaient saigné à vif certaines populations
autochtones.
Que représente le Noir dans l'imaginaire
collectif arabe, je dis bien ARABE non MUSULMAN..??
La société arabe préislamique était
esclavagiste comme beaucoup d'autres
sociétés du monde à cette époque, et la figure incarnant l'esclave est sans
doute le Noir originaire d'Abyssinie.
Nous n'avons pas connaissance d'une source
dans la littérature sociologique et historique de l’Arabie faisant écho d'une
présence des tribus noires dont seraient issus Bilal et d'autres Noirs vivant
sous le joug esclavagiste quand débuta la prédication du prophète Muhammad
(PSL).
Dieu sait que le Message Coranique aux
principes généraux libérateurs, promeut l'Honneur inaliénable et la Dignité
spécifique singularisant le statut de l'Homme parmi toutes les Créatures du
DIVIN. Par Sa Sagesse sublime, le DIVIN par l'intermédiaire de son Messager aux
meilleurs caractères pleins de rectitude, Prescrit des directives saines qui
devaient corriger une société arabe orgueilleuse et ignorante. C'est ainsi que
la société prophétique a su régler les cas sociaux d'esclaves qui subissaient
un sort irréversible. Ce processus parfait qui allait être un modèle idéal et
révolutionnaire de rétablissement de la Dignité de l'Homme, fut corrompu et
dévié vers une idéologie qui institua bizarrement l'esclavage au nom de
l'islam. L'Homme Noir d'aujourd'hui subit toujours les contrecoups de ce virage
idéologique développé et entretenu par les milieux savants tout au long de
l'histoire arabo-musulmane. On ne peut ne pas vous inviter à porter une
attention sur le célèbre film “LE MESSAGER”. Commençons par le générique du
film sorti à la fin des années 70, dans lequel il a été précisé que le contenu
du film avait eu l'accord de l'université d’Alzhar au Caire et celui d'une
institution Chiite libanaise avant sa diffusion. L'université égyptienne connue
pour être la voix idéologique du sunnisme historique du monde et l'institution
chiite basée au Liban présentée comme une autorité de l'idéologie du chiisme
arabe , furent consultés à propos du message que devait véhiculer le film. On
admettra que les objections des uns et des autres avaient été prises en compte
par les promoteurs du film afin d'éviter tout parti pris idéologique semble
t-il. Finalement ce film comme objet culturel et éducatif qui a traversé
plusieurs générations, ne peut se prévaloir d'une neutralité absolue du message
porté, parce qu’ayant subi une forme de censure politico-confessionnelle des
deux branches idéologiques de l'islam. Dans le fil du film, l'Homme Noir
symbolise l'esclave et sa place pitoyable et non enviable dans cette Arabie du
7 siècle. L'affranchissement de Bilal et sa promotion parmi les rapprochés du
prophète Muhammad (PSL) peut être un épisode salutaire et instructif pour le
public d'un côté . De l'autre côté, plusieurs générations d'arabes et d'autres
seront formatées idéologiquement et en préjugés que l'esclave est Noir d'abord
et que le Noir musulman serait l'ancien esclave affranchi . Mêmes les peuples
Noirs islamisés n'ont pas été à l'abri de ce formatage plus psychologique que
strictement idéologique. Le cas de l'esclave Noir dénommé par le sobriquet
wahchi, le lanceur d'épée commandé par la noble mecquoise Hind pour viser
Hamza, l'oncle chéri du prophète Muhammad
(PSL), révèle une autre transmission du “MAL NOIR” dans la conscience
collective des plusieurs générations. Les effets de ces épisodes historiques ne
seront pas démolis pour demain, et le film y est pour beaucoup dans le grand
public.
Si le monde Noir de la Oumma à l'époque du
film, avait une voix particulière portante , le cheminement factuel de
l'Histoire aurait été atténué dans la reproduction cinématographique.
Aujourd'hui, dans le monde arabe, un certain passif historique mis sur l'Homme
Noir, explique une certaine répugnance à l'endroit du peuple black. Ce dernier
même islamisé, se doit d'accepter d'être assimilé à l’ARABITÉ par l'histoire de l'esclavage transsaharien
d'un côté et par forcing politique et idéologique de l'autre.
Quelques faits saillants de notre époque,
tirés d'une simple et modeste observation personnelle de la RÉALITÉ :
1- En Mauritanie, une minorité arabo-berbère
détient tous les leviers sensibles du POUVOIR ( Économique, Militaire,
Politique, Médiatique et Judiciaire). La frange Haratine (acculturée beidane)
considérée comme anciennement esclave pour l'écrasante majorité, subit l'ordre
tribal et culturel issu de l'impérialisme esclavagiste de la minorité
arabo-berbère. Les Haratines Noirs de peau représentent la communauté la plus
nombreuse du pays, et sont considérés comme des arabes selon le régime
assimilationniste très POLITIQUE mais socialement TROMPEUR en vigueur dans
plusieurs pays arabes. Dans ce pays qui accueille le sommet de la Ligue arabe
ces jours ci, une forte minorité des Noirs mauritaniens hors haratines, très
diverse culturellement (peulhs, Soninkés et Wolofs) et ayant l'islam comme
religion, subit un écrasement idéologique et politique au nom du panarabisme
structuré et érigé en NORME ÉTATIQUE. L'exemple parlant selon divers
témoignages très sérieux, est cet effacement pur et simple de toute autre
expression culturelle que celle arabo-berbère se voulant plus arabe que l'Arabe
de l'Arabie , dans le village culturel installé au sein du stade olympique de
Nouakchott. On rappelle une fois encore l'enrôlement biométrique aux visées
suspectes des populations mauritaniennes . Les populations noires sont victimes
d'une multitude de tracasseries administratives qui menacent à terme leurs
droits légitimes de citoyens à part entière. Sur le volet de
l’anti-esclavagisme en Mauritanie, rien
d'étonnant si les leaders abolitionnistes n'ont pas d'écho auprès des pays
majoritairement arabes, car un Noir anti-esclavagiste engagé dans une société
arabe est une ANOMALIE CERTAINE . Imaginons une télévision algérienne ou
tunisienne faire un reportage de terrain sur l'esclavage et ses diverses
manifestations en Mauritanie auprès des mouvements abolitionnistes. Du rêve
pour l'instant.
2- Lors d'un prêche hebdomadaire d'un
vendredi (Khutba), un imam sincère et
véridique d'origine tunisienne, indexait les comportements racistes anti-noirs
au sein des sociétés majoritairement arabes. Dans cette mosquée en région
parisienne, ce jour, l'imam révélait l'existence d'une communauté noire en
Arabie Saoudite sans état civil officiel.
Dans ce même royaume saoudien, l'un des
petits fils du patriarche Abdelaziz Ibn Saud, le prince Bandar ben Sultan ben
abdelaziz al saoud serait traité illégitime à la succession au trône saoudien
un jour. Le motif évoqué de cette mise à l'écart selon une source d'un article
du journal Jeune Afrique, est que sa mère était une concubine à la PEAU NOIRE (
http://www.jeuneafrique.com/140549/politique/arabie-saoudite-bandar-ibn-sultan-prince-des-espions/).
Pourtant, le prince Bandar connu pour être un
diplomate chevronné qui occupait la stratégique représentation diplomatique
saoudienne aux États-Unis pendant les événements du 11 Septembre 2001, était un
élément clé dans l'appareil étatique du royaume pétrolier pendant plusieurs
années. Il y'a quelques mois, le cas de
la pilote Noire saoudienne Nawal-Hawsawi, exposait le racisme ordinaire visant
l'Homme Noir dans les sociétés majoritairement arabes.
3- Ceux de nos nôtres qui ont eu à séjourner
pour des motifs économiques ou universitaires dans certains pays arabes,
rapportent le mépris incessant de certains autochtones à l'endroit du kahlouch
(énième sobriquet du Noir). Par exemple, en Libye du défunt Kaddafi, le faux
converti africaniste trompeur, certains mauritaniens noirs pouvaient avoir un
semblant traitement de faveur grâce à leurs passeports mauritaniens. Et les
ressortissants subsahariens issus des pays non arabes subissaient des
traitements dégradants de la part d'une population pas trop avenante au Noir.
Sans oublier, les sévices subis par certaines travailleuses domestiques noires
dans certains pays majoritairement arabes, dont nous avons des échos médiatiques
régulièrement.
4- À l'exception du Soudan d’Omar El-bechir,
composé d'une grande majorité des Noirs arabisés qui sont maîtres de leur pays,
plusieurs pays dits arabes disposent d'une forte minorité des Noirs plus ou
moins assimilés et contenus dans le moule arabesque. Ces populations noires ont
peu ou pas du tout une expression politique et économique conséquente pour
peser dans les affaires publiques de
leurs états. Les “vrais arabes” qui détiennent les pouvoirs dans ces pays, les considèrent comme
des arabes dans la rhétorique politicienne et culturelle, mais en vrai ils
restent ces déracinés historiques de l'ordre esclavagiste d'antan dont le
prolongement généalogique s'accroche à tort à une tribu arabe esclavagiste.
5- En résumé, la conscience collective du
monde arabe assimile le Noir à l'esclave d'hier et le symbole du dominé à
dominer et à assimiler par tous les procédés possibles aujourd'hui.
K.S
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