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lundi 14 octobre 2013

Communication de Biram Dah Abeid aux congrès de l'ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture), Section Sud de la France. Manosque, 12-13 octobre 2013.

Communication de Biram Dah Abeid aux congrès de l'ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture), Section Sud de la France. Manosque, 12-13 octobre 2013.



Chères amies, chers amis,

Je suis ravi d'être ici, parmi vous à Manosque, pour célébrer la spiritualité et la morale au profit des personnes humbles et sans défense dans la vie sur terre, au profit de la dignité humaine. Au nom de mon organisation, IRA-Mauritanie, aux noms de tous ses membres, aux noms de toutes les victimes des discriminations, de l’intolérance et de la torture, en Mauritanie, je vous exprime toute ma reconnaissance pour le soutien constant que vous nous avez témoigné.

Chers amis,

Nous envions les croyants, comme les membres de l’ACAT, qui ont voulu et su résister aux multiples tentations d’ici bas. Ils sont loin de ceux, chez nous, qui se disent HOMMES DE DIEUX, et qui décrètent des dogmes fabriqués au nom de DIEU alors qu’ils leur servent juste à dominer, exploiter et avilir des gens de leur espèce, des êtres humains, des Musulmans. Hélas, chers amis, l’Islam de chez nous, de religion égalitaire, juste, et, à l’instar du Christianisme et du Judaïsme, révélée par DIEU Unique et Juste à son prophète Mohamed (psl), juste et plein de compassion pour les humains, cet Islam pur et originel est bien travesti en République Islamique de Mauritanie. En cette « République », ceux qui ont pris en charge d’interpréter les paroles et les lois divines ont sorti la communauté des esclaves du cercle de l’Humanité. Les codes qu’ils ont écrits et qu’ils érigent en normes sacrées et en lois de l’Etat, stipulent, sans ambages, l’inégalité des membres du genre humain et ce dès la naissance. Ces codes assimilent les esclaves, êtres humains et musulmans comme eux, aux biens meubles et immeubles et au bétail. Cette législation, toujours en vigueur en Mauritanie, autorise la castration des esclaves; un procédé visant à prémunir la société contre le mélange des sangs pur et impur. Cette législation que notre clergé prête à Dieu édicte le droit du prétendu maître à violer toutes les filles et femmes qui sont en sa propriété et ce sans aucun égard au nombre des victimes, à leur âge, à leur consentement ou à leur lien de parenté. Ces codes stipulent que ces Musulmans NOIRS, propriété de leurs coreligionnaires BLANCS, ne pourraient accéder au paradis de DIEU dans l’au-delà qu’en se soumettant toute leur vie à la volonté et aux caprices de leurs maîtres. Il est précisé dans ces manuels que les esclaves sont susceptibles d’être vendus, cédés, gagés, donnés et qu’ils n’ont le droit ni à la propriété, ni au mariage sans l’assentiment de leurs maîtres. Les esclaves, selon ces grimoires, n'ont pas, non plus, le droit de l'exercice de la tutelle sur leurs enfants. Ils prescrivent, tout aussi naturellement, les châtiments corporels les plus extrêmes sur les esclaves.

Honorables congressistes, après cette description qui est loin d’être exhaustive de la législation de l’horreur contenue dans ce Code Noir mauritanien, source de notre désolation, de notre désunion en Mauritanie, de notre combat pour la Mauritanie, je voudrais vous préciser que ce code inhumain et d’un autre temps, antéislamique et anti-islamique, ce même code est considéré par le clergé et l’Etat mauritaniens, comme la seule interprétation valable du Coran et de la geste du prophète Mohamed (Paix soit sur lui). Ce code est considéré par la « République » « Islamique » de Mauritanie comme la principale source de la législation dans mon pays. Il inspire le code pénal mauritanien et le statut personnel en vigueur dans le pays. Ce code est enseigné dans toutes les écoles mauritaniennes à commencer par celles qui forment les magistrats, les officiers de police judicaires, les administrateurs, les Imams et érudits, bref toutes les personnes chargées d’investiguer, de dire ou d'appliquer la loi.

D’autre part, c'est à cause de ce code, qu'environ 20% de la population mauritanienne restent soumis à l’esclavage domestique et par ascendance avec le lot de viols sexuels, de travaux forcés, de déni d’éducation, de rémunération, de soins, de pièces d’Etat civil. C’est ce code que mes amis et moi à IRA-Mauritanie avions décidé d’incinérer volontairement et symboliquement le 27 avril 2012 dans une place publique jouxtant ma maison dans le quartier de Riadh à Nouakchott. Cet acte que nous avions posé à cette occasion est une double protestation; la première est une insurrection morale et religieuse des Musulmans et croyants que nous sommes contre le rattachement de ces dogmes et pratiques inhumaines et malsaines à l’Islam, religion révélée à caractère et à essence d’équité, d’égalité et de liberté ; la deuxième protestation est une expression de rupture éclatante et vigoureuse et de rébellion contre l’infamie, des populations hratine asservies, une rupture d’avec la soumission et la résignation aux groupes dominants esclavagistes et dogmes d’esclavage.

Cher auditoire, nous n’oublierons jamais le soutien inestimable que vous nous aviez apporté pendant la campagne d’inquisition qu’avaient engagée contre nous l’Etat, les groupes dominants et le clergé obscurantistes de Mauritanie suite à notre acte salvateur du 27 avril 2012.

Je vous remercie.

Manosque, le 12 octobre 2013

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