La FIDH et l’AMDH s’élèvent contre la condamnation à mort d’un jeune homme le 24 décembre dernier pour apostasie et s’inquiètent des risques de condamnation à 5 ans de prison de Biram Dah Abeid et 7 autres militants de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (Ira-Mauritanie). Nos organisations demandent l’abandon des charges et la fin de la répression des voix contestataires en Mauritanie.
copyright : David Wagnières
Le 24
décembre 2014, Mohamed Cheikh Ould Mohamed a été condamné à mort pour
« apostasie » pour avoir critiqué le système de caste et les inégalités
qu’il engendre en Mauritanie ainsi que sa conformité avec le Coran.
Arrêté et détenu depuis le 2 janvier 2014, le jeune homme avait été
menacé de mort à plusieurs reprises.
« Cette condamnation, le première pour « apostasie » en
Mauritanie depuis l’indépendance, constitue un recul de la tolérance et
démontre à quel point les questions de caste, de religion, d’esclavage
et donc de démocratie sont tabous en Mauritanie. Nous observons un
durcissement du pouvoir et de la société contre toutes les voix
contestataires sur ces sujets » a déclaré Me Fatimata
Mbaye, présidente de l’AMDH, ancienne vice-présidente de la FIDH et
avocate des militants antiesclavagistes.
Ainsi, le 24 décembre 2014, le parquet de Rosso a requis 5 ans de
prison ferme contre Biram Dah Abeid et 7 autres militants de
l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste
(IRA-Mauritanie) pour « appartenance à une organisation non reconnue »
et « rassemblement non autorisé ». En novembre dernier, ils parcouraient
le pays à bord d’une caravane, pourtant autorisée, organisée par
l’organisation Kawotal visant à sensibiliser la population à la lutte
contre l’esclavagisme lorsque le 11 novembre 2014, ils ont été arrêtés,
inculpés et écroués dans la ville de Rosso. Le 12 novembre, le siège de
l’IRA à Nouakchott était fermé par la police. L’IRA-Mauritanie qui
n’avait jamais reçu d’autorisation officielle en dépit de ses demandes
répétées était sous la menace d’une telle interdiction à tout moment, ce
que le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de
l’Homme en Mauritanie dénonce comme « une application arbitraire de la
loi ». Le président de Kawotal, Djiby Sow, est lui aussi poursuivi en
dépit des autorisations. Onze autres militants de l’IRA sont eux
toujours détenus à Nouakchott dans l’attente de leur procès.
« Nos organisations dénoncent l’arrestation de Biram Dah
Abeid, des autres militants de l’IRA et de Kawotal et demandent
l’abandon des charges contre eux, leur libération ainsi que la
régularisation de leur organisation. L’esclavage est un crime punis par
la loi et ceux qui la pratique doivent rendre des comptes devant la
justice, pas ceux qui la combattent » a déclaré Karim Lahidji, président de la FIDH.
Biram Dah Abeid, fils d’affranchis, combat depuis 2008 à la tête de
son organisation l’IRA-Mauritanie le phénomène de l’esclavage en
Mauritanie qui concernerait, sous différentes formes, près de 4 % de la
population, plaçant la Mauritanie en tête des pays esclavagistes au
monde. Les 18 et 19 décembre 2014, le parlement européen et le Ministère
français des affaires étrangères se sont inquiétés publiquement de la
situation des détenus. Après avoir reçu le prix des droits de l’Homme
des Nations unies en 2013, Biram Dah Abeid se présente à l’élection
présidentielle en 2014 face au général Aziz à l’origine du coup d’État
de 2008. Ce dernier est réélu avec 82 % des voix tandis que Biram Dah
Abeid avait, lui, obtenu près de 9 % des suffrages en l’absence de tous
les autres leaders de l’opposition qui avaient boycottés le scrutin.
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