Les villages soninke sont plus
vieux que la Mauriatnie actuelle et ses lois fondamentales en vigueur.
Ils s'étaient constitués sur ses
terres à travers des batailles entre différents clans et contre d'autres
peuples (Les maures et d'autres) selon les endroits.
Pendant la période coloniale,
l'administration coloniale reconnaissait tacitement les influences et
l'occupation de chaque clan sur des périmètres plus ou moins définis. Ces clans
liés par des liens ancestraux devenus propriétaires terriens possédaient des
esclaves qui participèrent grandement aux conquêtes et aux travaux de
débroussaillement.
Un système féodal quasi princier
fut mis en place pour régir l'organisation de la cité soninke.
Politiquement, cette cité soninke
est dirigée par les familles féodales par héritage selon les bonnes convenances
fixées dans l'histoire du plus vieux d'entre eux.
L'exercice du système féodal sur les
terres ;
exemple type d'une famille féodale
Une famille féodale possède
généralement ses parcelles de terres fertiles issues du partage des terres
entre membres du clan propriétaire du site villageois. Elle faisait fructifier
ces terres avec la main d'œuvre exploitable à merci composée essentiellement
des esclaves ( personnes volées, achetées ou exploitées par misère sociale). Ces esclaves
avaient droit à un misérable traitement consistant à quelques parties des
parcelles qu'ils essayaient de mettre en valeur pour leurs familles pendant
leurs disponibilités limitées pour eux-mêmes, c'est-à-dire les fins de journées
ouvrables ou un jour spécifié (vendredi par exemple).
Les principaux revenus de la
famille féodale venaient des cultures et elle s'enrichissait par ce biais tout
en entretenant son statut dans le clan. Elle se croyait dans son droit
d'exploiter des personnes considérées ( Esclaves) se basant à
tort sur une certaine interprétation des préceptes juridiques
islamiques par un autre groupe pilier du système féodal ( les marabouts
religieux « MODINI »).
Un semblant pacte entre
ces marabouts religieux « MODINI » et les clans féodaux constituait
le socle du système.
Les esclaves n'avaient pas droit
à des parcelles par possession issues du partage des terres fertiles.
Ce joug par le chantage des
terres consistant à les rendre dépendant de leurs maitres avait fonctionné
longtemps et continue dans certain sens.
A voir de près , le système a
presque pris fin sur son ancien modèle et de même que l'exploitation
esclavagiste. Il a surtout perdu son sens primaire dans l'optique où les
anciennes possessions (personnes esclaves) pourraient être des
potentiels propriétaires terriens dans un nouveau cadre organisationnel
(Commune, Département, Région et État).
Quelques dispositions légales du code
foncier mauritanien en vigueur
Chapitre IV- l'individualisation
des droits fonciers collectifs
Article 36- les propriétés
terriennes agricoles acquises, antérieurement à l'entrée
en vigueur de la loi 60.139 du 2 Août 1960 portant organisation domaniale et
exploitées en commun par des collectivités traditionnelles, sont, si l'ordre
social l'exige, réparties entre tous les membres de ces collectivités qui ont
participé à la mise en valeur initiale desdites propriétés
ou contribue à la pérennité de
leur exploitation.
Article 37- Bénéficient du
partage des collectives dans les conditions fixées par l'article 36 ci-dessus,
les personnes qui, sans avoir été recensées administrativement dans la
collectivité concernée, y ont vécu de façon permanente et ont, à ce titre
participé à la mise en valeur des dites terres.
Article 38- Les personnes qui, de
leur propre initiative ou avec l'accord de leur collectivité, ont entrepris la
construction ou la réfection d'un ouvrage de retenue d'eau ou procédé à tou
aménagement de nature à améliorer la rentabilité d'une terre collective dont
elles bénéficiaient avant le partage, ne peuvent avoir à l'occasion de ce
dernier, aucun avantage supplémentaire par rapport à tous les autres
bénéficiaires.
Article 41- Qu'elle résulte
d'accord amiable constaté par l'autorité compétente ou de décision prise par
cette dernière, la redistribution des terres collectives sera effectuée, sans
discrimination d'aucune sorte, de manière équitable et de façon à
sauvegarder les intérêts des personnes bénéficiant des dispositions des
articles 36, 37 et 38 du présent décret.
SOURCE: Décret n°
2000-089 du 17 juillet 2000 et publié le 15-10-2000 au JO de la RIM
Ces différents articles en
vigueur par
le nouveau cadre nous enseigne, et nous verront leur exercice concret très
relatif sur les réalités soninké.
Dans le milieu soninke, ces
articles qui régissent le domaine foncier mauritanien s'applique plus ou moins.
Les terres prises par un citoyen lambda pour en faire une maison ne pose pas de
problème généralement mais celles occupées pour des cultures sont revendiquées
par les anciens propriétaires sous le modèle coutumier dans bien des cas.
Concernant le domaine irrigable
partagé en parcelles entre les clans d'anciens féodaux, nous n'assistons pas à
une redistribution entre différents membres villageois
qui participèrent tous grandement au débroussaillage des terrains.
En effet le maintien sur
certaines parcelles des descendants d'anciens esclaves est sujet au bon vouloir
capricieux des certaines familles d'anciens féodaux qui en font d'objet des
chantages dans certains cas.
Ce joug psychologique par les
terres fonctionne par la menace de retirer leurs possessions confiées aux
personnes qui oseraient défier l'ancien ordre coutumier dans les affaires
sociales et politiques du milieu villageois.
Le système admet qu'un descendant
d'ancien esclave ne puisse pas hériter définitivement les
parcelles que son ascendant avait depuis plusieurs années et parfois
par un moindre différend sur quelques sujets particuliers, pourrait résulter
d'un retrait sans ménagement d'une terre cultivable. Pour un descendant
d'anciens esclaves, l'héritage de droit incessible d'une terre lui est contesté
et contestable par ce système qui le considérait lui même comme une possession
matrilinéaire de son maitre par héritage dans le
passé.
Après ce résumé sans doute non
exhaustif des mécanismes qui régissent plus ou moins le foncier chez les
soninké, nous proposons une approche basée sur la solidarité, la justice, et la
fraternité par ces différents points applicables à notre sens :
1- Reconnaître le droit de
propriété pour les descendants d'anciens esclaves sur les terres occupées dans
le passé, ce qui constitue une légitime réparation de l'exploitation subie
injustement dans le passé.
2- Une sincère solidarité basée
sur l'humanisme et la foi musulmane entre nos familles dans un respect mutuel.
3- Aborder la question foncière avec
courage en identifiant les différentes problématiques par une approche
désintéressée.
4- Aviser nos sages de la sphère
soninkaxu sur la nouvelle donne qui devrait soigner nos rapports.
5- Éviter dans la mesure du
possible de s'entredéchirer devant les autorités départementales, régionales et
voire mêmes étatiques.
6- Assister, aider, et considérer
l'autre comme coreligionnaire et concitoyen en droits et devoirs réciproques
avant de le fixer dans un statut coutumier obsolète qui atteint sa dignité
humaine.
Koundou Soumare
Membre de l'Armepes
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