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mardi 19 novembre 2013

Le mensonge des urnes II


Par Bâ Sileye Paris - FRANCE
Par Bâ Sileye Paris - FRANCE
Le 23 novembre, jour des élections municipales, les citoyens seront envahis par les " diaboliques voitures" conduites par les acheteurs de conscience. Les dignitaires et les politicards viendront chercher dans les Kebbas et les Adebeyyats leurs "électeurs-marionnettes". C'est le seul instant durant lequel les Haratines expriment leur droit : celui de voter pour le Maître ou ses alliés. Pourtant, à la gasra de Lemgueitty, l’Etat ne cesse d'envoyer des escadrons de la garde nationale pour faire déguerpir, sous un soleil de plomb, des femmes enceintes et leurs enfants. Mais en cette période électorale, quel candidat a dénoncé ce comportement honteux et abject..? Bien que pauvre et démuni, le Hartani des garsras reste un citoyen... Il n’est pas moins digne que l’homme d’affaire à qui l’Etat vend ses lopins de terre plutôt que de les céder aux nécessiteux. Malheureusement, ni le maire, ni le député, et encore moins le sénateur ne pourront changer la donne. Quel maire Nouakchottois a une fois réinstallé les « gasraouis » pourchassés par les pouvoirs publics ? Impensable, dans un pays où tous les élus font l’objet de pression et de chantage.
Comme on dit dans l’administration publique, les décisions : "ça vient d'en haut". Le seul "haut" sous nos misérables cieux, c'est l'homme du palais, Mohamed Ould Abel Aziz, le général de toutes nos forces  armées, le Président des civils, le Président de tous les Conseils, le Président des gasras, des villas, des boulangeries, des boutiques, des marchés publics, des trafiquants, des terroristes, le chef des "partis secours" et de tous ces hommes politiques sans consistance. L’homme qui a oublié ses promesses faites aux pauvres de Lemgueitty en 2007. Ceux que l’on prive de leur dignité humaine. Ceux que l’on considère comme de simples appâts électoraux. La volonté de l’Etat veut que la masse des haratines reste éternellement composée de dockers, de charretiers et des gardiens de belles maisons des quartiers Nord de Nouakchott. Quant à l’élite haratine mécontente, elle n’a que de choix : la corruption, ou la prison

Le temps des élections rime toujours avec la trêve de l’oppression. C’est le moment de la grande fraternité nationale, celle que vantent à tout va traîtres et laudateurs. A Kaédi, un Ministre vient libérer des innocents et ailleurs un autre distribue de l’argent. C’est leur seule manière de prouver que le système s’occupe des Noirs. Tant qu’il n’aura pas par miracle un appel à la désobéissance civile par l’un des mouvements négro-mauritaniens dans les quartiers populaires, le jeune d’El-Mina ou de Sebkha peut vaquer librement à ses occupations. Sinon, la stratégie ne varie point. Dans la vallée et les quartiers assiégés de Nouakchott, on remplacera la matraque par la parole ethnicisée ou pieuse en vue de glaner quelques voix ici et là.

En temps normal, dans d’autres contrées, nombreux sont les Maures qui évitent soigneusement de croiser à l’aube, ou de toucher la main du Moual'am (forgeron) du Tagant ou d'Aoujeft. Mais le jour des élections, on le courtisera, et s'il le faut on lui inventera même une généalogie qui le rattache aux prophètes. La voix du griot servira à endormir le petit peuple, mais une fois les élections passées, elle deviendra satanique aux yeux de nos grands muftis. Certains intellectuels peuls deviendront temporairement "arabes". Un historien se permettra de dire qu’ils sont rattachés à des ancêtres yéménites. Puis, ils seront assimilés à des Sénégalais et la Mauritanie demeurera Trab-Beidane dans tous les médias. Pour qu’un Warr (patronyme peul) s’enrôle, il faudra réciter la Fatiha ou situer Bir-Moguein sur la carte géographique nationale. Les imams affirmeront que voter pour le parti au pouvoir mène aux portes du paradis... d'autres n'hésiteront pas à dire que leur parti est celui d'Abou Bekr Sadiq (RA)... Une fois ce temps de grands mensonges achevé, le pauvre et l'opprimé croupiront leur misère quotidienne. Car une fois l'argent public épuisé, les promesses seront envolées et la bonne parole tarie.     

Il faut se détromper, l’écrasante majorité est composée de pyromanes qui ne seront élus que pour  perpétrer la domination et l'oppression des masses populaires. Il est urgent de résoudre les grandes questions nationales, et d’œuvrer pour l’égalité et la justice sociale. Or, depuis plus de 50 ans, nos hommes politiques persistent dans l’échec. 

Dans sa globalité, c’est une classe politique défaillante et victime de sa naïveté. Comment peut-on faire confiance à des partis dans lesquels les victimes sont amadouées par des tortionnaires et des bourreaux ? De plus, tant que les militaires occupent le terrain politique, il est utopique de voir un civil accéder à la Présidence de la République.

Maintenant, une seule alternative se présente à nos concitoyens désireux de voir une justice sociale émerger : que les opprimés prennent le pouvoir. Les grands hommes qui ont redonné la dignité à leur peuple l’ont fait avec la résistance avant les urnes. Feindre la transparence et la bonne gouvernance en période de grande oppression relève de la propagande et de la démagogie. La politique, telle qu’exercée en Mauritanie, ne peut nullement produire des solutions. Jusqu’ici, elle est la source de nos problèmes. Au-delà du boycott électoral, c’est tout un système qu’il faut abattre.

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