Translate

lundi 29 février 2016

ESCLAVAGE EN MAURITANIE: L’ÉCHEC DE L’APPLICATION DE LA FEUILLE DE ROUTE POUR LA LUTTE CONTRE LES SÉQUELLES DE L’ESCLAVAGE.




Des ONG de défense des droits de l'homme viennent de publier un rapport d'analyse de la feuille de route pour éradiquer l'esclavage. Comme conclusion finale, le rapport estime que l’analyse de l’application de la Feuille de route adoptée par le gouvernement mauritanien le 6 Mars 2014 montre le peu de volonté politique existant pour la mettre en œuvre. La plupart des projets prévus par cette Feuille de route n’ont en effet pas été mis en place. Si cette feuille de route contient des idées positives, son analyse prouve qu’elle n’a jamais été mise en pratique, et qu’elle n’a donc été produite qu'en réaction aux pressions de la communauté internationale, à celle des victimes et des organisations nationales de défense des droits de l’homme, soucieuses de la problématique de l’esclavage en Mauritanie

Passages du rapport:

Point 2 (Enrichir le texte par des dispositions se rapportant à la discrimination et aux réparations civiles).

Résultat d'analyse: Créée depuis bientôt 2 ans, cette agence ne s’est portée partie civile qu’une seule fois, dans l’affaire Issa Ould Hamady, enfant détenu par un esclavagiste. Cependant, SOS Esclaves rappelle que ni le tuteur de l’enfant, ni ce dernier n’ont été prévenus de la date du procès. De par leur absence, la cour n’a pas retenu les charges d’esclavage, mais de services d’enfant non rémunérés. Le maitre a été condamné à 3 mois de prison, mais a été immédiatement libéré, ayant déjà été 3 mois en détention, selon la cour. Selon la loi, la pratique de l’esclavage doit être punie de 5 à 10ans de prison. L’Agence TADAMOUN était supposée défendre la victime, mais n’a pas réussi à faire condamner le maitre d’esclave et n’a donc pas aidé la victime à percevoir de réparation civile.

Point 7 (Créer les conditions favorables à l’égal accès à la propriété foncière)
Résultat d'analyse: La loi adoptée le 13 Aout 2015, amendant la loi 2007-048 relative à l’esclavage ne prévoit pas de conditions favorables à l’égal accès à la propriété foncière. L’expropriation des terres reste un problème auquel font face de nombreux Haratines et Negro-Mauritaniens. Le mouvement les Forces de Libération Africaines de Mauritanie(FLAM) a ainsi dénoncé cette situation dans une déclaration publiée le 24 Février 2014. Les FLAM décrivent le bradage de terres de la vallée du fleuve Sénégal au profit d'hommes d'affaires saoudiens. Selon la déclaration, ces terres d’une superficie de 31 000 hectares appartiennent à des populations qui se voient ainsi expropriées. Les terres auraient été attribuées par le gouvernement mauritanien à des hommes d’affaires saoudiens. Les populations concernées ont écrit au Président Mohamed Ould Abdel Aziz pour dénoncer une mesure gouvernementale, prise en violation du Code pastoral, des principes de préservation de l’équilibre écologique et qui constituerait une menace pour la sécurité alimentaire.

Point 14 (Faciliter l’accès à l’état civil aux personnes n’ayant pas d’affiliation)
Résultat d'analyse: Il est difficile pour les enfants esclaves d’avoir accès à l’état civil, car les papiers d’identité de leurs parents leur sont demandés. Or les parents de ces enfants n’ont pas non plus de papiers d’identité. De plus, en signant l’accord tripartite entre le gouvernement de la République du Sénégal, le Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés et le gouvernement de la République Islamique de Mauritanie, ce dernier s’est engagé en Novembre 2007 à «délivrer aux réfugiés rapatriés mauritaniens et à leurs enfants, tous les documents d’état civil auxquels ils ont droit, et de mettre à jour en conséquence les registres d’état civil»

Point 19 (Faire obligation aux entreprises d’élaborer des codes de conduite).
Résultat d'analyse: Peu d’informations sont disponibles sur l’élaboration de ces codes de conduite. Le manque de transparence général sur la réalisation des projets de cette Feuille de route est un problème qui en empêche l’évaluation indépendante.
Point 25 (Instaurer une journée de lutte contre l’esclavage).

Résultat d'analyse: Une journée de lutte contre l’esclavage a bien été instaurée, le 6 Mars, jour d’adoption de la Feuille de route. Pourtant, le gouvernement mauritanien ne reconnait toujours pas l’esclavage, mais seulement ses séquelles. Si proclamer une journée de lutte contre l’esclavage est une étape positive, reconnaitre l’existence de l’esclavage en Mauritanie aurait renforcé cette mesure. De plus, cette journée est passée inaperçue, car les autorités n’ont pas impliqué les organisations de lutte contre l’esclavage, qui auraient pu utiliser cette journée pour mener de réelles actions de sensibilisation.


Abidine Merzough / Allemagne

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire