Publié le 14 juin 2015, 21:46
La hiérarchie sociale est la distinction
sociale. Elle repose la pureté sociale. La société hiérarchisée se distingue
par les castes. La caste est, selon Max Weber, un stand fermé (groupe de statut
fermé) dans la mesure où elle impose des obligations professionnelles,
religieuses et sociales extrêmement contraignantes.
Le statut de chaque individu est déterminé à
la naissance en Mauritanie. Nous naissons noble, guerrier, marabout, esclave,
griot, etc. La question généralement
soulevée dans ce pays est l’esclavagisme. Il existe d’autres cas que nous en
parlons rarement (griots, artisans). Tous ses groupes sont endogamiques et
héréditaires. Le partenaire est choisi selon la classe sociale que l’on
appartient. Aucune communauté mauritanienne n’échappe à cette situation. Ces
normes et valeurs sociales sont la réalité mauritanienne. La société civile et
l’Etat continuent de nier l’existence.
La société soninké pour masquer, cette
réalité joue sur autre carte qu’on appelle dans le dialecte soninké « LADA
LEMAKHOU ». Le « LADA LEMAKHOU » est une sorte de service. Il se déroule entre
les castes dites inférieures et les castes dites supérieures. Ce système est
pour masquer la vérité et apaiser les tensions à fin de maintenir une certaine
stabilité sociale. Le « LADA LEMAKHOU »
consiste à la réalisation des tâches chez les soninkés entre ancien
esclave et maître dans le cas des figures suivantes : mariage, décès, arrivé
d’un étranger, etc. Si l’un d’entre eux (maître ou ancien esclave) se trouve
dans l’une de cas, l’autre vient se charger des tâches (cuisine, vaisselle,
etc.). Un système qui est aussi pratiqué d’une manière injuste. Les anciens
maîtres ont compris avoir perdu certains privilèges et établissent ce système
pour maintenir un certain ordre social et masquer la vérité. Les groupes
communautaires s’organisent autour de la division sociale du travail. Au-delà
de la religion musulmane qui est la religion de tout le citoyen mauritanien à
99 %, la chanson, l’imamat, l’utilisation du tamtam etc. dépendent de la classe
sociale.
Les sociétés des classes sont basées sur les critères de fortune. La
Mauritanie n’échappe pas aussi à ce cas de figure. L’étude sur les classes
sociales est la plus compliquée. La chance de réussite en Mauritanie dépend
d’appartenir à un groupe communautaire particulier (les beïdanes). Les beïdanes
sont un groupe communautaire composé des berbères et des arabes. Cela
n’explique pas non plus que tous les beïdanes sont dans le bien-être. Les guerriers et les marabouts, le sommet de
la hiérarchie sociale maure, sont les plus favorisées. L’exemple type qui
explique cette situation est la présidence de la Mauritanie. Le premier
président mauritanien est issu de la tribu de marabouts, les deux suivants sont
issus de guerriers, le quatrième et cinquième, sixième, septième et huitième
sont aussi issus de marabouts et guerriers. Les vingt et un militaires qui ont
tenté de renverser le régime en 2003 sont issus de tribus guerriers et
maraboutiques. Tout ceci peut s’expliquer. Pour renverser un pouvoir, il faut
le moyen financier, matériel et humain.
Il existe deux types de domination en
Mauritanie. La domination traditionnelle qu’on trouve au sein de chaque
communauté et la domination moderne. Dans chaque communauté, il y’a des dominés
et dominants. J’appelle « domination moderne » le moyen financier et matériel
aux mains des beïdanes. Les beïdanes imposent leurs lois, normes et valeurs sur
toutes les autres communautés. Ils dominent tout le monde. Les dominés se
dominent entre eux aussi. Une situation complexe a analysé. Il existe aussi des
groupes beïdanes qui n’échappent pas à cette domination des beïdanes selon leur
statut social.
Cette analyse brève de la situation montre
que l’idée d’une nation mauritanienne est loin d’être atteinte. Le problème
majeur réside dans le fait que la société mauritanienne n’est pas organisée de
façon à permettre le transfert dans modèle basé sur une solidarité organique
(Durkheim), c'est-à-dire la complémentarité des individus et des positions
sociales. Il en résulte ce qu’à connu la Mauritanie depuis un certain temps
c'est-à-dire l’absence d’un Etat-Nation un temps que tel et le retrait sur la
petite société (Tocqueville). En effet, comme le rappelait E. Renan dans sa
conception subjective ou élective de la nation développée dans une conférence
en 1882 intitulée « Qu’est-ce qu’une nation ? » ; il n’est pas certain que les
critères objectifs de la nation suffisent à comprendre l’existence d’une
nation. Pour lui, cela n’est pas suffisant ni même nécessaire. Une nation c’est
d’abord un vouloir vivre ensemble chez les individus qui composent la nation :
« l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours ». Cette
affirmation permet de mieux comprendre le cas mauritanien. Le philosophe
défendait l’idée de nation en 1882, en pensant notamment à l’Alsace et à la
Moselle annexées par l’Allemagne en 1871 , terres où les populations parlaient un dialecte proche
de l’Allemand mais où la majorité aurait souhaitée rester français plutôt que
de devenir allemand, ce qui ne parait pas si éloigné de la situation
mauritanienne forçant un certain nombre de tribus à vivre ensemble mais surtout
à se soumettre à un vivre ensemble forcé, sous le contrôle d’une seule et même
tribu, alors même que les régimes précédents avaient tenu compte des
caractéristiques tribales.
Renan pense qu’il faut entretenir une
histoire commune, des souvenirs communs, des références historiques communes,
dans lesquelles, le plus possible d’individus membres de la nation, puissent se
retrouver. Au lieu que les groupes dominés (beïdanes, harratines, soninkés,
wolofs, Haalpoular) s’unissent pour se retrouver, ils continuent à s’auto
dominer. Cette situation a permis au petit groupe aux mannes du pouvoir à se
maintenir et à perpétuer ce modèle.
Pour mettre fin à ce modèle
Etat-tribu-communauté-caste, il faut que la majorité dominée se rende compte de
sa situation de dominés. Les dominés doivent arrêter de se dominer. Cela n’a
aucun sens. Nous devons reconnaître notre situation de dominés et celles et
ceux qu’on croit à notre tour dominés de s’unir avec eux pour se libérer
ensemble.
Vive la Mauritanie citoyenne.
Bulaye Kaba via Tidiane Diarra par facebook
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