Non
, je n'exagère pas, aujourd'hui certains milieux dans la communauté soninkée
veulent célébrer et primer celui qui se dit Komé (esclave) dans une insouciance
puérile et étrange. La stratification sociale soninkée qui assigne
hermétiquement les différentes entités sociétales, est régie par un certain
ordre régalien qui allie féodalisme et esclavagisme statutaire. Ce type de régulation
de la cité soninkée représente une fierté transcendant le Temps et l'Espace selon
un imaginaire collectif perçu comme légendaire et immuable pour certains. Dans
cet imaginaire collectif, on y a construit et promu la conscience de l'esclavagisme statutaire.
Ainsi la caste sociale esclave reléguée au bas de la pyramide sociale s'est vue
attribuer une certaine valorisation foncièrement inhibitrice. Aujourd'hui nous
pouvons recueillir des témoignages qui décrivent les mentalités conditionnées parmi
les esclaves d'hier. Par exemple certains sous l'ordre féodalo-esclavagiste de
leurs maîtres, faisaient durement la police sur leurs semblables de statut. On
rapporte même que certains esclaves sous couvert pouvaient se substituer à leurs maîtres qui
commettaient certains actes déshonorants au sein de la communauté.
Ce
conditionnement de l'esclave dompté relève d'un certain génie porté par une tromperie
évidente qui biaise la notion de la DIGNITÉ INTRINSÈQUE propre à L'HOMME. L'homme
esclave statutaire soninké ne croyait qu'à une dignité très relative humainement
et ne percevait la notion du BIEN qu'à partir d'une compréhension exclusive et
étroite de son maître représentant un
pilier de la norme sociétale en vigueur. Aujourd'hui ce régime jadis très
structuré et efficace pour la domination esclavagiste, s'est muté en rapports
sociétaux entre les descendants d'anciens maîtres et ceux d'anciens esclaves.
C'est
le lien social appelé LADALAMAXU par lequel l'esclave statutaire accepte et
s'accepte explicitement comme faisant
partie de l'héritage symbolique d'une famille féodale bien identifiée. C'est
ainsi que la « personnalité esclave » se forme à travers des rapports sociétaux qui structurent un
certain VIVRE SONINKÉ. La « personnalité esclave » est valorisée au
sein du système des castes par l'accomplissement de certaines fonctions
sociales pourtant peu enviables au fond.
L'appellation Komé est aussi très connotée d'une manière péjorative dans le
discours commun soninké. Tout ce qui peut être peu réfléchi, brut, léger,
distordu, sans réserve et peu prévenant sur le plan comportemental serait le
propre du Komé. Un type de bonne naissance dirait ouvertement à son enfant qui
agit mal ; même un Komé ne ferait pas cela ou ceci. En dépit de cette figure
mesquine et peu reluisante qu’incarne le Komé idéalisé, on voudrait lui attribuer
une autre « facette honorable » au nom d'un certain utilitarisme sociétal.
En effet lors des certaines cérémonies coutumières, la présence remarquée des
komos fait partie d’un mouvement d'ensemble organisationnel qui donne sens. Ainsi
le Komé n’est plus connoté comme le brut mais le digne héritier qui assume
fièrement son statut d’assigné esclave.
Il
fait volontiers de cette assignation
sociétale une source d'amitiés circonstancielles, d'honneur superficiel et des
petits soins très intéressés. Cet élément esclave statutaire qui s'affiche est
très prisé par certains milieux de la société qui sont étrangement nostalgiques
d'une noblesse paraissant conditionnée nécessairement à l'entretien d'un subalterne.
Ce
qui est frappant et interpelle tout observateur attentionné, c’est d'entendre
certaines voix dire que l'état d'esclave (komaxu) est une affaire de
comportements malsains mais dans un autre registre elles veulent louer et célébrer le mérite social de celui qui
se proclame esclave statutaire. Pire, ce
paradoxe s'amplifie même quand ceux qui refusent l'appellation connotée ou
l'assignation statutaire, sont considérés comme d'éléments nuisibles à la
supposée bonne tenue de la communauté. Par les temps qui courent, la tendance
balance vers une reconsidération du langage commun autour de ce mot Komé très
diversement SENSÉ selon les occurrences. Se proclamer esclave statutaire aujourd'hui
doit choquer toutes les consciences progressistes dans nos communautés.
L'esclavagisme pratiqué comme par statut
social ne peut être assimilé à une quelconque valeur sociale pour une société
éveillée et digne ayant une haute idée philosophique de l'Humain. Certains parmi
nous doivent apprendre à s'intéresser davantage à la valeur de l'HOMME en tant qu'Être
DIGNE par essence au lieu de spéculer hâtivement par des constructions
sociétales qui pourrissent nos mentalités. L'engagement pacifique abolitionniste
dans les communautés soninkées, se doit d'être imaginatif afin de convaincre
les masses populaires qu'il n'y a pas pire perturbateurs dans la société
soninkée que celui (personnalité esclave) qui s'assigne comme esclave
statutaire et celui (esclavagiste mental) qui assigne l'autre comme esclave. D'un
élan sincère de sensibilisation et d'éveil, on y arrivera TOUS inshAllah.
Kundu Sumaare
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