J’avais promis à un certain Diko Hanoune une
réponse détaillée à un article où j’ai été l’objet d’attaques de sa part. Voici
cette réponse.
Sur sa page Facebook, l’intéressé s’en prend virulemment au Président Messaoud Ould Boulkheir et à moi-même, « ces deux soi-disant politiciens » qu’il a du mal à comprendre. Il nous accuse de faire le jeu de « certains chauvins maures qui ont envie de prouver l’arabité des Haratines pour gonfler démographiquement la population arabo-berbère mauritanienne », et s’interroge : « Pourquoi nos deux (dinosaures arabes) qui prétendent représenter tous les Haratines de force ne condamnent pas ces violences commises sur les pauvres Haratines par l’Etat mauritanien lors du déguerpissement manu-militari du bidonville (Gazra) hôpital Bouamatou » ? Il ajoute que « l’Etat mauritanien n’a pas hésité une seconde à déverser ces familles pauvres comme des poubelles (ballites) humaines à 8 km de la ville de Nouakchott sans proposition de relogement et sans sanitaires ».
L’auteur poursuit sur le même élan pamphlétaire avant d’arriver à cette conclusion : « Franchement parlé, Messaoud et Boidiel méritent un lynchage public. C’est honteux et inhumain le rôle qu’ils assument pour cette racaille militaire. Aux Mauritaniens de décider leur sort. Trop c’est trop, et il est temps qu’ils le comprennent de vives voix ».
Il se dégage, par-dessus tout, de cet amalgame hanounien une volonté manifeste de remettre en selle la polémique aux relents d’un racisme primaire qui avait cours il y a quelque temps et qu’on croyait révolue. Là, c’est inquiétant ! Je ne veux rappeler à la mémoire des Mauritaniens et des Sénégalais le désastreux « Trop, c’est trop » du ministre sénégalais qui avait conduit à des conséquences dramatiques pour les populations des deux pays. L’appel au lynchage public aurait pu être également inquiétant si son auteur avait le moindre ascendant spirituel sur des adeptes autres que sa personne ou s’il avait une quelconque capacité de mobilisation et de galvanisation des foules. Je pense qu’il n’y a pas d’inquiétude à se faire de ce côté-là.
Bien sûr, en tant qu’hommes politiques, donc personnalités publiques, nous sommes exposés aux critiques et nous devons y prêter le flanc, mais pas aux insultes ni aux menaces.
Il reste que cette diatribe prend prétexte des évènements qui ont marqué le déménagement des familles en question pour semer la zizanie et susciter des tensions au sein de cette frange de la population mauritanienne à des fins de manipulation permanente. La dramatisation des évènements avec l’usage de termes impropres à l’humain est destinée à échauffer les esprits et à exacerber les mécontentements. Mais encore faut-il qu’elle se base sur un minimum d’éléments réels, quitte à les amplifier et à les dramatiser à dessein. Autrement, ce serait de l’agitation par le mensonge. C’est à cela justement que s’est livrée cette relation de faits complètement déformés.
D’abord, il ne s’agit pas d’un bidonville ou gazra, généralement entendu comme une occupation illégale du domaine public. Ce sont des terrains qui ont été lotis depuis longtemps et attribués à des personnes. Ils sont devenus des propriétés privées et sont clôturés. Les familles qui s’y étaient installées le savaient bien et avaient demandé à y rester juste le temps d’obtenir des terrains. L’Etat a donc fini par leur attribuer des terrains dans les nouveaux quartiers de Nouakchott en extension. Pour information, le déménagement fait suite à un accord tripartite conclu entre les représentants des familles, le Hakem du Ksar et les attributaires des terrains squattés. Et ce sont les propriétaires qui ont pris en charge l’opération de déménagement. Dire que ces familles ont été « déversées à 8 km de la ville sans proposition de relogement et sans sanitaires » prouve justement la tendance à travestir la réalité pour obtenir l’effet de la dramatisation. Qui peut savoir là où s’arrêtent les limites de Nouakchott pour donner un kilométrage aussi précis des distances par rapport à la ville ?
Comment nier
les possibilités de relogement offertes à ces familles, alors que des terrains
leur ont été attribués pour y construire des habitations qui, de toute manière,
ne seront pas plus précaires que les baraques qu’elles habitaient auparavant.
Sans sanitaires, dites-vous ? Mais de quels sanitaires elles disposaient là où
elles étaient ? Bizarre quand même cette manière de manifester son soutien à
des familles en préférant qu’elles restent amassées dans des taudis sur des
espaces qui appartiennent à autrui, plutôt que d’avoir des terrains à elles
pour y construire ce qu’elles peuvent.
Quant aux violences commises, elles sont en fait des heurts entre les agents de police en faction sur les lieux et un groupe de jeunes chauffés à blanc qui s’est attaqué à eux. Tout le monde a pu en voir les images sur Internet, y compris celles où des activistes revêtaient les uniformes des agents assaillis.
Quant aux violences commises, elles sont en fait des heurts entre les agents de police en faction sur les lieux et un groupe de jeunes chauffés à blanc qui s’est attaqué à eux. Tout le monde a pu en voir les images sur Internet, y compris celles où des activistes revêtaient les uniformes des agents assaillis.
On connait la théorie de Goebbels qui avait en charge la propagande du régime hitlérien et qui soutenait qu’en continuant à marteler quelque chose, même des inepties, les gens finiront par y croire. C’est cette méthode que Diko Hanoune & Frères utilisent pour tromper les esprits mal avisés et manipuler l’opinion internationale mal informée. Mais Goebbels a connu la fin tragique que vous savez, en se suicidant avec toute sa famille. Notre sagesse populaire à nous dit qu’un mensonge remplit une outre, deux n’y mettent rien.
Moi, j’ai rendu visite à ces familles là où elles étaient, en compagnie d’une délégation du parti El Wiam comprenant, entres autres, le Commissaire Ly Mamadou. Nous avons vu sur place, et non pas à partir des faubourgs parisiens, comment elles souffraient du fait de la promiscuité, des puces et autres insalubrités. Cependant, notre statut à nous est un statut de parti politique, pas d’ONG humanitaire, ni d’organisation des Droits de l’Homme. On ne doit pas s’attendre à nous voir en situation opérationnelle sur le lieu des évènements. Nous aurions exprimé nos positions publiquement si les familles avaient été lésées dans leurs droits. Ce n’était pas le cas. Mon propos ici est de rétablir la vérité, en montrant jusqu’où des esprits malveillants peuvent aller dans la déformation des réalités et la manipulation pour déstabiliser cette frange de la population, afin de saper ses chances de devenir une véritable force de progrès économique et de cohésion sociale en Mauritanie.
Pour le reste, je ne prétends pas être le représentant, forcé ou non, des Haratines en Mauritanie et personne ne m’a désigné comme tel. Si une certaine image symbolique de la lutte contre l’esclavage colle à ma personne, comme à d’autres militants de la première heure du Mouvement El Hor, c’est qu’à un moment crucial de notre histoire, nous nous sommes levés pour dénoncer la pratique esclavagiste dans notre pays. Nous n’avions pas seulement « élevé le petit doigt », comme le réclame Diko, mais nous avions levé tout haut l’étendard de l’émancipation et nous avions consenti les sacrifices nécessaires. Ma vision des choses est qu’aujourd’hui la pratique de l’esclavage n’existe plus juridiquement. Des séquelles en restent et resteront encore quelque temps, si l’on en croit l’ambassadeur américain qui disait récemment à un groupe d’invités que les séquelles de l’esclavage persistent toujours aux Etats-Unis, 150 ans après l’abolition de l’esclavage dans cette superpuissance. Pendant qu’on y est, pourquoi ne pas demander aux historiens français combien de temps leur pays a mis pour se débarrasser des séquelles de l’esclavage depuis que Victor Schoelcher a fait prendre le Décret d’abolition en 1848 ? De mon point de vue, la meilleure manière de faire face à ces séquelles consiste à adapter les formes de lutte aux évolutions de la situation, en encourageant l’accès à l’éducation pour cette frange de la population et son intégration dans les circuits économiques et sociaux.
Ceci dit, le rôle militant en son temps que j’ai rappelé ne justifie aucunement et ne cherche pas à revendiquer un quelconque droit de représentation des Haratines, ou Maures noirs comme je préfère les appeler. En fait, ceux que je représente aujourd’hui ce sont les citoyens mauritaniens qui m’ont élu comme député à l’Assemblée nationale ou ceux qui m’ont élu maire de la Commune de N’Diago, qu’ils soient Maures noirs, Maures blancs, Pulaar, Soninké ou Oulof. Je me permets de dire aussi que, dans une certaine mesure, je représente, moralement et politiquement, les populations qui ont fait confiance au parti El Wiam que je préside et qui compte dix députés à l’Assemblée nationale, douze maires de communes et plus de 600 Conseillers municipaux, élus dans diverses circonscriptions électorales et représentant toutes les composantes ethniques et sociales du peuple mauritanien. Au parti El Wiam, nous revendiquons une représentation nationale et nous y veillons. Notre programme politique reflète cette vision et nos programmes d’action s’orientent, en particulier, vers la lutte pour la justice sociale et l’égalité des chances pour tous les citoyens. En cela, il accorde une attention prioritaire aux couches les plus défavorisées de la population.
S’agissant de la question de l’appartenance des Maures noirs à la communauté maure en général, mes positions sont connues depuis le procès en justice des militants du Mouvement El Hor en 1979. Elles se réfèrent au creuset culturel qui a forgé au fil du temps le destin de cette communauté et qui a déterminé, par l’effet de la culture, l’identité de ses individus. A ce sujet, notre compatriote Waiga Abdoulaye a mené une étude très instructive sur la composition de la société mauritanienne à travers l’histoire dont vous pouvez prendre connaissance. Si je dois aujourd’hui discuter de cette question fondamentale, ce n’est pas par des échanges sur les réseaux sociaux et certainement pas avec une personne, visiblement agitée, que je ne connais pas et dont la sortie abracadabrante ne laisse entrevoir aucun engagement sincère et entier pour la cause haratine.
Boydiel Ould Houmeid
Par Facebook
NB: « Franchement
parler, Messaoud et Boidiel méritent un lynchage public. »
« Procès des
abolitionnistes : le propriétaire du terrain lève un coin du voile »
Vidéo : Mauritanie
: Déguerpissement Zone Bouamatou l’état impose la terreur sur les pauvres
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